Travailler en création numérique : évolution des métiers graphiques 2D-3D et enjeux de formation
Par SYNTHÈSE - Pôle Image Québec
2021-12-01
Par SYNTHÈSE - Pôle Image Québec
2021-12-01
SYNTHÈSE-Pôle Image Québec remercie toutes les personnes qui ont participé aux différentes étapes de cette enquête : les professionnelles et professionnels de l’industrie des effets visuels, de l’animation, du jeu vidéo et des expériences numériques immersives du Québec, ainsi que les enseignantes et enseignants des établissements collégiaux et universitaires. Leur collaboration a permis de dresser un portrait de l’évolution technologique des métiers graphiques 2D et 3D en création numérique et des enjeux d’adéquation formation-emploi.
Direction générale de SYNTHÈSE
Brigitte Monneau
Direction de projet
Anne Le Bouyonnec
Chargée de projets
Isabelle Lefebvre
Recherche, analyse et rédaction
Anne Le Bouyonnec
Isabelle Lefebvre
Andréane Morin-Simard
Magali Ouellet
Entrevues
Anne Le Bouyonnec
Isabelle Lefebvre
Révision rédaction
Alexia Boyer
Yuani Fragata
Albane Français
Brigitte Monneau
Coordination et communications
Alexia Boyer
Albane Français
Conception graphique
Alexandre Chocron
La Workshop
Hugo Nélis
Illustrations
Cyril Doisneau
Révision linguistique
Joë Villaverde
Traitement des données
Alexia Boyer
Isabelle Lefebvre
Marc-Antoine Lévesque
Sophie Lupien
Andréane Morin-Simard
Magali Ouellet
Jean-Charles Ray
Léa Roy-Beaudoin
SYNTHÈSE - Pôle Image Québec
1501, rue de Bleury, 7e étage
Montréal (Qc) H3A 0H3
Téléphone : 514-288-3447 poste 1431
info@polesynthese.com
polesynthese.com
Avec la collaboration du ministère de l’Enseignement supérieur
Cette enquête a initialement été réalisée à la demande du ministère de l’Enseignement supérieur. Elle ne lie pas les ministères et organismes qui ont collaboré aux travaux. Elle ne représente pas leurs orientations. L’enquête représente l’opinion des personnes interrogées et son contenu n’engage que l’auteur.
C’est parce qu’il est toujours plus constructif de se rassembler pour faire face aux défis de nos industries qu’existent les associations sectorielles. Que ce soit dans le secteur du cinéma et de la télévision, du jeu vidéo ou des expériences numériques immersives, se rassembler afin de s’épauler et de défendre les intérêts de nos membres constitue notre raison d’être.
C’est ce que nous faisons aujourd’hui sous la bannière de SYNTHÈSE afin de traiter d’une problématique clé pour les 700 entreprises québécoises que nous représentons : les enjeux de main-d’œuvre dans le domaine de la création numérique.
Nous représentons des industries dont le savoir-faire, l’inventivité et l’expertise sont mondialement reconnus mais qui, depuis plusieurs années, font face à une pénurie de main-d’œuvre qui pourrait à terme nuire à leur croissance et à leur positionnement de chefs de file.
Parallèlement à cela, nous savons que le Québec dispose d’un réseau d’universités et de cégeps de qualité, capable de former les prochains experts de la création numérique. C’est pourquoi, avec SYNTHÈSE, nous sommes engagés dans une démarche de réflexion sur l’adéquation formation-emploi et dans la mise en œuvre d’actions concrètes pour ce secteur.
Plusieurs enquêtes réalisées entre 2016 et 2018 dans les différents secteurs de la création numérique ont déjà souligné un manque de main-d’œuvre adéquatement qualifiée dans chaque secteur. Aujourd’hui, la convergence des formations, compétences et métiers au sein de cet écosystème est de plus en plus manifeste. Ce constat appelle à l’adoption d’une vision d’ensemble.
C’est la raison pour laquelle SYNTHÈSE aborde aujourd’hui la problématique de la main-d’œuvre en dressant le premier portrait transverse aux trois secteurs que sont les effets visuels et l’animation, le jeu vidéo et les expériences numériques immersives. Fruit de centaines d’heures de consultations avec les experts et enseignants du secteur, ce rapport intitulé « Travailler en création numérique : évolution des métiers graphiques 2D et 3D et enjeux de formation » brosse un portrait étoffé des besoins de notre industrie. À partir des constats qui se dégagent de cette enquête, le rapport propose une série de pistes de réflexion où toutes les parties prenantes trouvent leur place.
La création numérique étant une industrie aussi mouvante que dense et complexe, elle voit sans cesse ses pratiques évoluer et de nouvelles compétences émerger. Aussi, le présent rapport constitue le point de départ d’un travail de vigie en continu fondé sur l’expertise de SYNTHÈSE en matière d’adéquation formation-emploi. Cette veille permettra d’identifier les tendances professionnelles émergentes et de favoriser les échanges entre les institutions de formation et les entreprises des trois secteurs.
Soucieuses d’apporter des solutions aux enjeux de main-d’œuvre, nos associations appuient la démarche entreprise par SYNTHÈSE pour établir un dialogue permanent entre les besoins de nos membres et l’expertise du milieu de l’enseignement supérieur. En cette période de relance économique, nous sommes fiers de soutenir cette initiative afin que le Québec conserve son leadership dans les arts numériques.
Sophie Couture
Directrice générale
Xn Québec
Valérie Daigneault
Directrice du secrétariat de la Grappe audiovisuelle
BCTQ
Emilien Roscanu
Directeur général par Intérim
La Guilde du jeu vidéo du Québec
Les secteurs des effets visuels et de l'animation, du jeu vidéo et des expériences numériques immersives sont riches d'opportunités d'affaires et offrent un terrain fertile pour l’expérimentation et la recherche et développement. L'évolution technologique favorise cette effervescence, et certains enjeux paraissent aujourd'hui insaisissables à cause de la complexité des pratiques et de leurs nuances. Aussi, nous avons tenté de réunir les sujets et les enjeux de formation les plus importants, à la lumière des différents témoignages, qui permettront la création d’une relève d’artistes durable et abondante en créations numériques.
Bien sûr, nous avons dû faire des choix, car tout ne peut être dit dans un seul rapport. C'est pourquoi nous réitérerons l'exercice en continu avec SYNERGIES afin de servir, informer et rassembler les expertes et experts de l'industrie et de l'enseignement autour d'une veille pertinente. Cette vigie en continu présente la synthèse des compétences liées aux métiers de l'image numérique et des défis de la formation.
Nous avons été fort impressionnées par l’ouverture manifestée par les expertes et experts de l’industrie et les enseignantes et enseignants en réponse à notre enquête. Nous sommes reconnaissantes de leur participation généreuse aux entretiens qui ont parfois dépassé le cadre horaire prévu. On voit bien à quel point le désir de partager et la passion du métier sont grands ! Le Québec est porteur de leadership et d'expertises pointues, les forces vives sont motivées et volontaires, valorisons-les !
À tous les intervenants et intervenantes qui nous ont soutenu et contribué à cette initiative essentielle, un immense MERCI !
Bonne lecture !
Anne et Isabelle
Le présent rapport constitue une mise à jour des résultats préliminaires de l’enquête « Travailler en création numérique aujourd’hui et demain : l’évolution technologique et organisationnelle des secteurs des effets visuels, du jeu vidéo et des expériences numériques immersives et son impact sur les compétences, les pratiques professionnelles, les emplois et les formations » remis au ministère de l’Enseignement supérieur en juin 2021.
La première version de ce rapport, qui se basait sur la moitié des données des sondages et entretiens réalisés dans le cadre de l’enquête, était centrée sur les préoccupations d’adéquation formation-emploi du programme DEC Techniques d'animation 3D et de synthèse d’images. Le présent rapport intègre de nouvelles données afin de mieux représenter les enjeux de concordance pour l’ensemble de l’offre de formation initiale menant aux métiers graphiques 2D et 3D cernés par l’enquête.
L’enquête s’inscrit dans un processus de vigie en continu. De plus, des mises à jour des résultats sont prévues afin de suivre le rythme des changements technologiques et organisationnels constants des entreprises des secteurs ciblés, c’est-à-dire, les effets visuels, le cinéma d’animation, le jeu vidéo et les expériences numériques immersives.
1. Une étude qualitative qui dresse un portrait global des tendances des changements technologiques et organisationnels des secteurs de la création numérique touchés, soit les effets spéciaux, le cinéma d’animation 3D, le jeu vidéo et les expériences numériques immersives (la réalité virtuelle et la scénographie immersive). L’enquête propose aussi des constats sur les effets généraux de ces changements sur l’ensemble des métiers graphiques 2D et 3D et des aptitudes à développer afin de s’y ajuster.
2. Un portrait qualitatif des besoins en main-d'œuvre et des difficultés d’embauche des entreprises en création numérique 2D et 3D.
3. Un état de la situation de l’offre de formation initiale menant aux métiers graphiques 2D et 3D. L’enquête précise les besoins à combler en formation initiale à la lumière des besoins en main-d'œuvre et des changements technologiques et organisationnels actuels, et à venir.
1. Une étude approfondie des compétences et de l’effet des changements technologiques et organisationnels sur des métiers spécifiques. En d’autres termes, l’enquête ne présente pas l’état de l’évolution de chacun des métiers graphiques 2D et 3D.
2. Un portrait statistique de la main-d'œuvre ou des besoins en recrutement, bien que quelques données quantitatives soient citées dans les parties traitant de ces sujets. Aucune recherche statistique spécifique aux métiers touchés par l’analyse n’a été réalisée dans le cadre de cette enquête de nature qualitative.
3. Des informations sur les effets de changements technologiques ou organisationnels précis (comme l’intelligence artificielle, la production virtuelle, etc.) qui dépassent l’ordre des constats généraux sur l’évolution des métiers en création numérique et leurs compétences.
4. Des données qui traitent des enjeux d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI) dans les secteurs visés. L’enquête ne dépasse pas le portrait général des changements technologiques et organisationnels s’opérant sur les métiers graphiques 2D et 3D. Elle n’aborde pas le profil des personnes occupant ces emplois ou les enjeux et difficultés d’embauche qui y sont liés. L’enquête reconnaît qu’il s’agit là d’enjeux majeurs et complexes qui requièrent un travail de collecte de données et d’analyse approfondie qui dépasse la portée de ce rapport.
5. Des conclusions sur les enjeux de maillage entre les établissements d’enseignement et les entreprises en recherche et développement.
Les prochaines publications des résultats de la vigie en continu menée par SYNTHÈSE répondront à plusieurs des éléments énumérés ci-dessus. Les étapes subséquentes de l’enquête aborderont, entre autres, les points 1, 3 et 4.
Fondée en août 2018 par le Ministère de l’Enseignement supérieur du Québec (MES), SYNTHÈSE — Pôle Image Québec a pour mission de développer des initiatives porteuses et concrètes afin de stimuler les synergies entre les établissements d’enseignement supérieur et les entreprises de la création numérique du point de vue de la formation et de la recherche, et ce, partout au Québec.
Le rôle de SYNTHÈSE est de favoriser la collaboration entre les différents acteurs et actrices de la création numérique à travers trois principaux objectifs :
1. Stimuler l’adéquation de la formation de la main-d’œuvre d’aujourd’hui et de demain avec la réalité des entreprises de notre écosystème ;
2. Mettre en place des projets porteurs entre les actrices et acteurs de tout azimut (professeures et professeurs, étudiantes et étudiants, professionnelles et professionnels de l’industrie) ;
3. Offrir une vitrine nationale et internationale pour l’essor et le développement de l’expertise de pointe québécoise dans nos secteurs.
SYNTHÈSE réalise une enquête visant à documenter la transformation des secteurs des effets visuels et de l’animation, du jeu vidéo et des expériences numériques immersives (appelés « les secteurs » dans le texte). L’enquête cible les métiers graphiques 2D et 3D de niveaux d'entrée (moins d'un an d'expérience) et junior (entre 1 et 3 ans d'expérience) et dresse un portrait de leur évolution en réponse aux changements technologiques et organisationnels ainsi que des modèles d’affaires des entreprises des secteurs ciblés.
Particulièrement orientée sur les enjeux d’adéquation formation-emploi, l’enquête documente les transformations en cours et à venir, ainsi que les besoins à combler par les programmes d’études.
Le projet d’enquête s’inscrit dans un processus de vigie en continu qui cherche à documenter les changements et les besoins des entreprises et des établissements postsecondaires sur le long terme.
Ce rapport vise les objectifs suivants :
1. Répertorier les postes d’entrée et les exigences d’embauche pour les métiers graphiques 2D et 3D dans les trois secteurs à l’étude.
2. Répertorier les transformations actuelles et à venir ayant potentiellement un impact sur les métiers de la création numérique.
3. Documenter les effets de ces changements sur l’exercice des métiers graphiques 2D et 3D d’entrée (moins d’un an d’expérience) et juniors (entre un et trois ans d’expérience) :
4. Recueillir des informations sur les besoins à combler par l’offre de formation initiale ciblée (voir Tableau 1 et Tableau 2 ci-dessous) menant aux professions graphiques 2D et 3D dans les trois secteurs d'activité :
[^1]: Le terme « compétence » est compris dans son acception pour les professionnelles et professionnels de l’industrie qui ont participé à l’enquête. La définition du terme est proche des tâches effectuées par les métiers et les aptitudes qui en découlent, sans forcément faire de distinction entre les domaines des savoirs, savoir-faire et savoir-être à l’œuvre pour les réaliser. La compréhension du terme tel qu’employé dans ce rapport peut différer de celle du domaine de l’enseignement (notamment de celle utilisée par l’approche par compétences).
Les résultats que présente ce rapport sont fondés sur une recherche exploratoire, basée sur une analyse qualitative. L’enquête présente les constats tirés d’une collecte de données qui s’inscrit dans un processus de vigie en continu. Comme les secteurs étudiés reposent sur une innovation technologique constante, SYNTHÈSE juge essentiel de poursuivre le processus de collecte d’informations, suivant le rythme d’évolution de ces secteurs.
Ce rapport est divisé en deux parties afin de refléter les différents cycles de collectes d'informations de l'enquête, ces derniers suivant des procédés méthodologiques distincts.
Cette première section du rapport vise à dresser un portrait général de l’industrie vers laquelle les finissantes et finissants des programmes de formation collégiale et universitaire visés par l’enquête se dirigent.
Le premier chapitre, « L’écosystème québécois des trois secteurs ciblés : effets visuels et animation, jeu vidéo et expériences numériques immersives », présente brièvement l’historique et les modèles d’affaires principaux de chacun des trois secteurs et donne quelques statistiques sur les entreprises et la main-d'œuvre. Les informations qui y sont présentées sont tirées d’une revue documentaire et de consultations auprès des associations sectorielles représentant les trois secteurs, soit le Bureau du cinéma et de la télévision du Québec (BCTQ), La Guilde du jeu vidéo du Québec et Xn Québec.
Le deuxième chapitre, « L’évolution technologique dans les secteurs des effets visuels et de l’animation, du jeu vidéo et des expériences numériques immersives », présente quelques changements technologiques qui transforment les pratiques et les chaînes de production dans l’industrie. Ces réflexions sont issues de consultations avec les professionnelles et professionnels du milieu ainsi que de la documentation recensée pendant l’enquête.
Le troisième chapitre, « Les postes de niveaux d’entrée et junior », recense les postes d’entrée, quelques critères d’embauche ainsi que les diplômes et compétences recherchés par les entreprises dans les secteurs de la création numérique. Ces résultats sont tirés de sondages réalisés par des représentantes et représentants des ressources humaines de six entreprises. Cette collecte a été effectuée en parallèle avec la collecte de données primaires et secondaires de l’enquête (voir la méthodologie décrite dans la Partie II, ci-dessous).
Cette partie du rapport se base sur une revue documentaire, sur 79 sondages lancés auprès d’employées et d’employés des entreprises issues des trois secteurs à l’étude, ainsi que sur deux types d’entretiens individuels semi-dirigés, soit des entrevues réalisées auprès de professionnelles et professionnels et des entretiens réalisés auprès d’enseignantes et d’enseignants de programmes collégiaux et de premier cycle universitaire menant vers des métiers graphiques 2D et 3D. Quarante-neuf participantes et participants issus des trois secteurs et 16 professeurs ont été interrogés. En tout, 37 entreprises, deux travailleurs autonomes, cinq établissements d’enseignement collégial et cinq universités ont participé à la collecte de données considérées dans cette partie du rapport (voir Annexe E pour la liste des entreprises et Annexe F pour la liste des établissements d’enseignement consultés dans le cadre de l’enquête).
Les constats présentés dans cette deuxième partie du rapport sont issus de la triangulation de trois sources d’informations :
1. Les sondages et entretiens menés auprès des professionnelles et professionnels des entreprises des secteurs étudiés (données primaires).
2. Les réponses des professeurs collégiaux et universitaires (données secondaires).
3. La collecte de données documentaires (données tertiaires). À cet effet, il est important de noter que le nombre et la fréquence des rapports et des études sur les questions de main-d'œuvre et de formation ne reflètent pas l’importance cruciale que leur accordent les trois industries – voilà pourquoi certains documents datent de plusieurs années.
Toutes les réponses des participantes et participants aux différentes étapes de l’enquête ont été anonymisées. De plus, des accords de non-divulgation et de confidentialité ont été signés entre SYNTHÈSE et les différents intervenants et intervenantes.
Le quatrième chapitre, « Impact des changements technologiques sur les métiers graphiques 2D et 3D de niveaux d’entrée et junior », présente les changements technologiques qui transforment (ou pourraient transformer) les métiers graphiques 2D et 3D de niveaux d’entrée et junior ainsi que les compétences que ces artistes doivent développer afin d’y faire face.
Le cinquième chapitre, « Enjeux d’adéquation formation-emploi : besoins en main-d’œuvre, en compétences et en formation initiale », rapporte les propos des répondantes et répondants sur les défis de recrutement, les compétences essentielles ainsi que les enjeux d’adéquation formation-emploi pour les programmes d’études collégiales et de premier cycle universitaires.
Le rapport se termine par les « Constats et pistes de réflexion ». Ce dernier chapitre présente les conclusions de l’enquête sur les besoins en main-d’œuvre et en adéquation formation-emploi pour les programmes de formation initiale visés. Quelques pistes de solution sont finalement proposées afin d’accroître l’adéquation formation-emploi entre les programmes de formation collégiale et universitaire et les entreprises des trois secteurs ciblés.
Ce premier chapitre dresse un portrait général des trois secteurs de l’écosystème québécois de la création numérique visés par cette enquête. Pour chacun des secteurs, un bref historique de son développement, ses principaux modèles d’affaires ainsi qu’un état des lieux de ses besoins en main-d’œuvre sont proposés.
Les trois secteurs qui composent l’écosystème se sont développés de manière asymétrique en fonction, d’une part, de la demande croissante du public pour des contenus utilisant des images numériques et, d’autre part, des différents soutiens gouvernementaux ayant favorisé l’implantation et le maintien de grandes entreprises internationales qui côtoient des PME de propriété québécoise. Le dénominateur commun entre ces différentes composantes est une reconnaissance mondiale du savoir-faire, de la créativité et des compétences de la main-d’œuvre, formée en grande partie au sein d’une quinzaine d’établissements d’enseignement supérieur de la province. C’est pourquoi le Québec se positionne en chef de file dans les secteurs des effets visuels et de l’animation (1.1.), des jeux vidéo (1.2.) et des expériences numériques immersives (1.3.)[^1].
[^1]: Sauf indication contraire, pour l’ensemble de la section, les données sur les emplois et les entreprises qui ne sont pas accompagnées de sources bibliographiques proviennent de documents transmis par correspondance privée avec les associations sectorielles.
L’industrie des effets visuels et du cinéma d’animation, représentée par le Bureau du cinéma et de la télévision du Québec (BCTQ), regroupe 37 studios répartis majoritairement dans la grande région de Montréal et, dans une moindre mesure, dans la Capitale nationale.
L’expertise québécoise s’est développée dès le milieu des années 1980. Dans les années 1990, le secteur a connu un réel essor sous l’impulsion d’entreprises pionnières qui se sont démarquées en créant des logiciels qui allaient, par la suite, révolutionner le milieu (Softimage, Discreet Logic). À ceux-là se sont ajoutés des logiciels canadiens tels que Side FX (Houdini) ou Alias, puis Autodesk qui ont permis aux entreprises d’asseoir leur leadership et de se positionner au diapason des développements technologiques.
La grande majorité des entreprises dans le secteur des effets visuels et de l’animation sont des prestataires de services pour de grands studios étrangers. Elles ne détiennent pas la propriété intellectuelle du produit sur lequel elles travaillent.
En animation, on estime à environ 10 % les entreprises qui produisent des contenus de propriété québécoise ou canadienne. Plusieurs d’entre elles ont une activité mixte, produisant des contenus originaux tout en mettant leurs infrastructures et leurs ressources humaines au service d’entreprises étrangères.
Cette économie non propriétaire a pu se développer grâce à la bonification, en 2009, des crédits d’impôt pour les services de production en effets visuels et cinéma d’animation. Selon les données de Montréal International, entre 2011 et 2019, pas moins de 16 grands joueurs internationaux ont choisi de s’établir dans la métropole (Montréal International 2021, 9).
Selon le rapport d’activités du BCTQ pour 2020-2021, les retombées économiques du secteur des effets visuels sont passées de 41 millions de dollars en 2009 à 622 millions en 2019, suivant un niveau de croissance annuelle moyen de 20 %. Du côté de l’animation, on est passé d’un volume annuel de 120 millions de dollars en 2015-2016 à 353 millions en 2019-2020 (Bureau du cinéma et de la télévision du Québec 2021a, 15).
L’industrie des effets visuels et de l’animation se situe essentiellement en aval de la chaîne de valeur du milieu du cinéma et de la télévision, soit la production et la postproduction. La pression est donc importante et la demande très élevée pour un certain nombre de compétences, créant un goulot d’étranglement pour certains métiers (voir la section 5.1.2. de ce rapport pour plus de détails).
Selon la plus récente étude statistique annuelle du BCTQ, le secteur des effets visuels et de l’animation employait près de 4500 personnes en 2020[^1] — 2770 en effets visuels et 1560 en film d’animation — avec un salaire annuel médian estimé à 82 500 $. On estime que le ralentissement qu’aura connu le secteur en conséquence de la crise sanitaire sera rattrapé dès le troisième trimestre de 2021, avec près de 6250 emplois prévus et une projection de besoin de main-d’œuvre de plus de 7250 emplois en 2023 (Bureau du cinéma et de la télévision du Québec 2021b, 18, 34, 48).
La pénurie de main-d’œuvre atteint des niveaux inquiétants, pouvant même aller jusqu’à freiner l’essor du secteur. Les entreprises doivent fréquemment se tourner vers le recrutement dans d’autres provinces canadiennes et à l’étranger (voir Côté et Pilon 2016, 39, 41‑42, 68‑78; Quintas 2016, 33).
Cette situation est d’autant plus préoccupante que plusieurs de ces postes sont également très recherchés au sein de l’industrie du jeu vidéo, créant par conséquent une forte compétition au sein même de l’écosystème.
[^1]: Emplois Équivalent Temps Plein (ETP)
Le développement de l’industrie du jeu vidéo au Québec a suivi un parcours assez similaire à celui du secteur des effets visuels et du cinéma d’animation. Si les deux premières entreprises locales — Behaviour Interactive et Kaydara — ont commencé leur activité de développement de jeux au début des années 1990, c’est la création du crédit d’impôt pour la production de titres multimédias en 1997 qui contribué à l’essor du secteur en ouvrant la voie à l’implantation de studios étrangers (Ubisoft, Eidos, Electronic Arts, WB Games et Gameloft).
On estime qu’un tiers des studios de jeux vidéo canadiens est situé dans la province, devançant ainsi la Colombie-Britannique et l’Ontario. Si la plupart d’entre eux se concentrent dans la région métropolitaine, plusieurs se sont implantés dans les régions de Québec, de Sherbrooke et de Saguenay. Aussi, la Guilde du jeu vidéo du Québec, qui représente les intérêts du secteur, compte désormais plus de 245 membres.
Le secteur du jeu vidéo s’est bâti sur un modèle d’affaires basé sur la prestation de services, sous l’impulsion des studios étrangers implantés dans la province. Aussi, cette partie de l’industrie se concentre sur les étapes de fabrication des productions; le développement et la commercialisation de propriété intellectuelle demeurent l’apanage des entreprises étrangères et sont gérés par leurs sièges sociaux.
Depuis 2015, on assiste à l’émergence de studios indépendants qui sont en mesure de développer, produire et commercialiser leurs propres propriétés intellectuelles.
Cette hausse du nombre de studios, ainsi que les nouveaux investissements étrangers, a fait bondir la valeur de l’industrie de 20 % entre 2017 et 2019, laquelle dépasse désormais le milliard de dollars (La Guilde du jeu vidéo du Québec 2021).
Cette croissance n’est pas sans incidence sur les besoins de main-d’œuvre. De plus, petits et grands studios convoitent les mêmes compétences et ne sont évidemment pas à armes égales en ce qui concerne leur capacité d’attraction et de rétention de talents.
Les studios membres de La Guilde du jeu vidéo du Québec emploient 13 000 personnes pour la région de Montréal et environ 4 000 dans le reste de la province. On prévoit la création de 2000 emplois dans les deux prochaines années, avec des salaires moyens de 75 600 $ (chiffres de 2019) (La Guilde du jeu vidéo du Québec 2021).
Les besoins de main-d’œuvre du secteur se situent autant au niveau des technologies de l’information (TI) qu’au niveau des compétences artistiques. Comme pour l’industrie des effets visuels et du cinéma d’animation, le recours à de la main-d’œuvre étrangère est la solution privilégiée pour répondre à la demande, particulièrement au niveau des postes intermédiaires et seniors (voir KPMG 2017, 2; Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 15)[^1].
Avec l’augmentation du nombre de studios indépendants qui développent et produisent leurs propres produits, des compétences en commercialisation, marketing et distribution devront être développées. De plus, pour poursuivre la croissance de l’industrie vidéoludique, notamment au-delà de la grande région métropolitaine, il faudra aussi miser sur le développement de compétences en gestion et en entrepreneuriat (voir Dagenais, Malouin et Arsenault 2017, 11‑14; KPMG 2017, 27; Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 20‑21).
[^1]: À ce sujet, on souligne que les problèmes qui limitent les possibilités de recrutement des entreprises des trois secteurs dépassent largement les enjeux d’adéquation formation-emploi ciblés dans ce rapport. On note, par exemple, des freins importants éprouvés par les studios relatifs aux structures administratives gouvernementales (provinciales et fédérales) afférentes à l’emploi et à l’immigration. L’un des enjeux notoires relevé est la désuétude actuelle du système de classification des professions (CNP) qui ne tient pas compte des professions émergentes pour lesquelles il y a une forte demande. L’Annexe C présente les données recensées sur les métiers des trois secteurs considérés dans l’enquête et propose une liste (non-exhaustive) des professions existantes qui ne sont actuellement pas incluses dans les listes de ce système de classification.
Le secteur des expériences numériques immersives regroupe des entreprises qui se rejoignent par « des activités commerciales impliquant la production de contenus et d’expériences grâce à des outils informatiques et des technologies numériques » (Fragata, Gosselin et Desjardins 2018, 16).
On peut circonscrire les entreprises d’expériences numériques immersives en fonction de la nature de leurs produits. Exploitant la notion d’expérience et de mise en scène de contenus narratifs, ces entreprises rejoignent le public dans des espaces physiques par le biais de spectacles, d’expositions muséales, de parcours sensoriels ainsi que par des contenus vidéo « linéaires » présentés dans des espaces virtuels via des appareils spécifiques (casques de réalité virtuelle et réalité augmentée).
Ce n’est que depuis dix ans que cette industrie connaît un réel essor. Représentée par Xn Québec (l’association des producteurs d’expériences numériques), elle comprend une centaine d’entreprises, majoritairement de petite taille (moins de 10 employés) (Xn Québec et Habo 2021, 7).
L’industrie des expériences numériques immersives n’a pas encore de modèle d’affaires bien établi. En effet, la chaîne de valeur emprunte plusieurs modèles qui relèvent du jeu vidéo, du spectacle, du tourisme, du cinéma et des parcs d’attractions. Ces hybridations témoignent du potentiel créatif de ce nouvel écosystème.
Les entreprises ne font pas de productions de masse à grande échelle et chaque projet peut être considéré comme un produit unique.
Même si plus des deux tiers des entreprises développent leurs propres propriétés intellectuelles (PI), seulement 38 % des revenus sont générés par la commercialisation de ces PI[^1]. Seules les entreprises de grande taille arrivent à générer plus de la moitié de leurs revenus par la commercialisation des PI développées (Xn Québec et Habo 2021, 11).
C’est pourquoi la majorité des entreprises en expériences numériques immersives sont fournisseuses de services. Elles s’engagent dans cette voie afin de pouvoir dégager le financement nécessaire au développement de leurs propriétés intellectuelles puisque, bien que très créatifs et innovants, les projets ne sont à ce jour pas considérés dans les programmes des bailleurs de fonds tels que les différents paliers du Conseil des arts du Canada ou le Fonds des Médias du Canada.
Le besoin de définir le modèle d’affaires du secteur est jumelé à sa pluridisciplinarité et à sa croissance rapide : on note une augmentation des revenus de 13,5 % en 2019 (Synthèse Pôle Image Québec 2021, 5). Dans ce contexte, il ne faut pas se surprendre que l’accès à la main-d’œuvre et à sa formation soit au cœur des préoccupations des entreprises.
[^1]: Le pourcentage inclut les revenus de séries web, baladoémissions et autres contenus linéaires.
Le secteur des expériences numériques immersives emploie 2300 personnes. Pour l’année 2020, les membres de Xn Québec ont rapporté un salaire moyen de 55 000 $ (Xn Québec et Habo 2021, 11, 74).
La structure de cette industrie conduit les entreprises à embaucher de la main-d’œuvre pigiste, plutôt que salariée à temps plein. Puisqu’il est très hybride, c’est le secteur qui fait appel à la plus grande variété de compétences. En effet, outre les compétences artistiques et techniques, ce secteur a besoin de main-d’œuvre spécialisée en design et en fabrication d’objets physiques, en mise en scène et même en architecture.
Les compétences généralistes en gestion et commercialisation ainsi que les compétences en entrepreneuriat seront aussi cruciales à court et moyen terme.
Cette section présente les avancées technologiques qui contribuent à la transformation de la création numérique, qu’elles soient communes aux trois secteurs (2.1) ou touchent de façon plus spécifique les effets visuels et l’animation (2.2), le jeu vidéo (2.3) ou les expériences numériques immersives (2.4).
La section consacrée à la prospection des tendances technologiques (2.5) résume les tendances perçues par les expertes et experts du milieu et leur impact sur les métiers de la création numérique pour les prochaines années.
On entend par évolutions technologiques, les changements successifs qui façonnent le développement des activités des entreprises. Pour les secteurs qui font l’objet de cette étude, on recense trois facteurs principaux qui influencent leur transformation : le développement de logiciels (2.1.1), le développement de matériels (2.1.2) et le développement des capacités des réseaux (2.1.3). Ces trois facteurs redéfinissent dans une large mesure la façon de concevoir les produits de divertissement numériques.
Les logiciels de création numérique permettent de générer des images de haute qualité de plus en plus rapidement pour différents contenus de jeu, de cinéma, ou d’expériences numériques. Ces logiciels sont nombreux, spécialisés, extrêmement précis et parfois très complexes. Leur maîtrise nécessite des heures de formation et d’apprentissage.
Les outils de génération procédurale permettent d’automatiser certaines tâches artistiques par la manipulation de paramètres mathématiques. Tous les logiciels ont, dans une large mesure, intégré ces procédés automatisés de création artistique. Selon les expertes et experts consultés, leur utilisation est une source de profonds changements car ils permettent aux artistes de créer beaucoup plus rapidement de nombreux éléments tels que les modèles, textures, ambiances et ombrages. La méthode de génération procédurale, désormais indispensable et en perpétuelle avancée, s’applique aux développements de tous les produits numériques.
L’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique (machine learning en anglais) améliore les performances des logiciels de création numérique. L’apprentissage automatique et l’apprentissage profond (deep learning) sont des systèmes intelligents qui appuient les artistes dans leurs différentes tâches de manière plus précise et plus rapide.
Les moteurs de calcul d’images (moteurs de rendu) calculent en temps réel ou non (prérendu) tous les paramètres d’une image : textures, éclairage, ombres, réflexions et autres. Ils permettent donc un rendu de l’image extrêmement réaliste. De l’avis des répondantes et répondants à cette étude, ils prennent une place majeure dans l’évolution technologique en raison de la qualité et du réalisme des images générées et de leur rapidité d’exécution. Par conséquent, ces moteurs décuplent les possibilités artistiques des productions.
Le matériel informatique inclut les consoles de jeu vidéo, les ordinateurs, les téléphones portables, les tablettes et les outils de captation.
Les consoles de jeu portables et les consoles de salon sont devenues en dix ans plus performantes, se sont connectées aux réseaux et proposent des extensions pour casque VR, ou manettes pour de meilleures expériences. Les consoles portables ont aussi bien évolué et permettent des jeux de qualité bien supérieure.
Les ordinateurs ont vu leurs processeurs améliorés, ce qui permet la manipulation de grands volumes de données.
Les téléphones portables et les tablettes figurent parmi les appareils les plus fréquemment utilisés et sont devenus beaucoup plus performants.
Enfin, les outils de capture (captation) constituent également des avancées technologiques au sein des trois secteurs ciblés : on parle, entre autres, de numériseurs volumétriques d’environnement et de personnages, de caméras 360° et de télédétection par laser (Lidar : laser imaging detection and ranging).
Les changements en matière de logiciels et matériels ne sauraient atteindre leur plein potentiel sans une capacité accrue des réseaux numériques. Ces derniers sont le troisième facteur qui vient bouleverser les méthodes de création des trois secteurs.
L’augmentation de la capacité des réseaux est rendue possible par le déploiement des réseaux internet haute vitesse et des services infonuagiques. Ces derniers permettent un déploiement en continu de l’offre de contenus culturels, déployée particulièrement par les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) ainsi que le partage de données et la création de banques de données volumineuses. On note que l’arrivée du jeu infonuagique, qui permet de participer à des jeux de haute qualité sans console de jeu physique, représente une évolution importante dans les secteurs du jeu vidéo et des expériences immersives.
Mais c’est certainement l’arrivée du réseau mobile de 5e génération (5G) qui va bouleverser significativement l’écosystème. Plus rapide, plus fiable et plus puissant, il s'impose comme la nouvelle norme du réseau mobile.
Ces trois variables (logiciels, matériels informatiques et réseaux) ont toujours influencé les trois secteurs de la création numérique et continueront de faire évoluer très rapidement la qualité de l’offre de divertissement dans les prochaines années.
Les transformations technologiques énoncées ci-dessus ont un impact sur les chaînes de valeur des trois secteurs. Toutefois, ces changements étant asymétriques selon les industries, ils seront traités séparément dans les sections 2.2, 2.3 et 2.4.
Les expertises en effets visuels et animation sont nombreuses et variées et, pour cette raison, les métiers sont segmentés en spécialités. Les principaux outils de création numérique en effets visuels mentionnés par les répondantes et répondants sont répartis entre des disciplines spécialisées correspondant à chacune des étapes de la création d’images.
En règle générale, les artistes ne couvrent que très rarement l’ensemble des étapes de la production des images. Le plus souvent, les artistes se spécialisent et utilisent par conséquent une grande variété de logiciels. Les chaînes de production diffèrent d’un studio à l’autre et il n’y a donc pas d’uniformité dans leur manière de produire. Selon le type de production et les choix de logiciels, les flux de travail (workflows) et les procédés peuvent changer. La complexité et la spécificité des différents corps de métiers en effets visuels et en animation augmentent selon les différents flux de travail et outils utilisés.
Les principaux outils de création numérique en effets visuels rapportés par les répondantes et répondants sont répartis entre des disciplines spécialisées correspondant à chacune des étapes du traitement des images. Le tableau ci-dessous résume les étapes qui correspondent à la spécialisation des métiers au sein des productions[^1][^2].
[^1]: Voir l’Annexe D pour des exemples de chaînes d’opérations.
[^2]: Bien qu’il soit indiqué dans le tableau, le film d’animation 2D n’est pas spécifiquement couvert à cette étape-ci de l’étude mais sera ajouté dans les étapes subséquentes de cette vigie.
Selon la spécialisation des artistes, les logiciels utilisés diffèrent. Les principaux logiciels cités par les répondantes et les répondants, dans chaque domaine de spécialisation, sont rassemblés dans l’Annexe B[^3].
Le terme d’animateur 3D est un intitulé générique qui désigne à la fois l’artiste 3D et son appartenance au secteur. En règle générale, l’animatrice ou l’animateur 3D doit se spécialiser, notamment en effets visuels, dans une à deux étapes seulement de cette courte liste. L’artiste ne couvre que très rarement l’ensemble des étapes présentées.
[^3]: Il existe plusieurs autres logiciels spécifiques qui peuvent ne pas se retrouver dans cette liste et qui pourront être ajoutés dans les étapes subséquentes de cette vigie.
En effets visuels et en animation, le calcul des rendus d’images s’est beaucoup amélioré, devenant de plus en plus sophistiqué au fil des ans. Ce qui prenait plusieurs jours à calculer il y a encore quelques années ne requiert aujourd’hui que quelques minutes. Parmi les changements technologiques, on note la montée du procédural et les adaptations et automatisations de tâches qu’offrent les différents logiciels. Ces améliorations technologiques dans la chaîne de production permettent une réalisation ajustée en continu et une vitesse d’exécution accrue, conférant ainsi à la réalisation et à la direction artistique une plus grande latitude. Certaines professionnelles et professionnels ont mentionné que plus on optimise les engins de rendu pour permettre un calcul rapide des images, plus le niveau graphique augmente sur le plan créatif, si bien que finalement, les temps de rendu restent les mêmes.
Le calcul de rendu en temps réel est une méthode de plus en plus convoitée par les studios d’effets visuels et d’animation. Généralement réservé aux techniques de jeux vidéo, le rendu d’image en temps réel (instantanéité, vitesse du calcul et affichage des images), favorise l’évolution de certaines tâches. Les entreprises qui ont adopté ce type de chaîne de production (pipeline en anglais) sont surtout des studios de films d’animation 3D qui utilisent parfois les moteurs de jeu en temps réel pour rendre leurs images finales. Un répondant qui travaille dans un studio ayant adopté ces outils, explique que, malgré les avantages de faire un film d’animation complet dans un moteur de jeu, cela demande plusieurs manipulations :
— null
L’utilisation de moteurs de jeu en temps réel pour créer des films d’animation change la façon de travailler des artistes et les force à s’adapter aux nouveaux outils et formats pour intégrer leurs éléments dans le moteur. L’avantage d’utiliser ces outils se trouve dans le fait que l’environnement des moteurs de jeu permet une réalisation plus itérative et plus souple.
De manière générale, la production (ou la création) d’effets visuels nécessite l’optimisation de la qualité de l’image, des ambiances, des environnements, des particules et des simulations d’effets de particules, ce qui semble, pour l’instant, incompatible avec les contraintes des moteurs de jeu et de l’affichage en simultané. Aujourd’hui, très peu d’entreprises en effets visuels se servent des moteurs de jeu en temps réel pour produire les rendus finaux d’un film. L’apport des moteurs de rendu en temps réel ne permet toujours pas d’atteindre la qualité d’image exigée par le cinéma. Plusieurs entreprises intègrent cependant les moteurs de jeu pour faire de la prévisualisation (previz), bien que les rendus finaux soient généralement toujours faits par des moteurs de rendus conçus pour le cinéma (prérendu).
La production virtuelle est un nouveau procédé de captation et de tournage de film réalisé avec des moteurs de rendu en temps réel. Ce qui était autrefois filmé sur un fond vert est maintenant capté sur des panneaux en diodes électroluminescentes (DEL) qui projettent des décors numériques (préalablement conçus) issus du moteur de jeu (scène 3D). Avec ce type de projection, un réalisateur peut facilement ajuster, en temps réel, le décor dans lequel l’image de l’actrice ou de l’acteur sera insérée en postproduction. Par conséquent, l’organisation du travail se voit modifiée : la dernière étape de l’imagerie 3D (créations des décors numériques) précède désormais le tournage et la captation des actrices et des acteurs.
Cette nouvelle façon de produire a été propulsée par les logiciels de rendu en temps réel qui permettent de changer les points de vue des caméras du plateau de tournage directement dans la scène 3D qui fait office de décor. Les ombres et les projections de lumières liées au décor sont directement reflétées sur les actrices, les acteurs et leurs vêtements, ce qui donne déjà un bon point de départ aux artistes en effets visuels. Cette méthode de production leur évite, par exemple, de devoir retoucher les reflets souvent laissés sur les actrices et les acteurs lors des tournages sur fond vert. Cela évite aussi d’avoir à simuler les effets provoqués par le reflet des environnements sur les actrices et les acteurs. Cependant, les expertes et les experts qui ont travaillé sur les plateaux virtuels nous ont précisé que les images de plateau reçues ont quand même besoin de retouches en composition finale. Même si la production virtuelle accélère le traitement de certains plans (les plus simples), les interventions des équipes d’effets visuels restent primordiales. Pour l’avenir, on peut s’attendre à ce que de nouvelles techniques d’intégration et de composition d’images tournées en production virtuelle changent le processus de traitement d’image en postproduction.
En plus de changer la façon de tourner, de générer des décors virtuels et de modifier les méthodes de travail en composition d’images finales (étapes du compositing surtout), la production virtuelle permet de faire participer les équipes d’artistes 3D plus tôt dans le processus de création du film, ce qui facilite les étapes de prévisualisation.
À Montréal, les studios MELS et les studios Grande offrent des installations de production virtuelle afin d’accueillir les gros studios américains qui travaillent déjà avec ces nouveaux procédés de captation (Québecor 2020).
Au cours des dernières années, le domaine de la simulation a réalisé d’importantes améliorations. Le logiciel Houdini par exemple (fleuron canadien) s’est emparé du marché. Il s’agit d’un outil de création procédural qui permet de produire des recettes et de les appliquer aux différents éléments à produire. Initialement conçu pour le secteur des effets visuels, Houdini est désormais utilisé par de nombreuses entreprises québécoises en jeu vidéo et expériences numériques immersives. Il dépasse le secteur des effets de simulation et permet d’éclairer, de texturer et d’animer.
D’autres logiciels de création procéduraux pour d’autres disciplines se sont déjà imposés dans les studios en effets visuels et en cinéma d’animation. On recense, entre autres, Substance Designer, Substance Designer & Painter, Maya, Nuke et Modo.
Des professionnelles et professionnels interrogés pour cette enquête soulignent que ces logiciels facilitent le travail des artistes, peu importe les types de spécialités qu’ils couvrent, en automatisant certaines fonctions qui étaient réalisées par des personnes il y a dix ans. A propos de l’utilisation de logiciels procéduraux, notamment en création de personnages ou d’environnements, un expert explique que selon lui, deux profils d’artistes risquent d’évoluer en parallèle :
— null
Ainsi, l’implantation du procédural dans les outils de création a beaucoup modifié les pratiques des artistes de création et ce, dans l’ensemble des métiers – et elle continuera de le faire.
L’apprentissage automatique (machine learning) est un champ d’étude de l’intelligence artificielle qui permet aux ordinateurs « d'apprendre » à partir de données. Dans le secteur des effets visuels et de l’animation, il vise plusieurs aspects de la création et de l’automatisation de procédés et permet donc d’optimiser les flux de travail (workflows). Plusieurs intervenantes et intervenants sont d’avis que l’apprentissage automatique favorise la vitesse d’exécution et permet aux artistes de se concentrer sur les aspects créatifs de leur travail. Cependant, quelques répondantes et répondants expriment des difficultés à saisir l’utilisation qui en sera faite pour les projets qui ne requièrent pas un volume important de données à traiter. Un répondant explique :
— null
Plusieurs outils d’automatisation seront développés dans les prochaines années pour faire progresser l’apprentissage automatique en effets visuels et en cinéma d’animation mais pour l’instant, seules les grosses entreprises bénéficient d’équipes de programmeurs qui peuvent se consacrer au développement de l’intelligence artificielle.
La liste ci-dessous répertorie des domaines sur lesquels l’automatisation aura une répercussion. Bien qu’elle ne soit pas exhaustive, cette liste démontre la diversité des possibilités de l’intelligence artificielle dans les effets spéciaux et le cinéma d’animation :
Les chaînes opérationnelles de production (pipelines) en effets visuels et en animation sont complexes car elles regroupent plusieurs logiciels différents dans un processus de travail structuré. Permettre un travail simultané « en référence » au sein d’une chaîne de production constitue un défi majeur. Aujourd’hui, l’offre de logiciels est si abondante que les artistes ont plusieurs outils à leur disposition pour réaliser leur tâche. De plus, plusieurs artistes à la fois peuvent travailler sur le même plan. Le défi ne réside pas dans le choix des logiciels, mais relève plutôt de la capacité et de la compréhension nécessaire à intégrer ces différents outils entre eux.
Initiée par la société Pixar, l’implantation du nouveau format de travail « description de scènes universelles » (Universal Scene Description [USD]) va modifier les pratiques des artistes et promet de résoudre plusieurs problèmes de compatibilité entre les versions des divers logiciels et les formats de données. La description de scènes universelles (USD) est le premier format accessible au public qui répond à la nécessité d’échanger et d’augmenter de manière robuste et éprouvée les scènes 3D qui peuvent être composées de nombreux éléments (Pixar 2021). Ce nouveau type de description de scènes est déjà employé ou en cours d’implantation dans les studios d’effets visuels et de cinéma d’animation et en jeu vidéo. Des expertes et experts consultés affirment que l’intégration de cette nouvelle norme pourra faciliter le travail des artistes et les flux de travail.
Les changements dans le modèle d’affaires des jeux ont été grandement influencés par les jeux mobiles (pour téléphones et tablettes). Désormais, les jeux ne se présentent plus comme un produit mais comme un service en continu de divertissement accessible par des abonnements en ligne sur les plateformes des distributeurs ou éditeurs.
Sous l’influence grandissante des jeux mobiles, les jeux vidéo sont passés du stade de produits à celui de service en continu de divertissement, accessible par des abonnements en ligne sur les plateformes des distributeurs et /ou éditeurs. Ces nouvelles exigences du marché font naître ce nouveau modèle appelé « opérations en continu (LiveOps) »: les conceptrices et concepteurs créent des événements ludiques et de nouveaux chapitres de jeu afin d’assurer la rétention des abonnements et des microtransactions, en plus d’alimenter l’enthousiasme de la communauté de joueuses et joueurs. Popularisée avec la tendance du jeu mobile, notamment les jeux gratuits (free-to-play) cette stratégie de rétention des joueuses et joueurs par l’établissement de communautés s’est étendue aux éditeurs des jeux de console de salon. Ce genre de service en continu demande une implication constante des équipes de design de jeu, de programmation et d’artistes graphiques en perpétuelle activité. Les analystes de la monétisation ont la responsabilité d’assurer la rentabilité du service en continu (Naud, Dupont et Thabet 2020).
Parmi les métiers les plus touchés par l’évolution technologique, on retrouve les métiers de création d’environnements d’éclairage et de créations de personnages, faisant appel aux techniques de modélisation, de matériaux et textures, d’éclairage et d’ombrage, d’armature, de capture de mouvements, d’animation et d’effets visuels[^1]. Ces métiers de l’image sont en étroite corrélation avec l’évolution des métiers de la programmation et du design et l’évolution des logiciels de création graphique.
Bien que les chaînes de production en jeu vidéo diffèrent selon le type de jeu (jeu mobile consulté sur tablette ou téléphone intelligent ou bien jeu de console physique (console de salon, ordinateur et console portable)) et selon le genre de jeu (jeux de combat, puzzles, jeux de rôle, jeux de rôles multijoueurs, jeux de tir et autres), on y retrouve systématiquement des équipes graphiques, techniques, de programmation, de design, de narrativité, d’édition, de soutien et de gestion.
[^1]: Les simulations d’effets organiques, feu, eau, cheveux, vêtements et de foules.
L’évolution technologique a contribué à faire évoluer les métiers graphiques au sein des équipes de jeu et c’est en grande partie dû au développement des logiciels procéduraux (2.3.4.1.), à l’optimisation des rendus physiques réalistes (2.3.4.2.) et aux avancées des techniques de tracé par rayons optiques (ray tracing) (2.3.4.3.).
La programmation procédurale désigne un principe d’automatisation des calculs pour la génération d’images ou de niveaux de jeu. À titre d’exemple, au fur et à mesure que le joueur avance sur le terrain, l’environnement qui l’entoure est automatiquement généré à partir de formules mathématiques, de suites de nombres aléatoires et de règles définies par les développeurs.
Sur les chaînes de production, la génération procédurale permet à terme de produire de plus grandes cartes de jeu (maps) avec de petites équipes. Les créatrices et créateurs peuvent produire des systèmes complexes assez facilement sans l’aide d’importantes équipes de programmation pour des jeux à monde ouvert.
Ces automatisations affectent tous les métiers graphiques. Ainsi, de 50 à 80 % des métiers du numérique auront évolué d’ici les cinq prochaines années. On assistera à l’apparition de nouveaux métiers, mais aussi à l'évolution des métiers actuels à travers le regroupement de plusieurs tâches en une seule. Ces changements sont principalement dus aux avancées des technologies et des logiciels de création (Jacquier, Larouche et Chalifoux 2021).
Selon les répondantes et répondants, les métiers graphiques se démarquent parmi ceux qui sont les plus affectés par les techniques de travail procédurales. À leurs avis, les techniques de travail procédurales offrent de nombreux avantages aux professionnelles et professionnels : rapidité d’exécution, plus grand contrôle sur les environnements graphiques du jeu, intégration plus facile entre logiciels et disciplines et normalisation des éléments grâce aux banques de données.
En revanche, quelques répondantes et répondants ont mentionné les limites des techniques du procédural. En effet, il peut freiner le talent créatif d’un artiste qui aime travailler sur des éléments en utilisant la technique traditionnelle de création d’éléments 3D (pixel art). Cette technique désigne la création d’un produit singulier minutieusement travaillé, pixel par pixel, pour créer un élément original qui relève davantage des pratiques manuelles de création d’éléments 2D et 3D.
Ces dix dernières années, les métiers graphiques ont beaucoup évolué grâce à l’apparition des moteurs de rendu intelligents, en particulier le rendu physique réaliste (physically based rendering), qui simplifie énormément le travail des infographistes sur la façon d’éclairer et de texturer les images.
On constate une exigence de qualité des rendus visuels et une amélioration des savoir-faire en narration, qui nécessairement impacteront la qualité des personnages et la mise en scène des environnements. Les rendus d’images seront plus réalistes, ce qui nécessitera plus de calculs complexes, pour le même temps de rendu. Les métiers artistiques verront certaines de leurs tâches réorganisées afin de répondre aux exigences de qualité graphique mais surtout à la cadence de production. Un répondant du secteur du jeu vidéo anticipe que ces exigences auront un effet sur les compétences des artistes. Il explique :
— null
Parmi les améliorations technologiques, les expertes et experts citent le tracé par rayons optiques (ray tracing) sur voxels (pixels volumétriques) à titre d’avancée technique, notamment avec l’arrivée de nouveaux processeurs graphiques (GPU) qui intègrent des fonctions de calcul de rendus en temps réel.
Plutôt que d’éclairer une scène en y apposant des lumières selon la vision d’un artiste, c’est plutôt les rayons émis par la caméra (donc le joueur) qui définissent la provenance des sources d’illumination, de même que la réflexion, réfraction et son ombre sur les objets qu’il regarde. Les rayons varient dans la scène, d’objet en objet, pour créer devant les yeux du joueur en temps réel des ambiances réalistes. En ce qui a trait aux améliorations attendues grâce à l’apprentissage automatique, le procédural et le tracé de rayons optiques, un expert anticipe plusieurs changements dans les savoir-faire des artistes. Il explique :
— null
L’apport de l’intelligence artificielle dans les jeux vidéo est important et touche plusieurs métiers, particulièrement la jouabilité et la programmation d’algorithmes dans les moteurs de jeu.
Le but de l’IA est d’enregistrer les comportements et les routines pour les reproduire et en faire des systèmes intelligents. Plusieurs répondantes et répondants pensent que les changements majeurs dans les jeux vidéo passeront par l’IA, car elle ouvre des voies totalement nouvelles, notamment pour gérer et organiser la quantité de données nécessaires pour créer un jeu. Le jeu en continu, les avancées du jeu nuagique et de l’automatisation des processus de créations graphiques avec l’arrivée de l’IA inaugurent une augmentation nettement accélérée de la quantité de production d’éléments graphiques à produire.
Certains artistes ont rapporté leurs craintes face à ces nouveaux procédés, disant « on devient des machines à créer du contenu », au détriment de la qualité artistique. L’arrivée des opérations en continu (LiveOps) entraînera une hausse de la demande en contenu et de l’efficacité exigée des artistes. Pour pallier ces craintes, l’automatisation de tâches répétitives et l’apport de logiciels procéduraux peuvent aider à atteindre ces nouveaux objectifs.
Pour certains répondantes et répondants interrogés, l’apprentissage automatique est perçu comme une révolution dans la façon de produire et de penser les jeux, inventer et imaginer des expériences ludiques différentes, plus organiques et individualisées mais collaboratives de nature non linéaires. (Le joueur ne vivra pas la même expérience selon son lieu d’origine, l’heure ou la température du moment.) Un répondant relate ses réflexions sur l’automatisation des métiers graphiques :
— null
L’IA ouvre des voies nouvelles, notamment pour gérer et organiser la quantité de données nécessaires pour créer un jeu. Par exemple, l’IA est capable de générer des éléments (assets) d’animations, les poses, les suivis, les détections des squelettes, les gestes robustes, les anticipations de mouvements, les collisions, les cycles d’animation répétitifs ou prévisibles, etc.
En animation faciale, l’analyse automatique d’une trame audio ou même d’un texte, permet d’animer le visage d’un personnage, de la synchronisation de la bouche et ses rictus. Bien sûr, l’automatisation peut donner un résultat un peu robotisé. Les particularités liées aux différences expressives d’ordre culturel et les ajustements liés aux mimiques et aux émotions représentent un terreau fertile de recherche. Ces ajustements sont alors effectués par les artistes animateurs. Les outils de capture intelligents, la capture de mouvement, le scan d’environnement et la photogrammétrie sont utilisés pour la modélisation d’environnement en trois dimensions. Les scans de personnages sont aussi utilisés afin de représenter tout le corps de l’actrice ou de l’acteur qui sera reproduit en 3D et ajusté pour le jeu. L’IA permettra d’automatiser et d’intégrer les données de scan dans les moteurs de jeu notamment par le nettoyage de ces données (denoising) une fois captées ainsi que d’autres procédés.
Pour certains jeux de rôle (role-playing game ou RPG), un moteur IA peut créer automatiquement les animations de personnages qui répondent aux questions ou actions du joueur. Ces systèmes, qui ne sont pas encore complètement au point, permettent de faciliter le travail des concepteurs et des animateurs et méritent d’être davantage explorés en IA.
Les métiers les plus touchés par l’arrivée de l’intelligence artificielle seront tous les métiers de création de personnages et d’éléments graphiques. Un répondant nous explique que l’IA a permis de transférer un jeu de basse qualité graphique en haute résolution avec peu de ressources :
— null
L’IA propose d’infinies possibilités mais demande du temps et beaucoup de ressources financières pour être intégrée dans les pratiques et les chaînes de production. C’est une réflexion qui s’est imposée lors du Symposium AI/VFX 2021[^2]. Les intervenantes et intervenants ont souligné l’importance de collaborer sur les sujets de pointe en intelligence artificielle afin de joindre les efforts de conception et de développement entre les universités et les entreprises, mais également les entreprises entre elles.
[^2]: Symposium IA|VFX 2021 organisé par le Bureau du cinéma et de la télévision du Québec, avril 2021 : un rapport prévu pour l’automne 2021.
Le jeu nuagique (cloud gaming) est une technologie qui permet de jouer à des jeux vidéo en diffusion en continu (streaming) à travers internet et sur n’importe quel écran (ordinateurs de bureau ou portables, tablettes, téléphones intelligents ou téléviseurs). Le jeu est exécuté à partir d’un serveur qui calcule la géométrie et qui renvoie l’image calculée et rendue au joueur instantanément. Ainsi, plus besoin de consoles de salon ou d’ordinateurs puissants à la maison. Les concepteurs et la fabrication de jeu devra s’adapter aux paramètres techniques et créatifs qu’offre cette nouvelle plateforme. Gérer la différence de qualité entre le jeu en ligne et le jeu de console physique sera le défi des concepteurs.
Pour les directrices, directeurs et artistes techniques, le jeu nuagique est appréhendé comme une console supplémentaire sur laquelle ils devront déployer leur jeu. Si cette plateforme nuagique est performante et massivement acceptée des joueuses et joueurs, cela simplifiera beaucoup le flux de travail d’édition, particulièrement si les différentes consoles physiques disparaissent du marché. A cet effet, les avis sont partagés. Certains prédisent la disparition des consoles physiques, d’autres prévoient que ce type de matériel restera pour des productions de niche de grande qualité graphique.
La grande majorité des répondantes et des répondants voit des avantages au jeu nuagique (cloud gaming), particulièrement dans les possibilités de jouabilité. Il faudra trouver des moyens novateurs pour optimiser les données du jeu afin de ne pas réduire la qualité des animations comme, par exemple, dans les jeux de combat où la latence de la restitution de l’image devra respecter la qualité et la fluidité du mouvement. Gérer la différence de qualité entre le jeu en ligne et le jeu de console physique sera le défi. La gestion des données comprises dans un jeu sera aussi un défi, ainsi que la gestion des coûts de la bande passante pour le joueur.
Les exigences sur la qualité et la quantité des contenus à produire, les environnements, les animations et les effets spéciaux sur les nouveaux types de jeux seront plus élevées. Cela nécessitera une collaboration étroite entre les artistes et les développeuses et développeurs. Un répondant à la direction des technologies explique que les producteurs de jeux devront collaborer avec des propriétaires de plateformes nuagiques afin de parfaire les méthodes de production :
— null
Les limites du jeu nuagique perçues par quelques répondantes et répondants concernent la possible latence pouvant nuire à la qualité de la jouabilité. Certains ont avancé qu’il faudra environ cinq ans pour que la jouabilité atteigne celle que les consoles physiques offrent actuellement. Un répondant nous explique la complexité technique de créer un jeu nuagique :
— null
La 5G est le nouveau réseau mobile qui va changer la manière de consommer les expériences de divertissement, notamment pour les jeux mobiles sur téléphone et tablette.
Cette technologie permettra une meilleure qualité graphique, la possibilité d’intégrer dans les jeux de meilleures animations et des environnements plus complexes en termes de bande passante. La 5G permettra de concevoir des jeux avec plus de joueuses et joueurs en synchronicité, rendant l’offre de jeux multijoueurs plus attrayante.
— GlobalData 2021
Le jeu en ligne en continu amène une nouvelle forme de monétisation en fidélisant une communauté d’amatrices et amateurs, directement et en permanence sur des plateformes de diffusion en continu (streaming), telle que Twitch, la plateforme privilégiée pour la retransmission des événements liés aux jeux vidéo. En effet, les joueuses et les joueurs (streamers) peuvent y présenter un grand nombre de diffusions de leur jeu, offrant la possibilité de diffuser des contenus en direct, de jouer en communauté, de co-créer, d’échanger et de participer à des événements en lien avec leurs univers ludiques.
Ce nouveau type de monétisation a une influence sur la création des chaînes de production : la planification des étapes de développement est désormais tributaire du comportement des joueuses et des joueurs en direct.
Les répondantes et répondants rapportent certaines observations sur ces changements organisationnels : une nécessaire rapidité d’exécution, une uniformité et une normalisation des éléments graphiques sur plusieurs années; plus de réactivité pour s’adapter aux commentaires des joueuses et joueurs; la nécessité d’avoir des outils de production graphique réutilisables et durables; une capacité à innover dans le même écosystème de jeu durant plusieurs années; une planification et une grande efficacité pour assumer une hausse future des demandes de contenu; et enfin la possibilité de revisiter l’approche de la création d’éléments graphiques en continu.
Les opérations en continu (LiveOps) requièrent donc une planification différente, davantage axée sur le long terme et en continu. Comme il n’y a pas de fin au projet, cela peut avoir une incidence sur la motivation et le développement professionnel des artistes. Il est donc nécessaire de penser au renouvellement du personnel via des contrats d’engagement en continu.
Le secteur des expériences numériques immersives est un secteur aux multiples disciplines qui emprunte, dans ses modes de production, à plusieurs autres domaines artistiques, par exemple, la musique, le théâtre, la publicité, le spectacle, le jeu, le cinéma, l’architecture, la scénographie, le tourisme, la santé, la formation et le sport. L’évolution des technologies a eu un grand impact sur les types de produits offerts. Elle permet aujourd’hui de proposer des expériences numériques immersives de grande qualité dans des nouveaux formats.
Les avancées technologiques des dernières années ont permis de développer des projets variés, des expériences immersives innovantes, originales et très appréciées du public. La majorité des répondantes et répondants jugent que l’avancement des technologies est essentiel à l’amélioration des créations d’expériences immersives. Les sections suivantes en présentent les détails.
Les expériences immersives en réalité virtuelle et en réalité étendue se sont développées ces dernières années et les techniques de création des contenus ont su tirer davantage des techniques du jeu vidéo. La particularité de la réalisation en 360 degrés et les possibilités d’interaction ont propulsé ce type d’expérience. Les expériences sont plus immersives car les dispositifs de diffusion (casques) sont de plus en plus performants. La puissance des restitutions d’images et la puissance de calcul des processeurs permettent de créer des contenus qui dépassent le simple prototype. Plusieurs expériences sont créées en réalité augmentée, en réalité virtuelle et en réalité mixte. On parle aussi de virtualité augmentée[^1].
[^1]: La virtualité augmentée fait référence à l’environnement virtuel agrémenté d’éléments réels.
Les avancées technologiques des expériences numériques immersives ont permis le développement des dispositifs de diffusion : environnements de développement, casques de visionnement, puissantes cartes graphiques et appareils holographiques. Elles ont également permis le développement d’outils de projection vidéo plus performants et de formats multiples à moindre coût. Certaines expériences exigent la projection sur grandes surfaces, dépassant de beaucoup les formats de cinéma. Les objets deviennent également des vecteurs de communication : en étant connectés à internet, ils permettent de concevoir des expériences personnalisées, notamment avec l’apport des appareils intelligents que l’on peut porter sur soi (wearables) comme les vêtements intelligents, le bracelet intelligent, les gants de données (data gloves) et autres. Enfin, les téléphones et tablettes numériques sont aussi des dispositifs de plus en plus performants; ils offrent désormais des numériseurs intégrés et des caméras de haute qualité ainsi que des scanners 3D intégrés.
Les logiciels de création d’expériences numériques se sont beaucoup développés et suivent les grandes tendances du jeu vidéo et des effets visuels. Les logiciels génératifs donnent beaucoup de liberté aux artistes qui peuvent créer de manière plus indépendante et autonome. Cela leur permet de réaliser des productions avec de plus petites équipes.
On parle ainsi de :
L’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) dans les expériences numériques immersives permettra des expériences plus engageantes, singulières et personnalisées. La domotique institutionnelle (automatisation des installations interactives in situ, serveurs intelligents, etc.) et celle du divertissement pourront bénéficier de l’intelligence artificielle. En étant très présente dans les systèmes de contrôle des ordinateurs et des serveurs, l’intelligence artificielle fera bientôt partie intégrante de projets culturels, notamment pour de grandes installations dans le milieu muséal et les parcs à thèmes. Elle est aussi en voie d’implantation dans d’autres milieux tels que le marketing, le tourisme, l’aéronautique et la médecine. L’intelligence artificielle permettra surtout de créer de nouvelles fonctionnalités au sein des expériences interactives, particulièrement avec l’évolution rapide des objets connectés de la vie de tous les jours. Par exemple, les visites aux musées du monde entier en virtuel pourront être adaptées aux intérêts, aux handicaps, à la culture, aux habitudes de vie et aux choix narratifs de la personne utilisatrice.
L’apport des technologies infonuagiques dans le secteur va, tout comme dans le jeu vidéo, changer les pratiques de conception, de création, d’installation, de diffusion et même de distribution des expériences immersives.
Les installations publiques parfois voraces sur le plan de la réseautique pourront déporter leur puissance de calcul sur des serveurs distants et seuls les ordinateurs de base seront présents sur place pour accéder aux contenus. En ce sens, la 5G et le calcul sur le nuage vont permettre aux expériences de réalité mixte, réalité augmentée, réalité virtuelle et virtualité augmentée d’être mieux distribuées car les appareils requièrent beaucoup de puissance pour afficher une bonne qualité visuelle sans latence.
Le secteur des expériences numériques immersives fait appel à plusieurs métiers et de nouvelles générations de créatrices et créateurs spécialistes des technologies immersives existent aujourd’hui. Le secteur des expériences numériques immersives englobe des métiers liés à la narrativité, à la réalisation, au design d’expérience, au design d’environnements, aux expertises en captation, aux arts de la scène, à la modélisation 3D, à la texture et à l’éclairage, aux techniques en animations 2D et 3D, aux effets visuels et simulations, à la composition d’images et aux expertises en rendu. Se joignent aussi à cette liste les métiers touchant la postproduction et la programmation, la spatialisation audio 360, l’intelligence artificielle et le design d’interactivité sous plusieurs formes.
Les chaînes de production et de fabrication sont différentes de celles du jeu ou du film à plusieurs égards. D’une part, parce que ces expériences immersives s’inscrivent dans l’espace, dans le mouvement et d’autre part, parce qu’elles ont généralement lieu dans les espaces publics, avec des clientèles variées, hors écran, nécessitant des règles, des déplacements et des situations particulières liées au lieu de diffusion. Ces produits demandent des réflexions de design, par exemple, afin d’en assurer la robustesse; par conséquent, des éléments physiques pourraient être fabriqués afin de faciliter les besoins de déplacement et de manutention liés aux produits. Souvent distribuées à l’international, ces expériences dans les lieux physiques se distinguent quant aux normes fonctionnelles connues dans le domaine du jeu ou du cinéma. À ce titre, ces expériences se rapprochent davantage des arts de la scène.
Les artistes qui travaillent dans ce secteur sont en constante réflexion sur les outils et les types de produits proposés. Les recherches et les expérimentations en expériences immersives sont nombreuses en raison de la mixité des outils et des technologies scénographiques, sonores, architecturales et autres. L’évolution des technologies facilitera le travail des artistes, car les nouvelles technologies réduisent les contraintes techniques et repoussent les frontières du possible en création d’expériences.
Plusieurs groupes de recherche universitaires proposent de nouvelles formes d’art qui alimentent beaucoup l’industrie de la création numérique. Avant de proposer des produits au marché et afin d’en assurer la viabilité économique, l’industrie mise sur l’expérimentation. Par exemple, pour tourner des films de réalité virtuelle en temps réel sur Unreal, les réalisateurs traditionnels doivent revoir leur code cinématographique et leurs méthodes afin de s’ajuster au dispositif. C’est déjà un nouveau métier qui demande de revoir son expertise. Pour les artistes qui travaillent sur ces projets, se sont de nouveaux outils et de nouveaux procédés d’intégration à apprivoiser, spécifiques à ce type d’expérience.
Il en est de même pour le cinéma, les tournages en 360 degrés, le montage en 360 degrés pour des dômes ou même des projections sur des volumes et dans des espaces volumétriques. Le langage cinématographique doit s’adapter aux nouveaux dispositifs d’immersion spatiale. Les manières de raconter les histoires sont différentes, et l’art de la narration évolue.
Apparaissent également des possibilités de traitement de documents et de curations automatisées et collaboratives pour les musées ou les centres de documentation qui leur permettraient d’offrir l’accès à leurs trésors par le biais d’applications d’immersion. À cet égard, diverses institutions muséales se livrent à maintes expériences de conception créative (design thinking) et d’expérimentation.
Pour résumer, le jeune secteur effervescent des expériences numériques immersives apparaît comme un milieu extrêmement créatif et innovant, qui oblige à penser en dehors des cadres établis et connus de diffusion et de distribution. Ce n’est ni du cinéma, ni du jeu vidéo, ni de l’art au sens traditionnel. Voilà pourquoi il se distingue du marché du jeu vidéo et du cinéma ou de la télévision.
Dans le cadre du forum Mutek[^2], des chercheurs présentent tous les ans le résultat de travaux qui alimentent la recherche-création[^3] ainsi que la recherche et le développement dans plusieurs domaines. Ces recherches explorent le lien entre la narrativité et le dispositif : « Utiliser les technologies pour visiter le story living, du story experiencing, voire du story sensing, plutôt que du storytelling » (Morriet 2019).
[^2]: MUTEK est une organisation internationale dédiée à la diffusion et au développement de la création numérique sonore, musicale et visuelle.
[^3]: La recherche-création ne prétend pas à simplement augmenter le répertoire artistique ou le patrimoine culturel, elle se doit de proposer des discours inédits, élaborer des univers différents, suggérer même de nouveaux modèles de pensée par les approches expérimentales, exploratoires ou critiques qu’elle utilise (Acfas s. d.).
Ce que SYNTHÈSE retient des trois secteurs de création numériques étudiés, est que ces derniers ont des processus et des contingences différents mais tous travaillent vers une plus grande immersion graphique, pour la fidélisation des amatrices et amateurs, et visent à favoriser la collaboration au sein de leurs auditoires respectifs. Les innovations technologiques vont toutes dans ce sens.
Par conséquent, il faut se poser la question de l’impact de ces transformations sur les métiers et expertises (2.5.1) sur l’impact de ces transformations sur le développement de nouvelles compétences et de nouvelles formations (2.5.2) et sur les collaborations à développer pour que le Québec demeure un chef de file face à ces enjeux (2.5.3).
Certains experts et expertes voient venir une convergence des expertises graphiques, de la conception d’un personnage à son animation, de la création d’environnements dans un seul jet créatif par une ou un seul artiste.
On passerait ainsi d’un monde d’expertises « en silos » à une transversalité des métiers graphiques qui s’intensifierait notamment avec l’arrivée des logiciels procéduraux, particulièrement en jeu vidéo. Cependant, sans être réducteur sur ces pratiques, les expertises individuelles demeureraient très importantes, voire indispensables, notamment en effets visuels et en animation.
À cela s’ajoutent les changements au sein des chaînes opérationnelles de production qui valorisent de plus en plus l’automatisation des procédés graphiques. Toutefois, l’automatisation et l’intégration de procédés artistiques ne signifient pas que les expertises artistiques sont amenées à disparaître. Les professionnelles et professionnels de la création verront au contraire leur contribution aux projets évoluer et leurs connaissances seront mises à contribution de façon différente. Par exemple, les animateurs travailleront avec les programmeurs afin de définir les données nécessaires à la construction d’un algorithme contenant les spécifications d’ordre artistique et de style qui relèvent de leur discipline.
Dans ce contexte, comment – et quand – ces métiers changeront-ils ? C’est une question complexe qui demande de se pencher sur les différentes expertises en particulier et de repenser les tâches en continu. Un travail colossal mais impératif. Les différentes personnes expertes consultées ont des visions différentes qui tiennent compte de la particularité des métiers, mais tous observent les nouvelles tendances d’automatisation et d’évolution rapide de leurs pratiques.
Que ce soit le rendu d’images, le tracé par rayons optiques (ray tracing), le procédural dans les logiciels mais aussi sur l’ensemble des chaînes de production, l’USD, la gestion et la performance des rendus, la capture de mouvement (denoising et upscaling), la production virtuelle sur les plateaux de tournage, les logiciels et les extensions (plug-ins) novatrices, l’infonuagique, le travail collaboratif, toutes ces initiatives convergent vers une adaptation rapide d’une nouvelle façon de faire en création numérique.
Cette nouvelle perspective de la création numérique change les programmes de formation initiaux et augmente le besoin de formation continue des artistes.
Plusieurs expertes et experts consultés s’entendent sur le fait que les programmes de formation actuellement dispensés s’améliorent mais demeurent incomplets et insuffisants vu la rapidité et la quantité des changements. À ce titre, un répondant en jeu vidéo dit :
— null
Parmi les sujets qui confirment les changements en cours, on peut citer par exemple :
De plus, des questions structurelles se posent pour répondre aux besoins : qui est habilité à donner ces cours ? Avons-nous assez d’expertes et d’experts au Québec afin de favoriser le partage d’expertises et la mise en pratique de formations ciblées de haut niveau ? Plusieurs entreprises du secteur peinent à trouver des expertes et experts enseignants pour mettre à niveau leur équipes. Plusieurs sont forcés d’envoyer des équipes entières se former à l’étranger, et ce à coût élevé. Cette tendance a pour effet de ralentir le nombre de formations et fragilise la rétention des employées et employés.
Dans ce contexte de changements technologiques rapides, la formation continue des artistes devient primordiale, particulièrement en cette période où la main-d'œuvre qualifiée est extrêmement recherchée par les trois secteurs.
Les répondantes et répondants de cette enquête ont soulevé certains changements déjà bien perceptibles sur ces transformations au niveau des postes d’entrée et de juniors, lesquels seront détaillés dans le prochain chapitre.
Certains experts et expertes demeurent perplexes sur les effets qu’auront ces avancées technologiques et ne perçoivent pas bien encore comment elles pourront s’appliquer au quotidien dans leur métier créatif.
Parmi ces avancées technologiques évoquées par les répondantes et répondants, certaines n’ont pour le moment pas d’incidences directes sur les formations initiales. Toutefois, on peut s’attendre à ce que ces avancées changent les couleurs du tableau créatif québécois et nécessitent le développement de formations continues. On en rappelle ici les principales :
Avec l’arrivée de nouveaux casques beaucoup plus performants au niveau de la restitution de l’image, la 5G va contribuer à l’explosion des expériences immersives et de réalité étendue.
Pour les parcs à thèmes et les expériences interactives dans les lieux publics, la 5G va permettre d’évacuer les installations de fils réseaux limitant ou de sans-fil déficient, mais aussi de permettre aux joueurs d’interagir à partir de leur téléphone ou autres objets haptiques connectés plus instantanément.
Selon Paul Fortier, professeur au Département de génie électrique et de génie informatique de l’Université Laval : « On parle d’une augmentation d’un facteur 1 000 par rapport au réseau actuel : 100 fois plus d’appareils connectés avec un débit multiplié par 10. C’est un saut quantique ! » (Corniou 2020).
Les jeux mobiles vont aussi être propulsés, à la fois par cette nouvelle norme en favorisant le jeu collaboratif – plus de joueurs en simultané – et par la meilleure qualité des univers graphiques et immersifs.
Elles contribuent à la fidélisation des joueurs et des consommateurs ainsi qu’aux franchises de jeu en continu. Les artistes appelés à travailler sur ces productions – qui peuvent durer jusqu’à dix ans – devront également se renouveler en continu et entrevoir les adaptations technologiques dans un processus créatif soutenu sur le long cours. Les questions soulevées par les entreprises : comment garder des créateurs motivés et créatifs sur une même franchise toutes ces années ? Comment maintenir ces expertes et experts en phase avec les avancées technologiques ? Comment monétiser adéquatement les franchises en continu et comment former les nouvelles cohortes dans cet esprit de collaboration continu, cette création et cette expérimentation en continu ? La formation continue semble primordiale dans un contexte où les artistes devront à la fois créer des chaînes de production d’éléments graphiques agiles afin de répondre aux désirs des amatrices et amateurs en plus d’élaborer des stratégies de création de contenu et de partage des outils de création. Car aujourd’hui le joueur est aussi un producteur de contenu, via les plateformes collaboratives.
La production de jeux avec les outils nuagiques a déjà changé les pratiques. L’utilisation des outils de collaboration a été accélérée dans le contexte de la pandémie de COVID-19, même dans des secteurs où cela semblait impossible en raison de contraintes de confidentialité et de sécurité. Les entreprises et les artistes ont su s’y adapter rapidement (entre 2 et 4 semaines).
Au-delà des possibilités accrues de collaboration, le jeu à la demande (cloud gaming) propose des consoles de jeu nuagique qui transformeront certaines pratiques sur le plan technique et peut-être artistique. Sur ce sujet les avis diffèrent. L’avenir de ces plateformes reste encore en suspens, et les artistes ne voient pas bien encore comment cela changera leur pratique artistique, mais chose certaine des adaptations sont à prévoir. Certains pensent qu’il n’y aura pas d’incidence sur le travail direct des artistes. D’autres confirment que ce sera entrevu comme une console de jeu supplémentaire, avec des adaptations nécessaires. Certains préconisent une évolution importante dans la façon de créer les jeux. Comment préparerons-nous les nouvelles générations d’artistes pour faire face à ces changements ?
Le rendu d’image demeure un défi, par exemple, la morphogénèse, les avancements dans le rendu physique réaliste (physically based rendering - PBR), le tracé par rayons optiques (ray tracing) et les ambiances et ombrages (shaders).
Les techniques d’éclairage et d’ombrage ont beaucoup évolué ces dernières années au niveau des pratiques et des logiciels, notamment en jeu vidéo. Une meilleure automatisation des procédés pour atteindre des niveaux visuels très réalistes faisant fi des lois de la physique représente un défi pour les artistes.
Les professionnelles et professionnels interrogés dans l’enquête ont souvent mentionné que plus on optimise les engins de rendus pour permettre un calcul rapide des images, plus le niveau graphique augmente sur le plan créatif, si bien que, finalement, les temps de rendu restent les mêmes. Un répondant l’explique :
— null
Les techniques de rendu, les temps de calcul et la qualité des images resteront des défis pour les studios. Les nouveaux logiciels de rendu deviennent des bolides de Formule 1 que les nouveaux artistes devront maitriser parfaitement comme outils, mais ils devront également repousser les limites qui sont imposées par ces technologies.
La production virtuelle connaît un grand essor depuis le début de 2020, notamment en raison des contraintes imposées par la pandémie (limitation des voyages et des regroupements physiques). Comment ce genre de tournage changera les métiers d’artistes de postproduction ? Cette nouvelle technique de captation va-t-elle transformer et accélérer les processus de postproduction ou va-t-elle mener plutôt à une autre façon de faire à laquelle plusieurs corps de métiers devront s’adapter ?
Pour l’instant, les artistes de postproduction voient leur apport davantage valorisé car ils participent plus tôt au processus de création, par la prévisualisation et le travail avec les équipes de production (tournage). Les compétences artistiques des artistes de postproduction seront mises à contribution plus tôt dans le processus mais aussi plus librement. Les compétences des artistes de postproduction, notamment des effets visuels, devront dépasser la simple exécution d’une commande pour un plan ou une séquence. La synergie entre la préproduction et les chaînes de production des effets visuels changera les procédés traditionnels de création cinématographique. La formation sera nécessaire pour les professionnelles et professionnels qui manipulent ces nouveaux outils, comme le moteur de rendu en temps réel, l’installation des écrans, les ajustements de caméra en lien avec le moteur de rendu, etc. Les techniciens d’éclairage de plateaux, les réalisateurs et les superviseurs de plateaux et d’effets visuels ainsi que les artistes de postproduction devront être formés rapidement pour répondre à ces nouveaux besoins artistiques et techniques.
Certains experts et expertes en composition d’image rapportent que, vu l’itération et les changements fréquents, cette façon de tourner reste moins flexible que les fonds verts en cas de changements. Aussi, certains compositeurs ont rapporté que les changements à faire sur ces plans sont fréquemment demandés et exigent des manipulations particulières auxquelles ils doivent s'adapter. Évidemment ces nouveaux procédés de création requerront des ajustements et de la formation visant tout particulièrement ce genre d’intégration en composition d’image.
Pour certains, la production virtuelle est une technique qui s’ajoute aux anciennes. Pour d’autres, c’est une révolution à venir. C’est une nouvelle expertise que les studios de services de postproduction peuvent désormais offrir, poussant les technologies de prérendu à s’adapter aux pratiques de temps réel. Des répondantes et répondants nous ont indiqué que ces avancées technologiques changent la façon de budgéter et de traiter les plans. Un expert explique :
— null
L’USD, outil d’accès libre (open source), prend aujourd’hui la place des logiciels propriétaires. Un logiciel comme Alambic permet de créer une passerelle pour le transfert d’un logiciel à l’autre de manière interdisciplinaire. Il va changer la façon de travailler des artistes et grandement simplifier l’ensemble de la chaîne de production des trois secteurs. La majorité des studios consultés sont en cours d’adaptation à cette nouvelle norme. Houdini intègre le format USD, Clariss, Maya 2022, Unreal ainsi que d’autres logiciels.
Ce nouveau mode de perméabilité changera les façons de travailler des artistes et simplifiera énormément les flux de production. Par exemple, cela permettra de créer dans un logiciel X et rendre les images dans un logiciel Y. Les compositeurs pourront à partir du logiciel de composition d’image NUKE ouvrir des scènes 3D pour fins de corrections et d’ajustements. Les entreprises des trois secteurs implantent déjà l’USD dans leurs chaînes de production. L’implantation d’USD en jeu vidéo comme en effets visuels exige déjà des formations pointues et l’adaptation rapide des travailleurs ainsi que de la formation continue dans tous les métiers graphiques.
Dans les productions immersives, bien que nous parlions beaucoup des expériences de réalité étendue, les parcs à thèmes, les projections multi-formats et les scans 3D multi-formats sont des nouvelles approches qui solliciteront le travail des artistes et des créateurs en immersion. Certains citent le déploiement des nouveaux écrans à pixels comme des avancées qui vont changer leur façon de concevoir et de produire mais aussi les avancées dans les projections holographiques hors du cadre. Les différents composants haptiques (les technologies qui permettent de jouer sur les sensations physiques et mécaniques des joueurs, vibrations, picotement de peau, chaleur, etc.) génèrent des nouvelles formes d’affordance[^1] et les artistes graphiques auront à conjuguer avec ces outils innovants. Les recherches en expériences numériques avancent rapidement et les programmes de formation ainsi que la relève se font rares. Parce que ce secteur est nouveau et qu’il promet des innovations technologiques évidentes, la formation d’artistes spécifiques à ces nouveaux métiers créatifs est criante et urgente.
[^1]: L’affordance, ou potentialité, est la caractéristique d’un objet ou d’un environnement qui suggère à son utilisateur son mode d’usage ou autre pratique. Le terme, emprunté à l’anglais, provient de la psychologie et est utilisé en ergonomie par glissement de sens (Wikipédia 2020).
Les grands défis techniques d’aujourd’hui ne consistent pas tant à faire de la programmation informatique à grande échelle ou à inventer de nouveaux logiciels mais plutôt à intégrer une abondance de nouvelles technologies, telles que les applications et les versions de logiciels, les composantes de réseautique (notamment les outils des fournisseurs de services nuagiques, par exemple, AWS et Google), en une chaîne de production fonctionnelle permettant de créer un produit parfait.
L’évolution de l’apprentissage automatique et de l’intelligence artificielle dépendent des expertises graphiques des différents secteurs pour monter des ensembles de données (data sets) et entraîner et corriger les algorithmes à appliquer à chaque discipline. Les programmeurs devront se rapprocher des artistes et les artistes des programmeurs. À terme, ce sont ces deux disciplines qui doivent se transformer et converger vers la création d’une intelligence commune artificielle, en divertissement.
Les chercheuses et chercheurs universitaires conçoivent la théorie derrière les algorithmes mathématiques, mais c’est le travail des programmeurs et des artistes en production de les intégrer, d’ajuster ces théories à la réalité pratique et aux impératifs esthétiques afin de livrer un jeu ou un film qui réponde aux lois du marché. Cette intégration comme toute recherche scientifique doit être réalisable et reproductible. Voilà le grand défi de l’apprentissage automatique de nos jours : l’intégration. L’intégration et l’opérationnalisation des nouvelles automatisations sont des enjeux majeurs.
Un répondant responsable de l’intégration des technologies en jeu vidéo explique :
— null
Le Québec se doit être un joueur important dans ces avancées, les institutions de formation et les entreprises – en tandem – doivent s’y préparer dès aujourd’hui. Le Québec a toujours été un leader en matière d’innovations technologiques en imagerie 2D et 3D, on pense à Kaydara, Softimage et Houdini. Comment maintenir cette renommée aujourd’hui sans tenir compte des nouveaux agents de changements ? La formation continue et l’expérimentation en apprentissage automatique valorisant les métiers graphiques doivent faire l’objet d’analyses poussées et jouir du financement nécessaire afin de répondre aux exigences des prochaines années dans les secteurs du divertissement.
Plusieurs éléments viennent freiner le développement de l’intelligence artificielle.
Tout d’abord, même si l’IA est bien développée au Québec, il y a peu ou pas d’expertise dans le domaine du divertissement; les entreprises et universités manquent cruellement de financement pour faire des avancées dans ce secteur.
Ensuite, les échéanciers serrés auxquels sont confrontées les équipes de production ne leur permettent pas de réfléchir et créer de nouvelles avenues de production – à l’exception peut-être de quelques grandes entreprises qui en ont les moyens.
Enfin, les expertises de production sont segmentées en départements, en silos : l’expérience, la narration, le design, le graphisme, la programmation, la commercialisation, la gestion. Cette segmentation bien qu’utile pour développer la vitesse et la qualité des produits ne favorise pas la mixité des pratiques et les échanges favorables à l'automatisation des flots de production.
Mais l’un des freins majeurs demeure que la recherche en milieu collégial et universitaire et la pratique en entreprise n’ont pas encore assez de passerelles de prototypage structurantes au Québec pour collaborer pleinement au partage des connaissances dans ces secteurs.
Mis à part quelques organisations connues telles qu’Ubisoft et La Forge, ou le Studio de Eidos et l’Université de Sherbrooke, par exemple, la collaboration entre chercheuses, chercheurs, praticiennes et praticiens n’est pas assez valorisée. La majorité des expertes et experts en pratique nous ont avoué ne pas connaître les travaux de recherche académique dans leur champ d’expertise. Plusieurs recommandations vont dans ce sens dans le rapport du Bureau du cinéma et de la télévision (BCTQ) sur l’intelligence artificielle dans les effets spéciaux et l’animation. Les technologies et la façon de penser le divertissement changent, les techniques liées à leur réalisation aussi.
Le leadership et l’expertise du Québec, surtout dans le secteur de la 2D et 3D, sont reconnus depuis plus de 25 ans dans le monde entier.
N’oublions pas que le premier film d’animation 3D conçu par ordinateur Tony de Peltrie (Lachapelle et al. 1985) a vu le jour dans un laboratoire de Polytechnique de l’Université de Montréal. Cette innovation des années 1980 a suscité un développement florissant d’industries innovantes telles que Softimage, Kaydara, SideFX, Autodesk Alias et autres.
Aujourd’hui, fort de son passé, le Québec est toujours à la fine pointe des développements technologiques en effets visuels, en animation et en jeu vidéo. La transformation de la chaîne de valeur de la dernière décennie et l’adaptation aux évolutions technologiques ont fait croître l’expertise québécoise en matière de création numérique.
Le Québec doit dès à présent préparer les expertes et les experts qui dirigeront les nouvelles avenues créatives. Les efforts de formation initiale et de formation continue doivent s’intensifier et tenir pour garantie l’avenir des entreprises du secteur. Si le Québec veut garder son blason de chef de file, il faut sans attendre enrichir les programmes de formation, les multiplier, former des professeures et professeurs de second et troisième cycle qui sauront concilier, avec l’aide des entreprises, les recherches innovantes vers un savoir pratique et académique.
Cette section propose un bref tour d’horizon des postes d’entrée et de juniors des métiers graphiques 2D et 3D au sein des trois secteurs à l’étude.
Au cours des entretiens, les enseignantes et enseignants consultés ont manifesté le besoin de mieux connaître les exigences liées aux postes d’entrée et de juniors accessibles aux diplômées et diplômés de leurs programmes. Ce chapitre propose une première réponse à cet enjeu. Pour ce faire, un petit échantillon d’entreprises couvrant les trois secteurs a été consulté.
Les postes d’entrée et de juniors sont répertoriés (3.1.). Les exigences d’embauche sont abordées (3.2.) ainsi que les compétences artistiques, techniques et comportementales que doivent détenir les personnes qui postulent à ces postes (3.3. et 3.4.).
Les résultats présentés dans ce chapitre sont issus d’une seconde collecte de données réalisée à la suite des entretiens menés avec les professionnelles et professionnels de l’industrie et des enseignantes et enseignants des programmes de formation ciblés par cette enquête. SYNTHÈSE a consulté des représentantes et représentants en ressources humaines d’entreprises en effets visuels et en animation, en jeu vidéo et en expériences numériques immersives. Ces entreprises sont de taille variable (entre 40 et 4000 employés). Cette collecte de données a été effectuée par le biais d’un questionnaire en ligne qui a été soumis à treize entreprises – six d’entre elles ont participé à cette initiative. Cette collecte de données a été réalisée pendant les mois d’août et de septembre 2021.
Ce chapitre présente les résultats d’une première tentative de cueillette d’information à partir d’un échantillonnage restreint qui n’est pas représentatif de l’ensemble des entreprises consultées lors de l’enquête. Des postes et des exigences d’embauche pourraient ne pas être inclus. La vigie en continu menée par SYNTHÈSE bonifiera les résultats présentés dans ce chapitre.
Les postes qui ont été ciblés par les six entreprises répondantes comme étant des postes de niveaux d’entrée et junior en infographie 2D et 3D sont présentés dans le tableau suivant selon les différents secteurs.
Les entreprises ont ciblé les éléments les plus importants lors de l’analyse du dossier pour l’embauche d’un ou d’une artiste junior[^1]. L’élément le plus important lors de la prise de décision pour embaucher un artiste junior est le portfolio. Aussi, les compétences comportementales se situent en deuxième position lors de la sélection d’un ou d’une candidate. Les diplômes en lien avec l’expertise se situent en avant-dernière position et la qualité des institutions d’enseignement en toute dernière position. Voici les critères par ordre d’importance soulignés par les entreprises.
1. Le portfolio: la qualité technique du travail.
2. Le portfolio: la qualité graphique du travail.
3. Les compétences interpersonnelles et comportementales comme : la capacité à s’exprimer clairement en groupe, la capacité d’expliquer ses démarches de création et ses objectifs de réalisation, une curiosité développée, une culture générale en lien avec le secteur, une motivation intrinsèque, la collaboration et le respect des échéanciers.
4. Les connaissances logicielles préalables à l’embauche.
5. Le Curriculum Vitae : les expériences de travail en entreprise similaires ou connexes – travail à la pige ou avec clientèle variée, autres activités connexes au métier.
6. Les diplômes dans le domaine (AEC, DEC, BAC, Maîtrise ou diplômes de l’étranger).
7. La qualité des institutions d’enseignement (écoles) qui ont assuré la formation initiale.
[^1]: Ces résultats sont présentés par ordre décroissant d’importance.
Les entreprises ont mentionné les diplômes qu’elles privilégient lors de l’embauche de juniors :
1. Diplôme d’études collégiales (DEC)
2. Diplôme d’études collégiales (DEC) spécialisé
3. Attestation d’études collégiales (AEC)
Certaines entreprises mentionnent que les diplômes n’ont pas d’importance dans le choix des postulantes et postulants. Les entreprises consultées embauchent généralement des juniors provenant des écoles québécoises et canadiennes.
La liste suivante fait état des écoles ciblées par les entreprises qui ont été consultées[^2]. Parmi cette liste, certaines de ces écoles octroient des diplômes de premier cycle et de deuxième cycle tels que l’École NAD de l’Université du Québec à Chicoutimi et l’Université de BREDA (Pays-Bas). Certaines des écoles citées sont publiques et d’autres sont privées avec une reconnaissance du ministère de l’Enseignement supérieur.
Parmi les maisons d’enseignement ciblées par les entreprises dans le cadre de cette étude, cinq ont été citées par les entreprises et sept autres – privées ou hors Québec – ont été citées.
Institutions d’enseignement publiques citées :
Autres maisons d’enseignement privées et hors Québec citées :
D’autres écoles et universités au Québec proposent des programmes couvrant les trois secteurs. Elles n’ont pas été mentionnées lors de cette collecte de données[^3].
Autres institutions d’enseignement publiques non citées disponibles au Québec proposant des programmes de formation pour les trois secteurs :
[^2]: La liste n’est pas présentée par ordre d'importance. Elle représente les écoles qui ont été citées.
[^3]: Voir le chapitre 5 : Enjeux d’adéquation formation-emploi : besoins en main-d’œuvre, en compétences et en formation initiale, qui résume l’ensemble des programmes de formation au Québec.
Les entreprises en général ne demandent pas d’examens d’admission pour un poste d’entrée ou de junior. Certaines entreprises ont dit demander des examens préalables à l’embauche mais ceux-ci sont variables en fonction du poste à pourvoir. Par contre, il est mentionné que lors des entrevues, des questions techniques sont posées en lien avec le portfolio (demo reel). Un représentant des ressources humaines d’une entreprise en effets visuels explique :
— null
D’autres, en jeu vidéo par exemple, imposent des examens. Comme l’indique une répondante :
— null
Les principales compétences de savoir-faire (techniques et artistiques) pour certains postes d’infographistes 2D-3D de niveau junior ont été ciblées par les entreprises répondantes. Voici la liste des postes et les compétences qui y sont associés[^1]. Bien que non exhaustive, cette liste témoigne de profils d’expertises bien réels.
ANIMATEUR OU ANIMATRICE JUNIOR
ARTISTE JUNIOR EN COMPOSITING
ARTISTE de CONCEPTS, MATTE PAINTER JUNIOR et ILLUSTRATEUR
ARTISTE JUNIOR – ÉCLAIRAGE-OMBRAGE JUNIOR - (lighting & shading)
ARTISTE JUNIOR – EFFETS VISUELS
ARTISTE GÉNÉRALISTE JUNIOR
ARTISTE TECHNIQUE JUNIOR
MODELEUR OU MODELEUSE JUNIOR
[^1]: La liste n’est pas présentée par ordre d'importance. Elle représente les compétences qui ont été citées.
De manière générale, les entreprises consultées ont ciblé les compétences comportementales (soft skills) comme étant les plus importantes pour un poste de junior[^1].
1. Capacité à travailler en collaboration soutenue
2. Adaptabilité au contexte de travail
3. Capacité à effectuer les tâches qui lui sont confiées dans les délais requis
4. Curiosité sur les aspects entourant son métier
5. Capacité à résoudre un problème simple
6. Capacité à analyser ses techniques de travail pour les améliorer
7. Capacité à formuler un problème
8. Capacité à partager ses connaissances
[^1]: Ces résultats sont présentés par ordre décroissant d’importance.
Les entreprises consultées ont confirmé que lors de l’embauche d’un ou d’une artiste de niveau junior, une ou un artiste aguerri doit encadrer de manière formelle[^2] la recrue, afin de l’intégrer aux méthodes de travail de l’entreprise, que ce soit en effets visuels et en animation, en jeu vidéo ou expériences numériques immersives. Cette intégration est effectuée soit par parrainage, soit par le biais de programmes de formation initiale. En parlant d’effets visuels et d’animation, une responsable des ressources humaines d’entreprise précise :
[^2]: On entend par formel une personne attitrée officiellement au sein de l’équipe pour des questions de savoir-faire technique, artistique, et autres, en plus du responsable RH.
— null
En jeu vidéo, on cite :
— null
Ce quatrième chapitre identifie les changements technologiques qui ont un impact sur les métiers graphiques 2D et 3D de niveaux d’entrée et junior ou qui auront un impact sur ces derniers dans les prochaines années. Ces changements sont mis en relation avec les compétences que les artistes d’aujourd’hui et de demain doivent développer, et ce afin de contribuer à la réflexion sur l’adaptation des programmes de formation collégiale et universitaire menant vers des professions en création numérique.
Les changements technologiques qui affectent les métiers graphiques de niveaux d’entrée et junior des trois secteurs de la création numérique sont d’abord abordés (4.1.). Les transformations particulières au sein du secteur des effets visuels et de l’animation (4.2.), du jeu vidéo (4.3.) et des expériences numériques immersives (4.4.) font ensuite l’objet de sections distinctes.
Pour rappel, les réflexions qui sont présentées dans ce chapitre sont issues de la triangulation entre trois sources de données : des sondages et entretiens réalisés auprès de professionnelles et professionnels de l'industrie de la création numérique, des entretiens avec des enseignantes et enseignants de programmes collégiaux et universitaires, ainsi qu’une revue documentaire.
Cette section présente les changements technologiques qui affectent à la fois les effets visuels et/ou l’animation, le jeu vidéo et les expériences numériques immersives.
Certaines innovations ont des impacts qui sont ressentis de façon semblable dans l’ensemble de l’écosystème de la création numérique, autant du côté des professionnelles et professionnels que de celui des enseignantes et enseignants de cégep et de premier cycle universitaire. À titre d’exemple, plusieurs répondantes et répondants identifient l’accélération de la vitesse de travail et l’efficacité accrue comme des objectifs des changements technologiques, qu’il s’agisse de l’automatisation (voir Lockyer 2021; Foundry 2020; Cutean et al. 2019, 14; Pennington 2019), de l’infonuagique et des réseaux 5G (voir Bell et Marchand 2021; Gwertzman 2020) ou encore des moteurs de jeux permettant de rendre les images en temps réel (voir KPMG 2017, 14).
Deux catégories d’innovations sont traitées plus en profondeur dans cette section : l’intelligence artificielle (4.1.1.) et l’usage grandissant de captures et d’objets préexistants dans la création artistique (4.1.2.). Certaines conséquences de ces changements touchent les trois secteurs à l’étude. Leurs effets sur les métiers graphiques 2D et 3D varient toutefois en fonction des tâches et des processus de production propres à chaque secteur.
Plusieurs professionnelles et professionnels des trois secteurs, ainsi que certains membres du corps enseignant, anticipent que l’intelligence artificielle aura un impact significatif sur l’exercice des métiers graphiques de la création numérique dans les années à venir.
Dans le cadre de cette enquête, le terme « intelligence artificielle » englobe plusieurs procédés informatiques et logiciels qui soutiennent les artistes dans la réalisation de certaines tâches en comblant des manques d’informations à partir de masses de données. Les participantes et participants à l’enquête identifient notamment l’apprentissage automatique – où des algorithmes apprennent à générer du nouveau contenu à partir d’une grande quantité d’images semblables (voir Mathys et al. 2019, 9; McLaughlin et Quan 2019, 5) – et les réseaux neuronaux artificiels de l’apprentissage profond (voir McLaughlin et Quan 2019, 5) comme étant des techniques pouvant améliorer les processus de travail. Certaines de ces transformations touchent l’ensemble des secteurs (4.1.1.1.), mais leurs impacts sont ressentis différemment en fonction des particularités des tâches à effectuer en effets visuels et animation (4.1.1.2.), en jeu vidéo (4.1.1.3.) ou dans les expériences numériques immersives (4.1.1.4.).
Selon la majorité des professionnelles et professionnels des trois secteurs, la contribution principale de l’intelligence artificielle à l’exercice des métiers graphiques se situe dans l’automatisation de tâches manuelles et répétitives (voir les sections 4.1.1.2. à 4.1.1.4. pour plus de détails sur les fonctions automatisées dans chacun des secteurs). Certains professionnels et professeurs disent que cette automatisation passera principalement par des extensions (plug-ins) intégrées directement dans les logiciels procéduraux de plus en plus utilisés en jeu vidéo et en effets visuels (voir la section 4.3.1.).
Quelques intervenantes et intervenants au sein de l’industrie et quelques enseignantes et enseignants associent l’automatisation par l’intelligence artificielle avec une accélération du rythme de travail. Il s’agit d’une promesse qu’on retrouve également dans la documentation consultée. Par exemple, des outils assurant la conversion ascendante (upscaling) ou la réduction de bruit dans l’image (denoising) (Foundry 2020; Pennington 2019) ou encore la génération automatique de certains procédés artistiques particulièrement chronophages (Lockyer 2021) devraient permettre aux artistes d’effectuer un travail de qualité plus rapidement.
Certains experts et expertes des trois secteurs expriment toutefois un avis contraire: puisque les artistes doivent prendre le temps de nettoyer l’information créée par l’intelligence artificielle afin d’en assurer la qualité artistique et technique, on ne perçoit pas d’accélération notable de leur travail pour l’instant.
Enfin, bien que l’intelligence artificielle soit identifiée comme un changement technologique important pour les trois secteurs de la création numérique, un certain nombre de professionnelles et professionnels affirment que ses impacts sur les métiers graphiques ne se feront pas sentir d’ici les cinq prochaines années ou qu’il est simplement trop tôt pour le savoir, un avis partagé par plusieurs enseignantes et enseignants de cégep et de premier cycle universitaire.
Selon les dires des professionnelles et professionnels et des enseignantes et enseignants interrogés dans le cadre de cette enquête, la rotoscopie, le suivi de mouvement (tracking) et la création d’armatures (rigging) sont les fonctions les plus susceptibles d’être automatisées par l’intelligence artificielle dans le secteur des effets visuels et de l’animation (à ce sujet, voir Foundry 2020; Prabu 2020; Anderson 2019; Pennington 2019). Quelques répondants ont aussi mentionné la simulation de foule (crowd), la simulation de vêtements (cloth), la suppression du fond vert (keying), la modélisation, la création de textures, l’ancrage cinématographique (matchmove), l’éclairage et le rendu comme des domaines pouvant être transformés par ces technologies.
Certains professionnels du secteur pensent que l’intelligence artificielle pourrait éventuellement simplifier certaines tâches liées à la composition d’image (compositing), notamment en automatisant la création de masques ou en détectant des bordures avec plus de précision. D’autres considèrent toutefois que le niveau de qualité et d’originalité exigé pour le travail de composition nécessite un apport créatif trop important pour être complètement automatisé.
Quelques experts ont aussi précisé que l’automatisation est appropriée pour des routines relativement simples, mais que certaines tâches plus complexes nécessitent un savoir-faire et une expérience ne pouvant être reproduits par l’intelligence artificielle. En suivi de mouvement (tracking), par exemple, la machine n’est pas encore capable de détecter des mouvements superflus qui ne doivent pas être pris en compte, comme l’ondulation d’un fond vert (green screen). Un professionnel du secteur s’est aussi prononcé sur les résultats obtenus avec des plateformes permettant de générer automatiquement des animations 3D :
— null
Certains experts et expertes du secteur sont d’avis que les artistes doivent développer des compétences techniques pour travailler avec l’intelligence artificielle, ce qui complexifie leur travail. La documentation suggère d’ailleurs que le défi technique important que présente la transition vers ces outils est un facteur qui ralentit considérablement leur intégration dans les processus de production des entreprises du secteur : les artistes doivent bien comprendre comment fonctionnent les outils afin de pouvoir prévoir, contrôler et ajuster les résultats de leur création (Anderson 2019).
Le temps nécessaire pour entraîner l’algorithme est un autre facteur qui freine l’adoption de ces technologies, selon les interlocutrices et interlocuteurs du panel d’ouverture du Symposium VFX-IA organisé par le BCTQ en avril dernier (Roble et al. 2021. Pour plus de détails sur le processus d’entraînement des algorithmes, voir Bureau du cinéma et de la télévision du Québec, à paraître, 20). Certains professionnels et professionnelles interrogés dans le cadre de cette enquête disent d’ailleurs que les délais de production, souvent très courts, empêchent les entreprises d’ici de prendre le temps de développer ou d’utiliser ces nouveaux outils. On pense toutefois que lorsque cette transition aura lieu, elle touchera d’abord les développeuses et développeurs et les artistes séniors, avant d’affecter le travail des artistes juniors.
Dans le secteur du jeu vidéo, on rapporte notamment que l’intelligence artificielle permet une certaine accélération du processus de création à travers la génération de contenu qui peut ensuite être retravaillé par les artistes. On craint toutefois que cette automatisation artistique, bien qu’elle permette de créer une plus grande quantité d'éléments de jeu, contribue à réduire l’importance accordée à la qualité du produit final. Comme l’a souligné un ingénieur chargé de développer des outils d’apprentissage automatique pour Gearbox Software lors de la Semaine numériQC (9 au 16 avril 2021), une trop grande automatisation dans la création de contenu artistique limite le développement stylistique des images, en plus de dévaluer le travail des artistes. Les outils de l’intelligence artificielle devraient donc servir à accélérer les processus, et non à les automatiser complètement (Lockyer 2021).
Certains participants et participantes soulignent également la contribution de l’intelligence artificielle dans les tâches d’animation de personnages. La sélection par recherche de mouvement (motion matching), par exemple, permet d’amalgamer plusieurs extraits d’animation obtenus par capture de mouvement afin de répondre à des exigences précises de mouvement et de posture dans le jeu, réduisant ainsi le besoin pour des tâches manuelles liées à la synchronisation et à la transition entre les différents états du personnage (voir Ubisoft La Forge 2020). Un expert en animation interrogé pour cette enquête discute de son expérience avec cette technique et envisage ses impacts éventuels sur les métiers d’animatrices et animateurs :
— null
À l’instar des professionnelles et professionnels du secteur des effets visuels et de l’animation, certains experts en expériences numériques immersives envisagent une disparition potentielle de certains métiers plus techniques au profit de l’intelligence artificielle, notamment, la rotoscopie, la modélisation, le surfaçage de textures (texturing), le suivi de mouvement (tracking) et la composition (compositing). Si certains enseignants et enseignantes partagent cet avis, d’autres font preuve de plus de nuance dans leurs propos et affirment que peu importe le secteur, les métiers vont forcément changer, mais ne disparaîtront pas pour autant.
Malgré cette anticipation, un bon nombre de répondantes et répondants disent qu’il est encore trop tôt pour compter sur les outils liés à l’intelligence artificielle dans leur domaine. Certains ne comprennent pas encore tout à fait de quelle manière ces outils peuvent contribuer aux processus de création :
— null
D’autres répondantes et répondants disent que les outils ne sont pas encore suffisamment accessibles, ou qu’ils ne sont pas adaptés à leurs besoins. De manière générale, les données de l’enquête font écho aux résultats du Portrait de l'industrie et retombées économiques des secteurs, publié récemment par Xn Québec. On y rapporte que seulement une minorité des entreprises en création numérique utilisent les technologies de l’intelligence artificielle (Xn Québec et Habo 2021, 23).
Comme l’ont souligné les intervenantes et intervenants de la conférence d’ouverture du Symposium VFX/IA, travailler avec des outils d’intelligence artificielle comme l’apprentissage automatique exige que les artistes développent de nouvelles compétences : au lieu de construire et de modeler des objets, ils doivent être en mesure d’avoir une bonne vue d’ensemble des données à leur disposition et de la manière de les exploiter afin de réaliser leurs tâches créatives et apporter des changements dans les résultats (Roble et al. 2021)[^1]. Chez les enseignantes et enseignants interrogés pour cette enquête, on juge d'ailleurs que la création avec l’intelligence artificielle relève davantage de la direction artistique que de la production manuelle, parce que les artistes sont appelés à faire des choix parmi certaines possibilités offertes par la machine.
Malgré ce changement dans la nature du travail, plusieurs professionnelles et professionnels des trois secteurs insistent sur l’importance des compétences artistiques. On s’attend à ce que l’intelligence artificielle améliore les processus créatifs en prenant en charge certaines tâches répétitives, mais la plus grande part du travail de création nécessite une intervention et une sensibilité humaine, et repose sur un œil artistique bien aiguisé. Comme le souligne un expert du secteur des effets visuels : « c'est sûr que ça va toujours rester, la performance artistique; [on ne] fait pas un Pixar avec de l'intelligence artificielle » (voir aussi Foundry 2020; Mathys et al. 2019, 9; Pennington 2019).
Comme mentionné plus haut, l’intégration de l’intelligence artificielle dans les processus de production présente un défi technique, et certains experts interrogés pour cette enquête pensent que les artistes devraient posséder une compréhension de base du fonctionnement de ces technologies. Comme l’explique un expert du secteur des expériences numériques immersives, les artistes ont un rôle à jouer dans le choix et le développement des outils utilisés :
[^1]: Les résultats des consultations menées par le BCTQ à la suite du symposium laissent toutefois planer une certaine incertitude sur les compétences que les artistes doivent développer face à l’intelligence artificielle : « Lors des consultations, les studios développant déjà leurs propres solutions d’IA à l’interne ont indiqué qu’il n’était pour le moment pas possible de déterminer exactement de quelle manière le quotidien des artistes pourrait être impacté à long terme et quelles compétences précises devraient leur être enseignées pour permettre leur adaptation. Cependant, tous se sont accordés sur le fait qu’ils anticipent une évolution des outils et donc une adaptation des pratiques des artistes, plutôt qu’une révolution complète du pipeline et de ses processus » (Bureau du cinéma et de la télévision du Québec, à paraître, 38).
— null
Dans ce contexte, la capacité d’échanger avec d’autres métiers est aussi importante que les compétences artistiques et techniques.
Quelques participantes et participants à l’enquête soulignent une utilisation de plus en plus importante de captures et d’éléments préexistants dans la création numérique. Autant chez les enseignantes et enseignants que chez les intervenantes et intervenants de l’industrie, la photogrammétrie (4.1.2.1.), la numérisation (scans) (4.1.2.2.), les banques d’objets (4.1.2.3.) et la capture de mouvement (4.1.2.4.) sont associés à une certaine baisse de l’aspect artisanal du travail des artistes au profit d’une utilisation plus technique des outils.
La photogrammétrie permet de reconstruire un modèle en trois dimensions d’un objet ou environnement réel à partir de photographies prises de différents points de vue (voir Audureau 2019; Valente 2018). Cette technique a par exemple été utilisée pour construire plusieurs villes du monde pour le jeu Flight Simulator 2020 de Microsoft (voir Gwertzman 2020).
Dans le secteur du jeu vidéo, on souligne notamment que le temps requis pour la capture et le traitement des photographies allonge le processus de création, et que les artistes doivent travailler avec des textures de plus grande dimension afin de parvenir à un résultat satisfaisant.
En effets visuels, on note que la photogrammétrie rend le travail moins artistique et plus technique, puisqu’on tente de reproduire des éléments au lieu d’imaginer un produit original.
Des répondantes et répondants des secteurs du jeu vidéo et des expériences numériques immersives observent un changement dans les métiers de la modélisation: on numérise de plus en plus les objets au lieu de les modéliser.
Dans le domaine de l’expérientiel, l’utilisation des numériseurs (scanners), en combinaison avec des moteurs de jeux, permet notamment de créer des expériences de réalité mixte (voir Marchand et al. 2021. Voir la section 4.4.1. pour plus de détails sur la réalité mixte). Nos répondantes et répondants notent d’ailleurs une accessibilité grandissante des technologies de numérisation dans le secteur, grâce notamment à leur intégration dans les téléphones intelligents. On rappelle toutefois que les compétences artistiques demeurent importantes. En effet, les artistes doivent disposer d’un œil artistique développé afin de bien assembler les objets numérisés et les objets modélisés dans une image.
Afin de réaliser leurs créations, les artistes comptent de plus en plus sur des modèles 3D, images et vidéos disponibles dans les banques d’objets en ligne ou à même les moteurs de jeux comme Unreal. D’abord utilisés dans le secteur du jeu vidéo, ces objets préexistants sont maintenant plus facilement accessibles pour la création de décors de cinéma ou de télévision (voir Ashton et al. 2021, 81).
Certains participants et participantes à l’enquête pensent que cette pratique pourrait mener à une diminution du besoin de main-d'œuvre dans les métiers graphiques. Chez les experts en effets visuels et en expériences immersives, on anticipe par exemple une décroissance des besoins en texturisation au sein des entreprises. Certains enseignants craignent aussi que ce changement n’affecte particulièrement les finissantes et finissants des programmes de formation collégiale et universitaire :
— null
Quelques répondantes et répondants des trois secteurs de l’industrie et du corps enseignant observent une augmentation de l'utilisation de la capture de mouvement dans les processus de production, ce qui influence les métiers de l’animation.
En jeu vidéo, on note qu’en comparaison avec les techniques d’animation image par image, le travail avec la capture de mouvement est moins créatif, consistant surtout de travaux manuels, de montage et d’animation de posture. À ce sujet, un professionnel du secteur note que « les animateurs maintenant, pour la plupart, sont des intégrateurs de motion capture ».
Dans le secteur des effets visuels et de l’animation, on précise que dans les cas où on utilise la capture de mouvement, elle ne change pas énormément le travail des animatrices et animateurs. Ces derniers doivent toujours animer certains mouvements spécifiques des mains ou des articulations, par exemple afin d’adapter l’animation lors d’un changement dans l’état du personnage ou du décor.
Quelques experts et professeurs soulignent que certains styles d’animation ou créatures fantastiques ne peuvent simplement pas être reproduits par la capture de mouvement. Comme le fait remarquer un enseignant du programme DEC en Animation 3D et synthèse d’images :
— null
La capture de mouvement est associée à une augmentation de la quantité d’animation et à un plus grand volume de travail pour les animatrices et animateurs, une préoccupation que partagent quelques professionnelles et professionnels interrogés pour cette enquête.
Cette section présente les changements technologiques qui affectent particulièrement le secteur des effets visuels et de l’animation ainsi que les compétences nécessaires aux artistes afin de faire face à ces changements, en portant une attention particulière aux artistes juniors. L’utilisation des moteurs de jeux a été identifiée par la présente étude comme étant l’évolution technologique ayant le plus d’impact sur les métiers de ce secteur. Plus précisément, la technologie qui bouleverse présentement le milieu de la création des effets visuels est la possibilité d’exécuter les rendus en temps réel, engendrée par l’utilisation des moteurs de jeux dans ce secteur (4.2.1.). En ce qui concerne les compétences privilégiées par ce secteur, la présente enquête relève deux points : la spécialisation des métiers ainsi que la maîtrise des logiciels Houdini, Maya et ShotGrid (anciennement Shotgun) (4.2.2.).
Dans la présente enquête, plusieurs répondantes et répondants ont observé la tendance d’utiliser de plus en plus les moteurs de jeu dans le secteur des effets visuels et de l’animation. (Notons qu’il s’agit d’une tendance qui a aussi été soulevée par plusieurs expertes et experts du secteur des expériences numériques immersives. Voir la section 4.4.2. pour plus de détails.) Ces moteurs de rendu calculent en temps réel tous les paramètres d’une image, ce qui permet aux artistes d’effectuer et de voir des changements instantanément. Ils permettent d’appliquer ces modifications au fur et à mesure de la prévisualisation des images.
Grâce à l’utilisation d’outils qui permettent d’effectuer les rendus en temps réel, le secteur a vu paraître un nouveau type de tournage appelé production virtuelle. Dans le cadre de ces productions, on projette en temps réel des environnements et autres objets sur un mur virtuel, le plus souvent munis d’écrans à diode électroluminescente (DEL). La caméra capte directement la projection de ces environnements, objets et décors en même temps qu’elle filme la performance des actrices et acteurs. Les éclairages peuvent être travaillés simultanément. Théoriquement, il n’est plus nécessaire de créer une image composite par la suite, car tout a déjà été construit à même la captation de la caméra. Ainsi, la production virtuelle en temps réel permet de visualiser et de manipuler à la fois des éléments virtuels ainsi que d’effectuer des effets numériques au tournage au lieu de le faire en postproduction, comme c’est le cas dans les productions traditionnelles. Ce genre de procédé a pour effet d’embrouiller les frontières entre les différentes étapes de la production (voir Ashton et al. 2021, 79‑80; Gwertzman 2020). Il en découle, par exemple, une plus grande implication des artistes 3D et une intervention précoce des expertes et experts en effets visuels dans le processus de création. Notons finalement que les expertes et experts interrogés dans le cadre de cette enquête ont fait remarquer que ce type de production nécessite l’élaboration d’une vision d’ensemble et qu’elle demande une collaboration accrue entre les différents métiers (traditionnels ou non) de la production et de la postproduction. Pour en savoir davantage sur la production virtuelle, voir Bédard 2020.
Cela dit, certaines répondantes et certains répondants ont aussi noté que les résultats obtenus avec ces outils – quoique satisfaisants pour la prévisualisation ou pour le cinéma d’animation – ne permettent pas encore une qualité d’image suffisante pour créer les rendus finaux des effets visuels d’un film. À ce jour, ce sont surtout les studios de films d’animation 3D qui se servent des moteurs de jeux à cet effet. Le plus souvent, il est également nécessaire d’apporter des retouches, ce qui est souvent plus complexe que de travailler en suivant un mode de production sur fond vert. Ainsi, il a été mentionné que dans certains cas, l’utilisation de ces moteurs de rendu en temps réel rallonge le temps de travail, car elle y ajoute une ou plusieurs étapes (manipulation d’actifs 3D, retouche d’éclairage ou autres opérations). Ce travail de correction concerne de plus près le travail des métiers graphiques, particulièrement les postes d’entrée.
Lorsque questionnés à propos de l’utilisation future des moteurs de rendu et du travail en temps réel dans le secteur des effets visuels, un très grand nombre d’expertes et experts ont répondu qu’à l'avenir ces outils seraient de plus en plus en usage et que le travail en temps réel s’immiscerait de plus en plus dans les productions. Un certain nombre ont tout de même noté l’inviabilité du travail en temps réel d’ici les cinq prochaines années, expliquant que les artistes en VFX ont rarement les compétences nécessaires pour profiter des avantages offerts par ces nouveaux outils. Un professionnel en effets visuels partage ses doutes à ce propos :
— null
Tel que mentionné plus haut, certaines répondantes et certains répondants ont affirmé que les artistes en effets visuels n’ont pas souvent les compétences nécessaires pour bien utiliser les moteurs de calculs d’images ou moteurs de rendu en temps réel. Compte tenu de la place que prennent ces outils dans plusieurs étapes de la chaîne de production du secteur des effets visuels et de l’animation, la présente enquête souligne l’importance de considérer l’enseignement de ces outils et de préparer les juniors aux répercussions de l’usage de ces outils sur leur travail. Un professionnel en effets visuels souligne ce besoin tout en expliquant son lien avec la spécialisation de certains métiers :
— null
Au cours de la présente étude, bon nombre d’expertes et experts ont souligné la forte spécialisation de plusieurs métiers ainsi que la multiplication des outils qui, à la fois, la provoquent et en découlent. En effet, une pléthore de métiers spécialisés apparaissent en raison de l’arrivée des nouvelles technologies; à leur tour, ceux-ci se développent encore plus afin d’exécuter un travail de plus en plus précis. Sur le développement des métiers, il a été mentionné que ceux qui évoluent le plus vite sont ceux qui sont partagés avec le jeu vidéo, notamment avec l’utilisation des logiciels procéduraux (éclairage, ombrage, texture et autres). Le Diagnostic des besoins de main-d'œuvre et d'adéquation formation-emploi : Secteur des effets visuels et animation de Conseil emploi métropole énumère quelques exemples d’expertises pointues ayant fait émerger d’autres métiers, tels que l’artiste créatures, l’artiste en simulation d’effets de foule ou encore l’artiste du pelage (grooming) ou du vêtement (cloth) (Côté et Pilon 2016, 37). Ceci est particulièrement vrai dans les grandes entreprises.
Comme le souligne la liste de compétences essentielles que présentent les autrices de ce rapport, chacun des métiers est appelé à maîtriser une variété d’outils propres aux tâches artistiques à réaliser, comme Nuke, Substance, ZBrush et FumeFX pour ne nommer que ceux-là (Côté et Pilon 2016, 40. Voir Annexe B pour une liste plus complète des outils, classés par discipline). De plus, les répondantes et répondants ont noté les points suivants : l’amélioration des outils de texture (texturing), d’éclairage (lighting) et de rendu pour la préproduction et le visuel ainsi que l’arrivée d’outils qui facilitent l’échange des données d’un département à l’autre et le développement d’outils pour automatiser le travail d’armature (rig). Ajoutons à ceci, que les outils existants sont de plus en plus sophistiqués, de plus en plus complexes, et demandent une mise à jour perpétuelle des compétences des artistes.
De concert avec les expertes et experts, les enseignantes et enseignants ont également souligné la nécessité de spécialiser les programmes de formation en réponse à la spécialisation des métiers et des outils dans le secteur, et ce même au sein des petites entreprises (pour plus de détails sur l’impact de ces changements sur la formation initiale, voir la section 5.3.).
Parmi les répondantes et répondants, certains ont identifié Houdini comme étant un logiciel procédural qu’il faut maîtriser afin de créer des effets visuels. Ceci est confirmé par plusieurs sources qui l’identifient comme compétence essentielle pour les artistes d’effets visuels (Cutean et al. 2019, 43; Côté et Pilon 2016, 40) et comme cible en matière de formation par plusieurs entreprises de ce secteur (Côté, Tremblay, et Lasser 2017, 243).
Malgré l’arrivée d’autres outils, Maya est toujours fortement utilisé chez les professionnelles et professionnels du milieu. Ceci est souligné à la fois par les répondantes et répondants et dans la documentation, où ce logiciel est identifié comme nécessaire à maîtriser en modélisation, animation 3D, environnements 3D et dans la création d’effets et de particules (Cutean et al. 2019, 43; Côté, Tremblay, et Lasser 2017, 243; Côté et Pilon 2016, 40).
Selon plusieurs expertes et experts, l’utilisation de Shotgun, renommé ShotGrid en juin 2021, est très populaire pour la gestion des actifs (assets). La documentation l’identifie également comme un logiciel qui doit être maîtrisé par les professionnelles, professionnels, techniciennes et techniciens (ainsi que les cheffes et chefs d’équipe et les superviseures et superviseurs) pour la gestion de la production (Côté et Pilon 2016, 40). Il y est identifié comme un besoin en formation continue par bon nombre d’entreprises en effets visuels et en animation (Côté, Tremblay et Lasser 2017, 244).
Les deux changements qui affectent présentement le secteur du jeu vidéo sont d’un côté la montée en popularité des outils et logiciels procéduraux dans la génération de contenu (4.3.1.) et de l’autre la présence de plus en plus accrue des opérations en continu (LiveOps) dans le milieu des jeux en ligne (4.3.2.). Les logiciels Blender, Houdini et Substance, ainsi que l’éclairage dans les moteurs de jeu Unreal et Unity, sont les compétences techniques les plus souvent mentionnées par les répondantes et répondants (4.3.3.).
De nombreuses répondantes et répondants du secteur et du corps enseignant ont dit percevoir un usage de plus en plus répandu des logiciels et des outils procéduraux tels que Substance et Houdini dans les métiers graphiques en jeu vidéo.
Dans le processus de création de jeu, la génération procédurale fait référence à la programmation automatisée de certains éléments. Cette procédure est rendue possible grâce à des règles et des formules mathématiques préalablement définies. Comme l’explique le Profil de la main-d’œuvre dans l'industrie du jeu électronique au Québec en 2016 de TECHNOCompétences, ceci a un impact sur les façons de travailler et les compétences des artistes :
— Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 18
Selon les participantes et participants à l’enquête, les outils procéduraux permettent aux créatrices et créateurs de jeux de produire des systèmes complexes (comme des jeux à monde ouvert) sans avoir à dépendre de grosses équipes de programmeuses et programmeurs (voir Roble et al. 2021).
Interrogés sur les outils procéduraux, les intervenantes et intervenants ont relevé les avantages suivants :
Les métiers cités par les répondantes et répondants comme étant les plus affectés par les méthodes de travail et les outils procéduraux sont en lien avec la modélisation, les environnements 3D, l’éclairage, les textures et les ombrages, l’animation, l’animation faciale, la capture de mouvements, les effets visuels de simulations ainsi que les techniques de rendu et de composition d’image.
Malgré les nombreux avantages liés à l’usage des logiciels et outils procéduraux, ceux-ci ne sont pas parfaits. Les personnes interviewées pour la présente enquête ont souligné deux points : la mise en péril possible de la qualité du travail face à l’augmentation de la quantité demandée et l’importance de l’aspect créatif des métiers devant la montée de nouvelles exigences de connaissances techniques.
Certains experts et expertes du secteur ont exprimé une mise en garde face à l’utilisation des logiciels et outils procéduraux et à l'accélération du processus de production que ceux-ci engendrent. En donnant de plus en plus d’importance à la vitesse de production, le risque est qu’elle devienne une valeur plus importante que la qualité du résultat. Ce point de vue est partagé avec des expertes et experts du secteur des effets visuels et de l’animation, qui utilisent aussi de plus en plus ces outils, et est exemplifié par les dires de ce répondant :
— null
Le deuxième bémol relevé par les intervenantes et intervenants de l’enquête à propos de l’utilisation des outils procéduraux est que puisque les outils exécutent les tâches de génération, la nature du travail des artistes s’éloigne de l’artisanat (dans le sens de crafting) pour se rapprocher de la mise en scène d’éléments graphiques. Cela dit, puisque des tâches de correction et d’ajustements artistiques sont souvent requises par la suite, un bon œil artistique est primordial.
Désormais, plusieurs jeux se présentent comme un service en continu. L’expression « opérations en continu » (LiveOps) désigne un mode de production qui découle du fait que les jeux sont accessibles par abonnement en ligne et que leur développement se prolonge une fois le produit lancé. Le fonctionnement des opérations en continu requiert une constante production de nouveaux événements ludiques (chapitres de jeu, microtransactions, etc.) afin d’encourager l’abonnement perpétuel au jeu, comme le souligne la Chambre de commerce du Montréal métropolitain dans son rapport Industries créatives : réussir dans un environnement en mutation rapide :
— Chambre de commerce du Montréal métropolitain 2018, 21
Ainsi, les opérations en continu permettent une commercialisation des jeux qui s’inspire des formules des jeux mobiles gratuits (free-to-play). Ces stratégies de rétention des joueuses et des joueurs exigent une implication constante des équipes de conception de jeu, de programmation, et d’artistes graphiques en perpétuelle activité ainsi que la création de systèmes de gestion de communautés (à ce sujet, voir Naud, Dupont et Thabet 2020; Gwertzman et Cox 2019; KPMG 2017, 25).
Selon les expertes et experts questionnés dans la présente étude, bien que les opérations en continu augmentent la quantité de travail demandée et accélère la vitesse d’exécution, elles ne changent ni le mandat, ni la nature du travail des artistes graphiques. Tout au plus, les opérations en continu exacerbent l’uniformisation et la normalisation des éléments graphiques en raison de la quantité de nouveaux contenus qu’elles produisent à un rythme rapide. Les enseignantes et les enseignants confirment les dires des expertes et experts à cet égard.
L’adoption des outils procéduraux dans le secteur du jeu vidéo exige des connaissances techniques spécifiques de la part des artistes. En effet, il leur est nécessaire de très bien les connaître afin de pouvoir les utiliser à bon escient. Ainsi, les entreprises recherchent une main-d’œuvre qualifiée ayant des compétences techniques qui permettent de bien mettre ces outils à profit. Ceci est relevé par les intervenantes et intervenants et dans la documentation (Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 18).
Les outils les plus souvent mentionnés au cours de la présente enquête comme étant essentiels à maîtriser dans le secteur du jeu vidéo sont Blender, Houdini et Substance. S’ajoutant à la liste, 3Ds Max, Photoshop, ZBrush et Frostbite ont également été identifiés comme étant des outils importants à connaître (voir Annexe B pour une liste complète des outils les plus utilisés dans les trois secteurs). Cette information est soutenue par la documentation (Cutean et al. 2019, 43; Côté, Tremblay et Lasser 2017, 257). Les intervenantes et intervenants ont également mentionné que les outils d’éclairage dans Unity et Unreal doivent recevoir une attention particulière dans la formation des juniors.
Dans le secteur des expériences numériques immersives, les artistes utilisent une panoplie d’outils disparates pour créer leurs œuvres tels des caméras sphérique 3D, des logiciels et des outils d’enregistrement, de conception et de traitement du son. À l’aide de ces outils, elles ou ils peuvent créer des œuvres originales comme, par exemple, des panoramas stéréoscopiques de 360 degrés, des expériences immersives muséales et autres. De cette panoplie d’outils, la technologie qui fait le plus de vagues dans ce domaine est la réalité étendue (XR) (4.4.1.). Conséquemment, la maîtrise des logiciels Unreal et Unity, la capacité d’adaptation, la communication et la collaboration sont les compétences les plus souvent mentionnées par les expertes et experts de ce secteur (4.4.2.).
Le terme « réalité étendue » (XR, de l’anglais extended reality) fait référence à plusieurs procédés et interfaces qui permettent de faire coexister des objets numériques et physiques dans un même espace. On l’utilise pour parler à la fois de réalité virtuelle, augmentée et mixte (voir Farmer et Matthews 2020, 6; Richard 2019). Le rapport Franchir la frontière virtuelle : L’écosystème des technologies immersives du Canada du Conseil des technologies de l’information et de la communication (CTIC) définit ces trois procédés comme suit :
— null
— null
— Farmer et Matthews 2020, 6
En parlant de leur utilisation des technologies de réalité étendue, la plupart des répondantes et répondants ont fait mention de la réalité augmentée (RA). Plusieurs ont évoqué la réalité virtuelle (RV). Un plus petit nombre ont parlé de réalité mixte (RM). Le sondage réalisé par XN Québec pour son Portrait de l'industrie et retombées économiques des secteurs rapporte des résultats semblables (Xn Québec et Habo 2021, 23).
Certains intervenantes et intervenants ont dit que l’utilisation d’engins de jeux influence les façons de produire les expériences en réalité étendue. Plusieurs ont d’ailleurs noté une utilisation de plus en plus importante de ces outils dans leur secteur, tel que mentionné plus haut.
Faisant écho aux dires des participantes et participants de l’étude, les intervenantes et intervenants de la conférence Transforming Skills: VFX to VR, présentée par l’association professionnelle Visual Effects Society en 2018, affirment que la maîtrise des moteurs de jeu est essentielle pour les artistes voulant évoluer dans le domaine de la réalité virtuelle (Barron et al. 2018). Sur ce point, plusieurs entreprises québécoises du secteur ont aussi confirmé utiliser Unreal ou Unity dans leurs projets de réalité virtuelle ou de réalité augmentée lors de présentations dans le cadre de webinaires. C’est le cas, notamment, de Parenthèses 9 (Poirier 2021), Wallrus (Marchand et al. 2021) et Luz Studio (Jobin et al. 2021).
À propos de la génération de contenu immersif, plusieurs répondantes et répondants de l’enquête ont souligné que le plus grand problème se situe au niveau de la conceptualisation d’expériences. Comme le dit un professionnel du secteur : « Les défis qui y sont reliés me semblent davantage du côté du design de l’expérience pour bien tirer avantage des nouvelles possibilités, que de défis technologiques comme tel, du moins, pour ce qui est de la génération de contenu ». La documentation suggère entre autres que les artistes travaillant déjà avec des logiciels de modélisation 3D ou autres logiciels de conception graphique peuvent opérer une transition vers les technologies immersives (voir Farmer et Matthews 2020, 44; Barron et al. 2018).
Selon les dires des intervenantes et intervenants de l’étude, de nombreuses compétences en demande dans le secteur des arts immersifs sont de nature transversale. En effet, lors de l'enquête, la communication, la collaboration et la capacité d’adaptation ont été identifiées comme étant essentielles au travail des artistes en expériences numériques immersives.
Les expertes et les experts du secteur des expériences numériques immersives ont mentionné plusieurs phénomènes propres à leur domaine qui font du milieu des expériences numériques immersives un domaine en constant changement, par exemple la tendance vers la personnalisation des expériences dans les installations interactives et le contenu narratif expérientiel qui évolue selon les choix des utilisatrices et utilisateurs.
On mentionne aussi l’émergence constante de nouvelles fonctionnalités ou de nouveaux objets comme des dispositifs de réalité virtuelle, augmentée ou mixte. Bref, ils ont souligné à quel point les possibilités créatives changent constamment dans leur milieu. Compte tenu de ces constants changements, il est difficile de prévoir exactement quelles seront les compétences qu’elles ou ils doivent développer, et plusieurs répondantes et répondants ont insisté sur l’importance d’avoir une bonne capacité d’adaptation.
Les compétences de communication et de collaboration doivent être maîtrisées car le travail de ces artistes les mène à interagir avec des professionnelles et professionnels œuvrant dans des familles d’emploi diversifiées (programmation, techniques, arts et autres). C’est ce que souligne un expert :
— null
La collaboration entre les artistes et les techniciens est primordiale afin de bien intégrer les contraintes technologiques à la création artistique, et ce dès le début d’un projet de réalité virtuelle ou augmentée, comme l’a souligné Raymond Poirier de Parenthèses 9 lors de son intervention à la Semaine numériQC en avril 2021 (Poirier 2021). Finalement, rejoignant à la fois les compétences de communication et de collaboration, la capacité d’échanger avec d’autres profils professionnels a elle aussi été identifiée comme étant une compétence essentielle pour les artistes qui travailleront avec les outils d’intelligence artificielle (voir section 4.1.1.5. pour plus de détails).
Les outils les plus souvent mentionnés par les répondantes et répondants dans le secteur des arts immersifs sont les moteurs de jeu Unreal et Unity. Le rapport Étude des besoins de formation des clientèles des chaînes des arts visuels, des arts médiatiques et des arts interdisciplinaires souligne l’importance de ces moteurs de jeux pour les artistes médiatiques et interdisciplinaires (Compétence Culture et Dion 2018, 77, 147). L’étude du Conseil des technologies de l’information et de la communication (CTIC), Tendance de croissance au Canada : Aperçu des talents numériques pour 2023, identifie aussi Unreal et Unity comme compétence essentielle. (Cutean et al. 2019, 43) – un métier de plus en plus en demande dans le secteur des expériences numériques immersives, selon le Portrait de l'industrie et retombées économiques des secteurs, publié récemment par Xn Québec (Xn Québec et Habo 2021, 23, 49).
Les résultats de l’enquête font émerger une série d’outils et de compétences qui doivent être pris en compte dans l’adaptation des programmes de formation collégiale et de premier cycle universitaire. Les changements technologiques affectant les métiers graphiques 2D et 3D des trois secteurs de la création numérique sont résumés ci-dessous. Les compétences essentielles à enseigner aux artistes de la relève dans l’ensemble des secteurs sont ensuite rassemblées.
Des outils permettant l’automatisation de certains procédés artistiques transforment la manière dont les artistes 2D et 3D appliqueront leurs compétences. Au lieu de construire et de modéliser les éléments graphiques en intégralité, les artistes doivent de plus en plus diriger leurs capacités artistiques vers l’assemblage d’objets et la retouche d’images.
Bien que les outils de l’intelligence artificielle comme l’apprentissage automatique et l’apprentissage profond ne soient pas encore tout à fait implantés dans les entreprises de création numérique, on s’attend à ce qu’ils puissent un jour libérer les artistes de certaines tâches répétitives et chronophages et accélérer les processus de création en générant du contenu que les artistes peuvent retravailler. Les artistes de demain devront avoir des connaissances de base sur les apports et limites de l’intelligence artificielle dans la création afin d’échanger avec les équipes de programmation et de développement et faire des choix éclairés quant aux outils mis à leur disposition.
Les répondantes et répondants du secteur du jeu vidéo ont été les plus nombreux à mentionner que les entreprises de leur secteur recherchent des artistes ayant les compétences techniques requises pour bien utiliser les outils de génération procédurale (Substance, Houdini), déjà bien implantés dans le secteur des effets visuels et de l’animation. Ces logiciels permettent aux artistes de s’appuyer sur des banques d’objets 3D préexistants et des paramètres mathématiques afin de créer plus de contenu en moins de temps. Toutefois, ces artistes requièrent une bonne compréhension des procédés de génération des éléments afin de pouvoir créer et modifier les contenus procéduraux.
Les moteurs de rendu en temps réel, développés initialement pour le jeu vidéo (Unreal, Unity), sont de plus en plus utilisés dans les autres secteurs de la création numérique. Au sein du secteur des effets visuels et de l’animation, ceux-ci bousculent l’ordre des étapes de production (la composition, la prévisualisation et les rendus peuvent s’effectuer plus tôt dans le processus, notamment avec l’arrivée de la production virtuelle) et exigent une collaboration accrue entre les représentantes et représentants des différents métiers. Dans le domaine des expériences numériques immersives, l’utilisation d’engins de jeux influence aussi les façons de produire la réalité étendue. Les artistes 2D et 3D voulant évoluer dans l’un ou l’autre de ces secteurs devront apprendre à maîtriser ces outils.
Les métiers graphiques 2D et 3D en effets visuels et animation sont de plus en plus spécialisés, ce qui influence la variété d’outils que les artistes doivent maîtriser. Plusieurs expertes et experts et professeures et professeurs sont d’avis qu’il est nécessaire de spécialiser davantage les programmes de formation initiale en réponse à cette réalité.
Les opérations en continu pour le développement de jeux en ligne, si elles ne changent pas la nature du travail des artistes, demandent qu’elles et ils soient en mesure de créer une grande quantité de contenu à un rythme plus rapide. Il sera essentiel de bien préparer les artistes juniors à la vitesse d’exécution et la capacité d’adaptation accrue qu’exige cette nouvelle réalité.
Les technologies de réalité augmentée (RA) et virtuelle (RV) sont parmi les plus utilisées chez les répondantes et répondants de ce secteur. Ces technologies posent des défis particuliers au niveau de la conceptualisation des expériences, mais les artistes travaillant déjà avec des logiciels de conception graphique 3D peuvent assez aisément les apprivoiser.
Les outils de création numérique les plus souvent mentionnés par les répondantes et répondants de la présente enquête, tous secteurs confondus, sont : 3Ds Max, Blender, Houdini, Maya, Photoshop, ShotGrid (Shotgun), Substance, Unity et Unreal[^1].
[^1]: Cette liste ne présente pas de manière exhaustive l’ensemble des outils à maîtriser par les étudiantes et les étudiants. Voir l’Annexe B pour un tableau détaillé.
Les nouveaux outils de l’intelligence artificielle, les logiciels procéduraux et les moteurs de jeux permettant le rendu en temps réel obligent les artistes à développer certaines compétences techniques. Toutefois, plusieurs professionnelles et professionnels de l’industrie et membres du corps enseignant sont d’avis que le talent artistique demeure primordial pour les métiers graphiques 2D et 3D. Pour les participantes et participants à l’enquête, certaines tâches techniques sont appelées à être automatisées dans les années à venir, mais l’œil artistique fera toujours partie intégrante du profil d’un artiste évoluant dans le domaine.
Bien que chacun des secteurs de la création numérique ait ses propres réalités et soit affecté différemment par les changements technologiques, ils subissent tous une pression commune, à savoir la rapidité avec laquelle les outils évoluent. Afin de faire face à l’apparition incessante de nouveaux outils de travail, un grand nombre d’expertes et d’experts des trois secteurs disent que les artistes doivent faire preuve d’une bonne capacité d’adaptation et de souplesse eu égard aux technologies et aux tâches à accomplir.
Certains changements technologiques, comme la production virtuelle et l’intelligence artificielle, exigent une collaboration accrue entre les différents métiers. La capacité d’échanger avec des profils techniques autant qu’artistiques est une compétence souvent mentionnée par les expertes et experts des trois secteurs de la création numérique.
La panoplie de possibilités offertes par l’évolution technologique, surtout en ce qui concerne l’automatisation de certains processus, demande que les artistes développent un esprit critique. En effet, les artistes de la création numérique doivent être en mesure de prendre des décisions réfléchies quant au rôle des outils dans leur travail : de savoir, par exemple, quels sont leurs objectifs et quels sont les procédés les plus pertinents pour y arriver.
Ce cinquième chapitre documente les enjeux d’adéquation formation-emploi actuels entre l’offre de formation disponible et les besoins en main-d’œuvre des trois secteurs de l’industrie considérés dans l’enquête.
L’offre de formation collégiale et de premier cycle universitaire est mise en relation avec les besoins actuels en main-d’œuvre, avec les compétences essentielles des métiers graphiques 2D et 3D, ainsi qu’avec les transformations des compétences dues à l’évolution technologique de ces métiers mises en évidence au chapitre 4. Les besoins à combler par les formations sont abordés. Le présent chapitre documente également les points de friction entre les studios de création et les établissements d’enseignement qui limitent le développement et l’efficacité de la mise à jour des programmes d’études.
Pour rappel, bien qu’un nombre plus étendu de formations initiales et continues disponibles puissent mener aux métiers des trois secteurs considérés dans l’enquête, les résultats abordés dans cette section ciblent les programmes d’études suivants :
Cette partie du rapport présente les besoins et les défis de recrutement de main-d’œuvre des studios des secteurs des effets visuels et de l’animation, du jeu vidéo et des expériences numériques immersives. Les résultats présentés sont tirés des données documentaires disponibles et des entretiens menés avec les professionnelles et professionnels des trois secteurs. Les besoins sont aussi mis en relation avec l’ensemble de l’offre de formation initiale ciblée dans l’enquête.
Les données de la revue documentaire, dont les études de TECHNOCompétences et du Conseil emploi métropole en 2016 observent un manque de main-d’œuvre qualifiée pour plusieurs postes d’artistes en animation 2D et 3D et d’artistes spécialisés normalement accessibles aux finissantes et finissants des programmes de formation collégiale et universitaire. Si les entreprises en jeu vidéo n’hésitent pas à embaucher des diplômées et diplômés québécois pour pourvoir aux postes d’artistes 3D (Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 14), celles du secteur des effets visuels ont fréquemment recours à l’embauche de candidates et de candidats de l’étranger car elles peinent à trouver des finissantes et finissants québécois qui satisfassent aux exigences de qualification de l’industrie (Côté et Pilon 2016, 41). Les écrits recensés pour le présent rapport associent les difficultés de recrutement pour certains postes d’entrée à des lacunes dans les programmes de formation initiale (détaillée en 5.3).
Toutefois, plusieurs professionnelles et professionnels interrogés de même qu’une partie des données de la revue documentaire indiquent que les besoins en main-d’œuvre les plus importants se situent au niveau des postes requérant plusieurs années d’expérience. En particulier, les studios en effets visuels, en cinéma d’animation et en jeu vidéo affirment éprouver des difficultés de recrutement pour les postes intermédiaires (entre 3 et 8 ans d’expérience) et séniors (plus de 8 ans d’expérience) au sein de nombreuses professions (Mouvement économique métropolitain Relançons MTL 2020, 34; KPMG 2017, 2; Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 15; Côté et Pilon 2016, 69). Tout comme pour les postes d’entrée des métiers artistiques et techniques, les entreprises comblent ces postes en embauchant des candidates et des candidats à l’étranger, car elles font face à un déficit de main-d’œuvre qualifiée au Québec (Côté et Pilon 2016, 41‑42; Quintas 2016, 33).
Cependant, outre la mention des besoins en postes intermédiaires et séniors, peu de répondantes et répondants se sont exprimés au sujet de métiers spécifiques pour lesquels les besoins en main-d’œuvre sont plus importants. Les quelques professionnelles et professionnels qui se sont avancés précisent que les difficultés de recrutement se situent surtout au niveau des profils avec des composantes en supervision ou au niveau des métiers qui requièrent des compétences hautement techniques qui ne sont pas incluses dans les professions visées des programmes d’études collégiales et universitaires ciblés dans cette enquête.
Dans le secteur des effets visuels et de l’animation, la collecte de données documentaires révèle que les difficultés de recrutement ciblent des postes tels des chefs d’équipe (lead) en animation, composition, éclairage et effets-simulation (FX), ou encore des superviseurs en infographie (CG), effets visuels (VFX), 2D et 3D (Côté et Pilon 2016, 41‑42).
Les cycles d’embauche des entreprises en effets visuels sont également déterminés par l’obtention de contrats, notamment pour des productions étrangères à budget important (Côté et Pilon 2016, 24). En raison de l’arrivée de nouveaux contrats pour des productions de grande envergure, les studios éprouvent des besoins de recrutement rapides qui requièrent l’embauche d’un nombre important d’artistes expérimentés, car ils ne disposent pas du temps nécessaire pour accueillir et former des artistes juniors sur leurs projets (Quintas 2016, 33).
Certains studios d’animation subissent également la tendance des besoins en main-d’œuvre plus expérimentée. Par exemple, un professionnel d’un studio d’animation nous a indiqué que le secteur était en plein essor et qu’il éprouvait, au moment de l’entretien, des difficultés d’embauche pour des profils d’artistes en effets spéciaux 2D et 3D, ainsi que pour des artistes en création de maquettes (layout) spécialisés en films d’animation. Ce profil requiert des compétences en direction photo qui ne sont pas nécessairement partagées avec les artistes en création de maquettes spécialisés en effets visuels, de sorte que la main-d’œuvre qualifiée pour ce poste devient plus difficile à trouver que pour les autres professions. Il explique :
— null
Dans le secteur du jeu vidéo, quelques professionnelles et professionnels indiquent éprouver des difficultés à combler des postes de gestion intermédiaire, dont des postes de chefs d’équipe dans tous les départements (art, programmation, design et autres) et de direction technique. Les métiers en programmation ont aussi été relevés comme des besoins à combler prioritairement. Par exemple, un directeur créatif d’un studio interrogé indique :
— null
L’ensemble de ces difficultés de recrutement a également été évoqué dans plusieurs rapports et profils de la main-d’œuvre du secteur (KPMG 2017, 24; Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 20).
Outre les postes en supervision ou en programmation, le métier d’artiste technique a également été mentionné comme un poste pour lequel les studios éprouvent des difficultés de recrutement. Une répondante en a parlé lors de son entretien : « les artistes techniques on en cherche beaucoup, et il n'y en a pas. Souvent on cherche des séniors, [cela] fait que c’est difficile, mais si les gens pouvaient au moins avoir une bonne base là-dedans ».
Avec la montée des jeux pour téléphones mobiles et des jeux conçus sous le modèle du « service », certains participants et participantes ainsi que plusieurs données d’études et de conférences de l’industrie évoquent des nécessités de recrutement pour de nouveaux métiers, comme les designers en monétisation (Naud, Dupont et Thabet 2020; Chambre de commerce du Montréal métropolitain 2018, 21; KPMG 2017, 12, 16). Cette nouvelle fonction intègre des compétences à la fois en design de jeu et en marketing. Ce profil est actuellement difficile à combler en raison de sa nouveauté et de la multidisciplinarité inédite des connaissances et des savoir-faire recherchés.
Dans le secteur des expériences numériques immersives, des répondantes et répondants ont indiqué que les postes de programmeurs séniors spécialisés en moteurs de jeu vidéo étaient en demande. Par exemple, un répondant a mentionné que son studio voudrait « aller chercher un ou deux autres programmeurs plus séniors un peu. Pour que les gars ici soient autonomes en équipe complète ». Le Portrait de l’industrie et retombées économiques des secteurs de Xn Québec et Habo relève des résultats similaires, ajoutant aux difficultés de recrutement du secteur les postes de développeurs, d’animateurs 2D et 3D, de producteurs ou chargés de projet, en marketing et communications, ainsi que les technologistes et techniciens. Selon l’étude, les deux tiers des entreprises éprouveraient ces difficultés de recrutement (Xn Québec et Habo 2021, 49).
Alors que les données documentaires disponibles indiquent une forte demande pour les postes de métiers artistiques graphiques jugés accessibles aux diplômées et diplômés des programmes d’études québécois, les résultats des sondages et des entretiens semblent plutôt pointer vers une hausse des besoins pour des postes intermédiaires et séniors. Ces derniers ne sont pas à la portée des programmes d’études ciblés, puisqu’ils requièrent des connaissances spécialisées et de nombreuses années d’expérience.
De même, les autres plus grandes difficultés en recrutement de main-d’œuvre recensées touchent les postes de métiers hautement techniques qui concernent davantage la relève des programmes de formation en génie informatique et logiciel (surtout pour les secteurs du jeu vidéo et des expériences numériques immersives).
Cette section présente l’analyse des compétences essentielles à l’exercice des métiers graphiques 2D et 3D identifiées par les personnes interrogées par le biais de sondages ou lors d’entretiens. Ces résultats sont mis en relation avec la collecte de données documentaires ainsi qu’avec les réponses reçues de la part des enseignantes et enseignants collégiaux et universitaires. Les compétences essentielles communes aux trois secteurs sont abordées. De plus, les aptitudes qui se démarquent pour chacun des secteurs sont précisées.
Le sondage distribué aux différents intervenants et intervenantes stratégiques leur demandait de classer par ordre d’importance les compétences suivantes : (i) innover, (ii) communiquer et collaborer, (iii) créer des contenus selon les directives, (iv) planifier et organiser le travail, (v) résoudre les problèmes efficacement et (vi) utiliser les bons outils. Les résultats pondérés de cette question sont les suivants :
Dans les étapes subséquentes de l’enquête, les répondantes et répondants devaient s’exprimer sur les compétences essentielles à l’exercice de leur métier. On constate que les habiletés qui ont été identifiées comme les plus importantes lors de la question quantitative du sondage (représentées dans le schéma) se sont souvent retrouvées dans les réponses qualitatives des sondages et des entretiens.
De manière générale, les professionnelles et professionnels ayant participé à l’enquête (tous secteurs confondus) révèlent une prépondérance des compétences comportementales (savoir-être) sur les autres types de compétences. Les mentions de ce type d’aptitudes ont été nettement supérieures à celles relatives aux habiletés artistiques et techniques. En effet, pour l’ensemble des résultats, 234 aptitudes essentielles ont été précisées. Parmi celles-ci, 172 réponses concernent des habiletés interpersonnelles, 27 se rapportent aux savoir-faire artistiques, 9 sont liées aux aptitudes techniques (c’est-à-dire, les aptitudes que l’on associe à l’usage des outils et des technologies) et 26 peuvent être affiliées à d’autres types de compétences (par exemple, la gestion d’équipe, la recherche ou autre).
Parmi les compétences les plus partagées par l’ensemble des expertes et experts interrogés, on retrouve[^1] :
Ces compétences peuvent toutes être associées à des savoir-être, marquant l’importance de ces aptitudes dans les milieux de travail ciblés. La majorité de ces aptitudes ont également été identifiées comme essentielles par les personnes enseignantes interrogées : la capacité d’adaptation, la communication, la collaboration et le travail d’équipe, la gestion du stress et la résolution de problèmes ont été mentionnées à plusieurs reprises dans les entretiens. De même, un bon nombre de données documentaires insiste sur l’importance de développer les compétences comportementales comme l’autonomie, la capacité d’adaptation, la collaboration et le travail d’équipe, la créativité et l’innovation, faisant écho aux résultats présentés par les répondantes et les répondants de l’enquête (Carmignani, Abenhaim et Dorias 2020; Compétence Culture et Dion 2018, 87; Corbeil, Malouin, et Khamassi 2016, 27; Côté et Pilon 2016, 40, 43).
[^1]: Les compétences sont classées par ordre d’importance. Cet ordre est déterminé selon le nombre d'occurrences dans les réponses de l’ensemble des répondantes et des répondants qui concernent les compétences essentielles à l’exercice de leur travail. Les listes de compétences qui suivront reprendront ce type de présentation. Pour celles-ci, seules les réponses des professionnelles et professionnels associés au secteur concerné sont considérées.
Outre les savoir-être partagés par l’ensemble des secteurs, les répondantes et répondants du secteur des effets visuels et de l’animation ont été nombreux à identifier les aptitudes suivantes, catégorisées comme nécessaires aux métiers graphiques 2D et 3D.
Les enseignantes et enseignants de niveaux collégial et de premier cycle universitaire ont aussi été nombreux à mentionner l’autonomie, l’autoréflexion, l’efficacité dans le travail, l’œil artistique ainsi que la rigueur et la capacité à respecter les exigences des mandats comme des aptitudes essentielles aux différents corps de métier. À ces compétences, la documentation consultée (comme le Diagnostic des besoins de main-d’œuvre et d’adéquation formation-emploi du secteur des effets visuels et de l’animation du Conseil emploi métropole [2016]) ajoute l’expertise technique et la maîtrise des logiciels de gestion de production et de création (Côté et Pilon 2016, 41)[^2].
[^2]: Un tableau résumé des outils à maîtriser se trouve en Annexe B de ce rapport.
Les professionnelles et professionnels œuvrant dans le secteur du jeu vidéo insistent majoritairement sur les compétences essentielles suivantes :
La capacité de recevoir et de formuler des rétroactions, la curiosité et l’organisation sont des compétences qui ont été mentionnées à plusieurs reprises par le corps enseignant interrogé, reprenant les résultats issus des sondages et des entretiens auprès des professionnelles et professionnels de ce secteur. À cette liste d’aptitudes s’ajoutent celles qui sont relevées par les sources documentaires consultées. Ces dernières démontrent l’importance de compétences en collaboration et en travail d’équipe (Carmignani, Abenhaim et Dorias 2020; Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 27) ainsi que l’autonomie (Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 47).
Identifiant des compétences similaires à celles qui ont été mentionnées par les répondantes et répondants du secteur du jeu vidéo, les expertes et experts du secteur des expériences numériques immersives ont le plus souvent mentionné les compétences suivantes comme essentielles :
Les compétences essentielles des trois secteurs énumérées dans la partie 5.2. et les compétences à développer avec les changements technologiques identifiées dans le chapitre 4 sont aussi reflétées dans les résultats sur les besoins à combler en formation initiale de la section suivante.
Cette section propose un état des lieux de la perception de la qualité de l’offre de formation initiale offerte. Les besoins à combler par le programme seront précisés, de même que les points de friction entre les différents acteurs et actrices qui nuisent à l’efficacité du développement et de la mise à jour des formations actuellement dispensées dans les établissements d’enseignement supérieur au Québec.
L’analyse des besoins et des points de friction est issue de la triangulation entre la collecte documentaire, les réponses données par les intervenantes et les intervenants des trois secteurs de l’industrie et les entretiens semi-dirigés réalisés avec les enseignantes et enseignants des programmes énumérés dans les tableaux 5 et 6.
Les différents rapports et profils de l’industrie consultés lors de la collecte documentaire signent un portrait peu reluisant de la qualité des formations initiales déployées au Québec. Les écrits déplorent la désuétude de certaines plateformes ou logiciels enseignés (Fragata, Gosselin et Desjardins 2018, 48), soulignent le manque de souplesse des programmes de formation face aux transformations rapides de l’industrie et à l’apparition fréquente de nouveaux métiers (Forum Numix 2021, 2; Fragata, Gosselin, et Desjardins 2018, 48) ou insistent sur l’insuffisance de spécialisation parmi les diplômées et les diplômés, ce qui nuit à l’employabilité de ces derniers dans les studios (surtout en effets visuels et en animation) (Côté et Pilon 2016, 40). Le Diagnostic des besoins de main-d’œuvre et d’adéquation formation-emploi : secteur des effets visuels et animation indique à cet effet que cette lacune a poussé les studios du secteur à créer leur propre école de mise à niveau et à n’engager que des profils ayant un minimum d’un an d’expérience sur le marché du travail (pour 90 % des entreprises consultées), ou bien à recruter des diplômées et diplômés de programmes de formation de l’étranger (Côté et Pilon 2016, 40‑41).
Or, les entretiens menés auprès des professionnelles et professionnels des trois secteurs interrogés dans le cadre de cette enquête dressent un portrait de la qualité des formations initiales qui se veut plus encourageant : l’ensemble des actrices et acteurs, tous secteurs et toutes formations confondus, énoncent que leur formation initiale leur a permis de bien se développer sur le marché du travail. Ils soulignent également que les formations actuellement déployées fournissent de bonnes bases aux étudiantes et étudiants.
Un groupe de spécialistes du MEGAMIGS (de septembre 2020) a souligné une nette amélioration des programmes de formation au cours des dernières années. Ces spécialistes saluent le développement de nouveaux programmes d’études pour combler les besoins des nouveaux métiers. Ils saluent également la plus grande synergie qui se dessine entre les établissements d’enseignement et les studios, menant ainsi à une relève plus apte à répondre aux exigences du marché du travail (Chancey et al. 2020). Quelques répondantes et répondants du secteur du jeu vidéo ont aussi abondé dans ce sens, mentionnant le progrès de la qualité de la formation des finissantes et finissants perçu depuis les cinq dernières années. Par exemple, un professionnel compare la formation qu’il a reçue il y a de nombreuses années avec celle des étudiantes et des étudiants d’aujourd’hui :
— null
Malgré cette amélioration, des professionnelles et professionnels des trois secteurs répertorient certaines lacunes à combler qui font écho aux manques qui ont été soulignés dans les sources de la collecte documentaire. Les répondantes et répondants insistent sur le manque de souplesse perçu dans l’adaptation des programmes de formation devant les changements rapides et constants de l’industrie et le manque de liens concrets entre les formations (jugées trop abstraites) avec les réalités du travail en entreprise. Les participantes et participants qui proviennent de grands studios des secteurs des effets visuels et du jeu vidéo soulignent également le manque de spécialisation des personnes diplômées des programmes collégiaux et universitaires. Toutefois, cet aspect semble être un enjeu de moindre importance pour les répondantes et répondants du secteur des expériences numériques immersives et des studios de jeu vidéo de taille plus modeste, qui disent préférer des candidats à la fois plus polyvalents qui sont tout de même capables de se démarquer dans un champ de spécialisation. Ces besoins seront abordés plus en détail dans la section 5.3.2.2.
Un nombre restreint de professionnelles et de professionnels ont abordé la question de la préférence entre l’embauche de personnes diplômées de programmes de formation collégiale ou de programmes de formation universitaire. La majorité d’entre eux a indiqué que le niveau du diplôme obtenu par une candidate ou un candidat n’était pas un critère déterminant lors du processus de recrutement. La décision d’embauche se base avant tout sur l’expérience de travail et sur le portfolio : la postulante ou le postulant doit démontrer le niveau d’aptitudes et de talent requis pour le poste auquel elle ou il aspire. Ces données font écho aux résultats pondérés sur l’ordre d’importance des critères d’embauches des sondages distribués aux représentantes et représentants des ressources humaines (chapitre 3) : la qualité technique du portfolio, les compétences comportementales et la qualité artistique du portfolio ont été classées dans les trois premières positions, alors que le programme et l’établissement d’enseignement desquels proviennent les artistes juniors se sont retrouvés dans les deux dernières (voir section 3.2.1.)
Si la formation reçue n’est pas un critère déterminant lors du processus général d’embauche, certains répondants et répondantes du secteur des effets visuels et de l’animation précisent toutefois qu’à candidatures équivalentes, la personne ayant le plus haut niveau de formation sera priorisée, car cette dernière a l’avantage de détenir des connaissances plus approfondies du métier. Selon un des professionnels en effets visuels interrogé :
— null
Les besoins à combler qui ont été évoqués par l’ensemble des données recueillies au cours de l’enquête ont été divisés en deux catégories : les connaissances et les aptitudes à développer pour répondre aux lacunes ou aux besoins actuels qui ont été énoncés par les actrices et les acteurs consultés (5.3.2.1.); et les structures pédagogiques de plus haut niveau à mettre en place au sein des programmes (5.3.2.2.).
Les connaissances et les aptitudes regroupées dans cette section sont extraites des besoins en formation initiale qui ont été soulignés par l’ensemble des actrices et des acteurs des trois secteurs et dans la documentation disponible.
Résonnant avec la critique du manque de liens concrets entre les programmes de formation et les réalités des entreprises, les répondantes et répondants des trois secteurs ont identifié des enjeux que ce rapport regroupe dans deux types de connaissances : des savoirs sur la chaîne d’opérations et des connaissances sur les modèles d’affaires des trois secteurs.
Quelques professionnelles et professionnels en effets visuels et animation et en expériences numériques immersives identifient le besoin d’enrichir les connaissances sur les chaînes d’opérations des studios. Si les répondantes et répondants en effets visuels et animation insistent sur les connaissances des structures organisationnelles propres à leur secteur, en expériences numériques immersives on insiste sur le développement de connaissances sur l’ensemble des trois secteurs afin d’assurer que les diplômées et diplômés soient plus polyvalents. Comme le dit une répondante :
— null
Les connaissances sur les chaînes d’opérations des studios ont aussi été mentionnées comme un besoin à combler par la formation initiale dans la documentation (voir Côté et Pilon 2016, 40).
Le développement des connaissances quant aux modèles d’affaires des entreprises en expériences numériques immersives a aussi été un besoin souligné par la documentation recensée pour la présente enquête. Dans le contexte où le secteur regroupe un large éventail de modèles d’affaires (les expositions immersives, la scénographie augmentée, les expériences en réalité virtuelle, augmentée, etc.), la Synthèse générale des enjeux et recommandations rédigée suite au Forum Numix (22 mars au 20 mai 2021) reproche aux programmes actuels d’être « trop cloisonnés en fonction des besoins de certains secteurs dominants dans l’industrie de la créativité numérique (les jeux vidéo principalement) » (Forum Numix 2021, 2). Comme les artistes juniors formés dans les programmes ciblés dans ce rapport sont appelés à travailler dans ce secteur, l’acquisition de connaissances sur les réalités propres aux expériences numériques immersives serait essentielle pour former la relève.
Des professionnelles et professionnels en expériences numériques immersives et en effets visuels et animation affirment qu’il est important pour les étudiantes et étudiants d’obtenir des connaissances de base en gestion de production, que ce soit sur les grands principes de la gestion de budget, ou des relations avec les clients. Comme l’indique un répondant de ce secteur :
— null
Les résultats de l’enquête concernant les compétences essentielles aux métiers graphiques 2D et 3D insistaient particulièrement sur l’importance des savoir-être dans l’exercice de la profession. Les résultats des entretiens des professeures et professeurs collégiaux et universitaires abondaient aussi dans ce sens, en accord avec plusieurs sources documentaires.
Lorsque les professionnelles et professionnels des trois secteurs se sont exprimés sur les besoins en formation initiale, plusieurs d’entre elles et eux ont indiqué que les programmes d’études devraient développer davantage les compétences comportementales chez les étudiantes et les étudiants. Les besoins à combler sont de l’ordre de l’intelligence émotionnelle, de l’empathie (compétence essentielle mentionnée à la section 5.2.1.), de la communication (également à la section 5.2.1.) et de la gestion des conflits interpersonnels. Certains intervenants et intervenantes en effets visuels et animation et en jeu vidéo soulignent aussi que les programmes devraient enseigner à la relève à recevoir et formuler des rétroactions (compétence essentielle également mentionnée par les personnes travaillant en jeu vidéo [5.2.3.]).
Parmi l’ensemble des compétences jugées essentielles par les professionnelles et professionnels des trois secteurs, le développement d’aptitudes en travail d’équipe a souvent été mentionné comme un besoin de formation initiale à combler. En effet, plusieurs répondantes et répondants des trois secteurs, la majorité des professeures et des professeurs, ainsi que de nombreuses sources de la collecte documentaire s’entendent pour dire qu’il est nécessaire de développer davantage les compétences en collaboration et en travail d’équipe chez les étudiantes et les étudiants. Cette habileté est cruciale pour les emplois au sein de petites et moyennes entreprises : les équipes plus petites sont interdisciplinaires, ce qui implique un usage important d’habiletés interpersonnelles comme l’empathie et la vulgarisation de sa pensée. Par exemple, un professionnel en expériences numériques immersives explique que les étudiantes et les étudiants devraient apprendre les bases du travail d’équipe et développer les compétences interpersonnelles qui y sont nécessaires. Il déplore le fait que le travail d’équipe est souvent mis en place dans les programmes, mais sans que ces aptitudes ne soient développées. Il explique :
— null
Comme le travail d’équipe est une partie intégrante de tous les métiers graphiques 2D et 3D, peu importe le secteur, plusieurs professeures et professeurs se joignent aux professionnelles et professionnels de l’industrie pour affirmer qu’il serait essentiel d’intégrer les compétences en travail d’équipe dans les lignes directrices des programmes. Par exemple, selon un enseignant du programme DEC Techniques d’animation 3D et de synthèse d’images, cette aptitude et d’autres devraient être ajoutée au devis ministériel :
— null
Malgré l’importance des compétences en travail d’équipe, des répondantes et répondants en effets visuels émettent toutefois la mise en garde qu’il reste important pour les étudiantes et les étudiants de travailler sur des projets qui peuvent témoigner de leur niveau de maîtrise des compétences artistiques et techniques. Cet aspect a aussi été souligné dans la documentation (Côté et Pilon 2016, 17).
La collecte de données documentaires indique, particulièrement pour le secteur des effets visuels et de l’animation, qu’il est essentiel d’augmenter le contenu en compétences artistiques (que ce soit au niveau du dessin, de l’anatomie, du mouvement ou de l’histoire de l’art) pour les différents corps de métier. Elle cerne également un besoin quant à l’approfondissement de la maîtrise artistique des logiciels de création, pour faire en sorte que l’usage des logiciels dépasse la seule maîtrise technique de l’outil (Côté et Pilon 2016, 91).
Le développement d’une culture générale de l’image et du monde (notamment en histoire de l’art et des médias) a également été mentionné comme des lacunes à combler par certains intervenants et intervenantes des secteurs du jeu vidéo et des expériences numériques immersives. À cela, quelques artistes en expériences numériques immersives ajoutent le besoin de développer les compétences des étudiantes et des étudiants en direction photo pour des productions entièrement créées en images de synthèse.
L’œil artistique et la capacité d’analyse des images sont des compétences de plus en plus convoitées par les employeurs de tous les secteurs. Dans les trois secteurs, on souligne un besoin de développer davantage cette aptitude auprès de la relève étudiante. Par exemple, une professionnelle d’un studio en effets visuels estime qu’il est plus difficile d’inculquer le sens de l’observation aux artistes juniors sous sa supervision que de leur apprendre à maîtriser les outils techniques que ceux-ci ou celles-ci ne sauraient pas déjà utiliser. En faisant référence à ce que les programmes de formation initiale devraient prioriser, elle explique : « [...] d’après moi le côté artistique est nettement plus important que le côté technique. […] Houdini… ça s’apprend. Je veux dire… mais l’œil artistique ça ne s'apprend pas, puis je pense qu’il manque beaucoup, beaucoup de ça dans les formations ».
Suivant la présence de plus en plus importante de logiciels de création procéduraux dans les studios des trois secteurs et de l’implantation graduelle de l’intelligence artificielle dans les outils de travail artistique, on anticipe que le besoin de développer l’œil artistique et la capacité d’analyse des images auprès de la relève deviendra encore plus saillant. En effet, comme il a été abordé dans les sections 4.1.1.5., 4.3.1. et 4.4.2. de ce rapport, ces outils demandent aux artistes juniors de savoir reconnaître les défauts dans les images ou les objets générés par ces logiciels afin d’y ajouter les retouches nécessaires. De nombreux professionnels et professionnelles des trois secteurs, ainsi que plusieurs professeures et professeurs estiment qu’il sera nécessaire pour les programmes de formation de développer davantage la capacité d’analyse et le sens de l’observation chez les étudiantes et les étudiants.
Plusieurs répondantes et répondants des trois secteurs et la majorité des enseignantes et enseignants interrogés sont d’avis que les compétences artistiques et l’apprentissage des éléments fondamentaux des logiciels de création sont plus importants que la maîtrise technique d’outils spécifiques. Les studios des trois secteurs n’utilisent pas tous les mêmes outils, et ces derniers sont appelés à changer rapidement (que ce soit par les mises à jour continuelles, ou par l’adoption de nouvelles technologies). En conséquence, les artistes de tous les milieux doivent constamment s’adapter, et les programmes de formation doivent préparer les personnes diplômées à ces réalités. À ce sujet, un répondant en expériences numériques immersives souligne :
— null
De plus, de manière générale, les différents changements technologiques en cours et à venir (déjà abordés dans le chapitre 4) soutiennent la tendance à l’accélération constante du rythme de production, et ce, dans les trois secteurs. Les innovations qui affectent le travail des artistes cherchent à augmenter la quantité de contenu produit, tout en diminuant le temps nécessaire à leur création. En conséquence, on demande aux artistes de tous les métiers et de tous les niveaux de s’adapter rapidement aux rétroactions reçues et d’augmenter l’efficacité de leurs méthodes de travail. Ce contexte rehausse les attentes des recruteuses et des recruteurs quant au niveau de productivité que doit détenir une ou un artiste récemment diplômé, et demande donc aux programmes collégiaux et universitaires de former les étudiantes et les étudiants à travailler rapidement et à s’adapter promptement aux commentaires reçus sur la qualité de leur travail.
Les trois secteurs de l’industrie reposent en grande partie sur les innovations technologiques de pointe et soulignent l’importance de développer davantage les compétences techniques dans les programmes : les étudiantes et étudiants doivent maîtriser les outils actuellement utilisés sur le marché. Cela exige de la part du corps enseignant et des formations offertes une adaptation rapide aux types et au rythme de changements observés dans l’industrie.
Parmi les changements technologiques en cours qui ont une influence sur les compétences à développer chez les étudiantes et les étudiants est l’utilisation de plus en plus importante de logiciels procéduraux. Ceux-ci exigent le développement de compétences mathématiques de la part des artistes, notamment sur les principes de paramètres fonctionnant sous des logiques nodales. Détenir des compétences techniques développées est un critère d’embauche de plus en plus important pour les artistes des entreprises en jeu vidéo (Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 18).
Des professionnelles et professionnels des trois secteurs révèlent l’importance de développer les bases des différents langages de programmation Python, C# et C++ dans les programmes de formation initiale. La maîtrise de ces outils engendrerait des artistes 3D plus autonomes en résolution de problèmes (débogage) et permettrait à ces derniers de s’adapter plus facilement aux changements technologiques à venir. En jeu vidéo, alors que l’on souligne des difficultés d’embauche pour des postes comme ceux d’artiste technique ou de directeur technique, certains répondants et répondantes disent que le développement de programmes de formation orientés davantage sur ce type de compétences techniques permettrait de susciter l’intérêt de la relève étudiante pour ces professions en demande.
L’ensemble des données de l’enquête indique qu’il existe un besoin criant de renforcer la spécialisation des programmes de formation initiale. Toutefois, les niveaux de spécialisation qui devraient être atteints, lorsqu’ils sont précisés par les actrices et acteurs, ne sont pas uniformes.
Dans les trois secteurs couverts, la taille des entreprises influence les besoins en main-d’œuvre et en spécialisation, ce qui fait varier les niveaux recherchés pour décrocher des emplois d’entrée dans les studios.
Les entreprises de grande taille ont une chaîne de production segmentée en départements, ce qui occasionne des demandes en main-d’œuvre très spécialisée (voire surspécialisées). Les candidats qui postulent dans les grands studios doivent avoir développé un niveau de spécialisation suffisant, et donc avoir dépassé le niveau généraliste actuellement visé par de nombreux programmes de formation initiale (dont les formations collégiales) (Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 25; Côté et Pilon 2016, 37, 41). Par exemple, comme l’indique un répondant d’un studio en effets visuels : « maintenant, dans l’industrie, tout le monde est tellement spécialisé qu’on aurait envie de dire à l’école : “vous devriez spécialiser vos étudiants plus tôt, pour qu’ils aient le temps d’apprendre une spécialité assez quand ils sortent du bac” ». Malgré le besoin d’une plus grande spécialisation, les répondantes et répondants de grands studios en effets visuels soulignent tout de même qu’il est essentiel que les étudiantes et étudiants développent une bonne compréhension de l’ensemble des métiers de la chaîne de production afin de saisir la nature et les effets de leur travail sur l’ensemble du projet.
Les entreprises de moyenne et de petite taille cherchent aussi des candidates et des candidats avec un certain niveau de spécialisation, tout en demandant à ces derniers d’être polyvalents afin de maintenir leur employabilité dans les différentes phases des projets. Comme les productions plus modestes impliquent un travail d’équipe multidisciplinaire qui suit les étapes de production (plutôt qu’une organisation en départements), les studios cherchent des candidats qui ont développé un niveau de maîtrise suffisant pour être en mesure de travailler sur l’étape de production qui précède et l’étape qui suit le champ d’expertise que ceux-ci ont choisis. Les données de l’étude soulignent tout de même la nécessité de se démarquer dans un domaine. D’ailleurs, selon un professionnel d’un studio de jeux vidéo, la nécessité de spécialiser les programmes de formation initiale est bien présente, mais ces derniers devraient tout de même viser le développement des compétences propres à plusieurs spécialités afin de garantir l’employabilité de leurs diplômées et diplômés. En se mettant à la place d’une étudiante ou d’un étudiant, il explique :
— null
Le portfolio étant un élément important du processus d’embauche, les participantes et participants indiquent que les personnes qui posent leur candidature pour des postes dans les studios (de toute taille) ont intérêt à orienter leurs réalisations sur les compétences spécialisées du métier pour lequel ils postulent. Les employeurs remarquent que les portfolios des candidats moins expérimentés sont souvent trop généralistes.
La spécialisation des programmes de formation collégiaux fait déjà partie des stratégies d’adéquation formation-emploi de certains cégeps. La plupart des enseignants s’entendent pour dire que l’implantation de voies de spécialisation ou de profils dans le devis ministériel qui inclurait une année de tronc commun serait une avenue souhaitable pour favoriser l’adéquation formation-emploi entre le programme et les besoins actuels et futurs de l’industrie. Par exemple, un enseignant indique : « Il devrait y avoir une espèce de tronc commun obligatoire avec des sections de compétences spécialisées, comme il y en a en informatique ou en technologies de l’information (par exemple, gestionnaire réseau, programmation pour applications mobiles, etc.) ». Offrir un DEC de quatre années plutôt que de trois a parfois été mentionné comme une avenue qui permettrait aux établissements d’enseignement de développer les spécialisations requises à l’employabilité d’un plus grand nombre de finissantes et de finissants dans les postes d’entrée.
— Un professionnel du secteur des expériences numériques immersives
Comme il a été mentionné plus haut, les professionnelles et professionnels des trois secteurs, de même que les enseignantes et enseignants consultés, indiquent souvent que les étudiantes et les étudiants ne sont pas suffisamment en contact avec l’industrie durant leur formation. Les stages et la participation plus soutenue de professionnelles et professionnels de l’industrie dans les programmes de formation initiale (par la supervision de projets et le mentorat) ont été évoqués à maintes reprises comme des moyens à mettre en œuvre pour pallier la situation décrite à la section 5.3.1. Les professionnelles et professionnels ayant bénéficié de stages dans leur formation initiale en vantent les mérites : ils donnent de la valeur aux apprentissages car ils permettent d’effectuer le passage entre les savoirs et les savoir-faire acquis à l’école et les tâches à effectuer sur le marché du travail; ils augmentent la motivation à poursuivre les programmes de formation; ils favorisent le développement des savoir-être et l’apprentissage des procédés, de la chaîne de production et de la culture d’entreprise. La mise en œuvre de stages est aussi soulignée dans la documentation (portant sur l’adéquation formation-emploi) comme une solution à mettre en place afin d’améliorer les programmes de formation (Côté et Pilon 2016, 91; Quintas 2016, 33).
Les bénéfices ont été relevés par l’ensemble des professeures et professeurs dont les programmes de formation intègrent la possibilité de stages au sein de leur cursus. Les enseignantes et enseignants de ces programmes soulignent cependant plusieurs points de friction qui freinent la mise en place d’une alternance travail-étude systématique. Ils évoquent : (i) le manque de temps qu’ils éprouvent déjà pour former adéquatement les étudiantes et les étudiants sur les compétences et les outils; (ii) l’arrimage difficile entre le calendrier scolaire et celui de la production dans les studios; (iii) les contraintes régionales pour les établissements d’enseignement à l’extérieur du Grand Montréal; (iv) la difficulté de mise en place d’un suivi et de l’évaluation des apprentissages réalisés en stages; (v) le manque de maillage personnel entre les enseignantes et enseignants et les studios qui limite les capacités de placement des élèves; (vi) le manque de temps des artistes en entreprise pour accompagner les stagiaires lors de leur stage.
Sur ce dernier point de friction, un répondant travaillant dans le secteur des expériences numériques immersives a formulé une recommandation. Selon lui, les avantages des stages en entreprises sont indéniables, mais, devant la situation, la solution d’adéquation formation-emploi à privilégier par les programmes de formation devrait plutôt être la mise en place de supervision et de mentorat effectués par des professionnelles et professionnels au sein de projets scolaires. Selon lui : « [...] les stages c’est difficile, parce que les expertes et experts n’ont pas le temps. Donc, je pense que c’est du mentorat, c’est plus que des stages. Des stages, c’est si la compagnie a le temps. Mais du mentorat, je pense que c’est ça qui aurait… des tests, des mentorats, des projets ». Ainsi, privilégier le mentorat aurait l’avantage de prendre moins de temps aux expertes et experts en entreprise et de fournir aux étudiantes et étudiants un point de contact avec les milieux de travail. Cette solution est également présentée dans la documentation (voir Quintas 2016)[^3].
[^3]: Peu de professionnelles et professionnels interrogés se sont exprimés sur le sujet, car la faisabilité de la mise en place de stages en entreprise n’a pas été abordée dans le questionnaire d’entretien.
Les points de friction qui nuisent à la mise en place de programmes de formation en adéquation avec les besoins de l’industrie dépassent les éléments soulignés au sujet des difficultés d’implantation des stages. On répertorie des freins au niveau du maillage entre les établissements et les entreprises et entre les établissements collégiaux et universitaires (5.3.3.1); des besoins à combler d’ordre infrastructurel et d’ordre organisationnel (5.3.3.2); et des déficits en formation continue du personnel enseignant des programmes de formation (5.3.3.3).
L’établissement d’un dialogue continu, la mise en place de canaux de communication structurés, ainsi que la planification en amont des programmes en concertation entre les différents acteurs et actrices des entreprises et des établissements d’enseignement seraient la pierre angulaire de l’adéquation souhaitée entre les programmes de formation et les besoins des entreprises (Chambre de commerce du Montréal métropolitain 2018, 49; KPMG 2017, 25‑26; Corbeil, Malouin et Khamassi 2016, 19; Côté et Pilon 2016, 90; Quintas 2016, 33).
Toutefois, la mise en place de ces mesures rencontre des limitations et des frictions soulignées de part et d’autre. Selon l’ensemble des données de l’enquête :
— null
— null
Quelques enseignantes et enseignants des établissements d’enseignement collégiaux ont rapporté le besoin de concertation entre les compétences enseignées dans leur programme et le niveau de celles qui sont développées dans les programmes de baccalauréat. Ils signalent le besoin de mieux définir les rôles de la formation collégiale et ceux de la formation universitaire. Par exemple, comme l’exprime un enseignant du programme DEC Techniques d’animation 3D et de synthèse d’images :
— null
Plusieurs enseignantes et enseignants de niveau collégial soutiennent que les établissements d’enseignement ne disposent actuellement pas du budget ou de l’espace nécessaires pour renouveler suffisamment fréquemment leur parc technologique et mettre en place des laboratoires spécialisés, notamment en capture de mouvement, en photogrammétrie ou encore en production virtuelle. Ces installations très coûteuses demandent l’achat d’équipements de pointe, comme des dispositifs de suivi, des numériseurs, des écrans et des ordinateurs performants en nombre suffisant. Ces enjeux ne semblent pas aussi criants dans les universités. Peu de professeures et professeurs universitaires ont mentionné le manque de ressources et de technologies de pointe comme difficultés d’adéquation formation-emploi de leurs programmes.
— Enseignant du DEC Techniques d’animation 3D et de synthèse d’images
La majorité des personnes enseignantes interrogées ont souligné que l’embauche de professionnelles et de professionnels des studios était l’une des stratégies les plus utilisées pour l’adéquation de leur formation avec le marché du travail. Les frictions d’embauche de ressources professionnelles sont des freins notoires à la mise à jour des contenus des formations, car elles limitent les contacts entre les programmes collégiaux et universitaires avec les réalités du travail en entreprise.
Un grand nombre d’enseignantes et d’enseignants collégiaux déplorent les salaires non compétitifs offerts au corps enseignant. Selon ces derniers, il s’agit d’un frein important pour le recrutement de nouvelles ressources issues du milieu de l’entreprise, particulièrement des formatrices et des formateurs dont les compétences sont spécialisées. Quelques enseignantes et enseignants de niveau collégial font état des difficultés de rétention des chargés de cours et des enseignants, car les cours spécialisés que ceux-ci sont appelés à enseigner ne sont pas en nombre suffisant pour permettre aux personnes concernées d’enseigner à temps plein.
Les freins à l’embauche d’enseignantes et d’enseignants issus de l’industrie ont aussi été abordés par certains professeurs et professeures universitaires. Ils et elles soulignent la rigidité administrative des critères d’embauches qui nuisent au recrutement d’expertes et d’experts professionnels comme professeures et professeurs invités ou comme chargées et chargés de cours. Par exemple, un professeur révèle : « Nous on aimerait avoir plus de professeurs invités, mais on a des modalités de l’Université qui nous empêchent d’inviter, par exemple, un monteur à donner un cours ».
Bien que cet enjeu ne soit pas partagé par tous les établissements, un bon nombre de professeures et professeurs collégiaux et universitaires ont reproché la lourdeur administrative qui limite l’adoption rapide de changements de leur programme (que ce soit au niveau de leur contenu ou de leur structure pédagogique). Par exemple, selon un enseignant de niveau collégial :
— null
Dans un contexte où les changements technologiques et organisationnels dans les entreprises sont continuels, fréquents et rapides, plusieurs jugent essentiel pour les programmes de formation de réformer le système de validation des changements pour que ces derniers soient plus rapides afin de réduire le décalage entre les formations et les réalités des entreprises.
Les enseignantes et les enseignants collégiaux indiquent que les ressources en infrastructures organisationnelles et la quantité de travail quotidien qu’ils doivent effectuer nuisent à l’accessibilité du perfectionnement et de la mise à jour de leurs compétences. Cette situation a des conséquences directes sur leur capacité à adapter le contenu de leurs cours aux besoins, aux nouvelles technologies et aux pratiques changeantes de l’industrie. Selon l’ensemble des enseignants des cégeps interviewés dans le cadre de l’enquête, le manque de temps et de possibilités de mentorat ou de coaching sont les principaux freins à l’adéquation formation-emploi de leur programme d’études. Cette situation a peu souvent été soulevée par les professeures et professeurs d’université.
Les enseignantes et enseignants des cégeps disent qu’il est difficile de dégager du temps pour mettre à jour leur pratique et l’apprentissage de nouveaux logiciels. Ce manque de flexibilité accentue le décalage entre l’adoption de nouveaux outils par les studios et la maîtrise suffisante de ces derniers pour les enseigner aux élèves de leur programme. Elles et ils expriment aussi, à l’unanimité, un besoin de mentorat et déplorent de ne pas avoir la possibilité d’entrer en contact en continu avec des personnes-ressources dans différentes entreprises. Ces enjeux sont moins criants pour les personnes enseignantes qui possèdent un vaste réseau de contacts personnels.
Afin de pallier cette situation, la majorité des participantes et participants ont évoqué la mise en place de stages pour enseignantes et enseignants : elles et ils désirent être dégagés de leurs tâches d’enseignement en raison d’une journée (ou plus) par semaine, afin d’intégrer des productions dans les studios, et ce, de manière continue. Cette mesure leur permettrait de maintenir leurs compétences à jour, en plus d’établir des canaux de communication pérennes entre leur établissement et les entreprises, de sorte que les informations sur les besoins de ces dernières puissent circuler plus facilement. Certains enseignants et enseignantes soutiennent qu’il serait également nécessaire d’avoir accès à des personnes-ressources dans différents studios pour les mêmes raisons. Par exemple, au sujet de l’intégration des professeures et professeurs dans les productions en entreprises, un enseignant s’exprime ainsi : « J'aimerais me faire dégager [de charges d’enseignement] pour aller travailler dans une entreprise sur des vraies shots et me faire coacher, par exemple, une journée par semaine pendant une session, mais il faut être dégagé pour ça. L'ensemble des profs aurait besoin de ça ».
Les besoins en recrutement touchent principalement les postes intermédiaires et séniors qui demandent de nombreuses années d’expérience et le développement de compétences en gestion (qu’elles soient en gestion de projets ou d’équipes). Les postes pour lesquels les employeurs évoquent des difficultés d’embauche sont différents pour les trois secteurs. Le tableau suivant rassemble les données recueillies par les répondantes et les répondants et dans la documentation disponible[^1].
[^1]: Les besoins en main-d'œuvre rassemblés dans ce tableau sont le reflet des besoins mentionnés au moment de la collecte de données (réalisée entre avril 2020 et mars 2021). D’autres besoins en main-d'œuvre peuvent ne pas avoir été rassemblés dans ce tableau et d’autres besoins peuvent s’être manifestés depuis.
En observant les données du tableau, on conclut que les profils d’emploi recherchés prioritairement ne sont pas à la portée des diplômées et diplômés des programmes d’étude ciblés dans l’enquête, car ils ne sont pas des postes d’entrée, ou ils nécessitent des études dans d’autres domaines, comme le génie informatique.
Le rapport distingue deux types de besoins recensés dans les résultats de l’enquête : (i) des besoins de l’ordre des connaissances et des compétences à développer et (ii) des besoins de l’ordre de la structure pédagogique des programmes.
Les résultats de l’enquête insistent sur des lacunes de l’ordre des connaissances des étudiantes et des étudiants portant sur les structures organisationnelles des entreprises (de leur chaîne d’opérations), de même que des modèles d’affaires. Développer une compréhension des différents types de production des trois secteurs (dont les expériences numériques immersives) et enseigner les bases de la gestion budgétaire d’une production aux étudiantes et aux étudiants ont été identifiés comme des manques à combler par certains professionnels et professionnelles.
Les habiletés interpersonnelles : les professionnelles et professionnels ont particulièrement insisté sur les aptitudes liées aux compétences comportementales lorsqu’il était à la fois question d’identifier les compétences essentielles à l’exercice des métiers graphiques 2D et 3D et d’identifier les besoins à combler en formation initiale. Parmi les aptitudes les plus fréquemment mentionnées, on retrouve : la capacité d’adaptation, la collaboration et le travail d’équipe, l’esprit d’analyse, l’intelligence émotionnelle et l’empathie et la communication, dont la capacité à recevoir et donner des rétroactions et la gestion du stress.
Les aptitudes artistiques : les compétences artistiques liées aux différentes fonctions de travail (dessin, anatomie, mouvement, etc.), la maîtrise artistique des logiciels de création (plutôt que la seule maîtrise technique), le sens de l’observation (œil artistique) et la recherche et l’interprétation d’images de référence.
Les compétences techniques : la maîtrise d’outils actuellement employés dans les différents secteurs de l’industrie, notamment les logiciels procéduraux qui nécessitent des connaissances mathématiques pour comprendre la logique nodale de ces outils; les langages de programmation (Python, C#, C++) afin de permettre aux artistes d’être plus autonomes (débogage) et susciter l’intérêt de la relève pour des métiers en demande (comme artiste technique).
On souligne aussi un fort besoin de renforcement de la spécialisation des étudiantes et des étudiants : les résultats de l’enquête suggèrent que l’établissement de voies ou de profils de spécialisation d’au moins deux ans à la suite d’une année de tronc commun et d’allonger le programme d’une année (passant ainsi de 3 à 4 ans) seraient des avenues à privilégier pour développer le niveau de compétence attendu pour l’intégration au marché du travail.
On remarque aussi qu’il est nécessaire pour les étudiantes et les étudiants d’avoir des contacts plus fréquents avec la réalité des entreprises, ce qui diminuerait l’écart entre les apprentissages réalisés à l’école et les tâches à accomplir en milieu de travail. Les solutions évoquées par les différents acteurs et actrices sont : l’implantation de stages tout au long de la formation et la mise en place d’un service de mentorat ou de supervision de projets offerts par les studios.
Plusieurs aspects qui limitent la capacité d’adaptation des programmes d’études collégiales et universitaires de premier cycle avec les besoins des entreprises des trois secteurs ont été mentionnés :
À la lumière des résultats de la revue documentaire, des informations obtenues de la part des professionnelles et professionnels des trois secteurs ayant participé à l’enquête, ainsi que des enseignantes et enseignants des programmes collégiaux et universitaires menant vers les métiers graphiques 2D et 3D, ce rapport retient les aspects suivants :
Les entreprises des trois secteurs de la création numérique ciblés dans l’étude connaissent une forte demande en main-d’œuvre qu’elles peinent à pourvoir avec le bassin actuel de professionnelles et professionnels qualifiés de la province. Toutefois, les postes avancés pour lesquels les difficultés de recrutement sont les plus importantes ne sont pas à la portée de finissantes et de finissants des programmes de formation collégiaux et universitaires.
Les résultats des sondages réalisés auprès des ressources humaines d’entreprises stratégiques des trois secteurs démontrent que des entreprises de toute taille embauchent des diplômées et diplômés des programmes ciblés par l’enquête pour des postes d’entrée et juniors.
Les résultats de la revue documentaire et des entretiens démontrent qu’un niveau assez variable de spécialisation est nécessaire à l’embauche pour ces postes selon la taille des entreprises et l’organisation de leurs chaînes de production. À cela s’ajoutent les changements technologiques et organisationnels constants et rapides des studios qui influencent les attentes des employeurs quant au niveau de maîtrise des disciplines artistiques que doivent détenir les postulantes et les postulants. Ce niveau peut varier d’un studio à l’autre. En général, les entreprises de toute taille soulignent qu’elles cherchent à engager des profils particuliers et s’attendent à ce que les compétences associées à ces derniers soient mises en valeur dans le portfolio de la candidate ou du candidat qui postule.
La qualité technique et la qualité artistique du portfolio ainsi que les compétences comportementales des candidates et des candidats ont été identifiées comme les éléments les plus importants considérés par les recruteuses et les recruteurs.
Les changements technologiques ont des impacts majeurs sur l’ensemble des maillons de la chaîne de production sur : la structure organisationnelle des entreprises; les tâches et les responsabilités des métiers et les compétences essentielles à leur réalisation; et les modèles d’affaires des organisations. On retient de l’ensemble de ces changements une propension à la vitesse croissante du rythme de production : allant de l’accélération de la vitesse d’exécution des tâches artistiques à la quantité sans cesse grandissante de contenus à produire. La recherche d’optimisation et d’efficacité est constante et a deux conséquences : l’automatisation de plus en plus présente des tâches manuelles non artistiques; et l’intégration d’outils permettant la génération procédurale de contenus numériques dans les processus de production.
Ces changements technologiques et organisationnels qui s’installent ont et continueront d’avoir une influence directe sur l’exercice des métiers et sur les compétences associées aux postes d’entrée et juniors visés par les programmes collégiaux et universitaires. Les transformations à surveiller sont :
Dans les prochaines années, l’intelligence artificielle va permettre d’automatiser de plus en plus les tâches répétitives simples comme la rotoscopie, les suivis de mouvement et de caméra (tracking et matchmove), certaines tâches d’animation et de composition, etc. Elle permettra aussi une plus grande part de création assistée. La mise en œuvre de ces nouvelles technologies exigera des compétences transversales accrues en collaboration afin de permettre le travail en équipes multidisciplinaires, alliant artistes, programmeurs et développeurs de ces nouveaux outils.
À terme, les compétences les plus recherchées seront la capacité à développer une vision artistique, la capacité d’analyser des images et le sens de l’observation (œil artistique). Les développements en intelligence artificielle et leur rapidité d’implantation dans l’ensemble des entreprises de toute taille et de tout secteur sont, toutefois, difficiles à prévoir.
En expériences numériques, notamment en réalité virtuelle, l’utilisation des moteurs de jeu devient incontournable. Ainsi, apprendre à utiliser ces outils devient de plus en plus important, même au niveau des postes d’entrée et juniors, tous secteurs confondus.
Les besoins à combler pour l’offre de formation initiale vont de pair avec les constats quant aux exigences d’embauche des postes d’entrée et juniors, l’influence des changements technologiques sur les compétences et les pratiques des métiers graphiques 2D et 3D. Ces besoins sont les suivants :
Le décalage entre l’offre de formation initiale et les besoins en entreprise a des causes multiples et complexes. À la lumière des réponses des intervenantes et intervenants, voici les points de friction que l’on relève :
Ce rapport propose des pistes de réflexion qui pourraient renforcer l’adéquation formation-emploi entre les programmes de formation collégiale et universitaire et les entreprises des trois secteurs ciblés. La collaboration, la concertation et la complémentarité entre les cégeps, les universités et SYNTHÈSE sont encouragées afin d’explorer ces idées.
Les pistes de réflexion sont les suivantes:
Envisager la possibilité de développer des profils de spécialisation ou des concentrations spécifiquement conçus pour les différentes fonctions de travail accessibles aux diplômées et diplômés des programmes collégiaux et universitaires ciblés. Les données de l'enquête ont souvent évoqué que d’offrir une première année en tronc commun, pour ensuite développer une spécialisation lors des deux dernières années pourrait améliorer l’adéquation formation-emploi entre les programmes et le seuil d’entrée des entreprises. Cela permettrait aux étudiantes et aux étudiants de développer davantage les compétences artistiques et techniques nécessaires à leur employabilité pour la spécialisation choisie, tout en conservant une connaissance transversale et généraliste des autres étapes de production.
Valoriser les stages en entreprise : les apprentissages réalisés sur le marché du travail permettraient aux étudiantes et étudiants, entre autres, de se familiariser avec les processus de production et les flux de travail, de même que de développer les savoir-être inhérents à leur travail et à l’intégration d’une équipe en contexte d’apprentissage authentique. Cette valorisation de stages pourrait se faire par une transformation des formations collégiales et universitaires de premier cycle en programme d’alternance travail-études (ATE), permettant aux étudiantes et aux étudiants d’acquérir une expérience de travail rémunérée de 6 à 12 mois, de s’accoutumer aux réalités du marché du travail et à ses transformations. Pour que la mise en place de tels programmes soit possible, les studios des trois secteurs devront collaborer davantage à la formation de la relève, en concertation avec les établissements d'enseignement. En complément, le développement d’une plateforme de maillage entre les établissements d’enseignement supérieur et les entreprises spécifiquement conçue pour la création graphique 2D et 3D pourrait rendre les stages plus accessibles aux étudiantes et aux étudiants des programmes ciblés dans cette enquête.
Aborder les connaissances et les méthodes de travail propres aux trois secteurs : des effets visuels et de l’animation, du jeu vidéo et des expériences numériques immersives. Il faudrait une meilleure représentation des trois secteurs au sein de l’offre de formation initiale actuellement disponible. Deux pistes de solutions pourraient être explorées avec les institutions d’enseignements: i) adapter la structure des programmes existants afin d’aborder la création numérique 2D et 3D au sens large (incluant les exigences des trois secteurs); ii) créer de nouveaux programmes de formations spécialisés pour chacun des secteurs, notamment en développant de nouvelles offres de formation pour le secteur des expériences numériques immersives.
Développer des canaux de communication et des activités de maillage structurées afin d’homogénéiser l’accès aux informations des entreprises des trois secteurs pour les établissements collégiaux et universitaires. L’organisation de stages continus en entreprise et du mentorat pour les enseignantes et les enseignants des institutions d’enseignement supérieur développerait une communication plus soutenue avec les milieux de travail et, du même coup, permettrait le perfectionnement et la mise à jour des compétences du corps enseignant sur les outils et les pratiques des studios.
Développer un centre de technologies en expérimentation qui serait partagé par les institutions d’enseignement (cégeps et universités) et les entreprises afin d’élargir de façon importante l’accès aux laboratoires, aux équipements et aux technologies de pointe. Grâce à cette solution qui mettrait ces ressources toujours actualisées à la portée de tous et toutes, il n’y aurait aucun besoin de munir chaque établissement d’enseignement de laboratoires spécialisés en capture de mouvement, en photogrammétrie ou en production virtuelle (virtual production). La mise en place d’un tel laboratoire permettrait également la collaboration de ces organisations au sein de projets de recherche, notamment en intelligence artificielle, dont tous les acteurs en création numérique pourraient bénéficier.
Acfas. s. d. « Recherche-création | Acfas ». Consulté le 28 juin 2021.
Anderson, Martin. 2019. « A Comprehensive Guide to the State-of-Art in How AI is Transforming the Visual Effects (VFX) Industry ». Ross Dawson (blogue). 2019.
Ashton, Kelly Lynne, Laura Beeston, Amber Dowling, Catherine Dulude, Joseph Elfassi, Zena Harris, Andrew Robinson, et al. 2021. « Reprendre, autrement: Rapport annuel sur les tendances dans l’industrie audiovisuelle ». Rapport Technique. Fonds des médias du Canada.
Audureau, William. 2019. « Notre-Dame de Paris : les reconstitutions en 3D peuvent aider à la reconstruction ». Le Monde.fr, 16 avril 2019.
Barron, Craig, Mariana Acuna Acosta, Richard Kidd, et Jeff Barnes. 2018. « Transforming Skills: VFX to VR - Part 2 ». Panel de discussion présenté à Visual Effects Society LA Section Vision Committee, Los Angeles, 18 mars 2018.
Bédard, Philippe. 2020. « Le temps réel s’invite au cinéma ». SYNTHÈSE – Pôle Image Québec. 25 mai 2020.
Bell, Marc, et Stéphanie Marchand. 2021. « 5G & jeu vidéo / 5G & Gaming ». Webinaire, En ligne, 27 janvier 2021.
Bureau du cinéma et de la télévision du Québec. 2021a. « Bilan d’activité 2020-2021 ». Rapport Technique. Bureau du cinéma et de la télévision du Québec (BCTQ).
———. 2021b. « Statistiques 2020 - VFX et animation : rémunération et emplois ». Rapport Technique. Bureau du cinéma et de la télévision du Québec.
———. À paraître. « Impact de l’intelligence artificielle sur la main-d’œuvre en effets visuels et en animation: état des lieux et plan d’action - Symposium IA | VFX 2021 ». Bureau du cinéma et de la télévision du Québec
———. s. d. « Lexique 3D ». Consulté le 13 octobre 2021.
Carmignani, Stephan, Jonathan Abenhaim, et Osama Dorias. 2020. « Du portfolio à l’entrevue : les secrets des gestionnaires embaucheurs ». Webinaire présenté à MEGAMIGS MONTRÉAL - volet Formations et carrières, En ligne, 25 septembre 2020.
Chambre de commerce du Montréal métropolitain. 2018. « Industries créatives : réussir dans un environnement en mutation rapide ». Rapport Technique. Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM), KPMG.
Chancey, Christopher, Dany Ayoub, Marion Guignolle, et Simon Forget. 2020. « Découvrir les « autres » métiers en jeu vidéo ». Webinaire présenté à MEGAMIGS MONTRÉAL - volet Formations et carrières, 25 septembre 2020.
Compétence Culture, et Suzanne Dion. 2018. « Étude des besoins de formation des clientèles des chaînes des arts visuels, des arts médiatiques et des arts interdisciplinaires ». Rapport Technique. Compétence Culture.
Corbeil, Vincent, Jean-François Malouin, et Refka Khamassi. 2016. « Profil de la main-d’œuvre dans l’industrie du jeu électronique au Québec en 2016 ». Rapport Technique. TECHNOCompétences.
Corniou, Marine. 2020. « Qu’est-ce que la 5G? » Québec Science, 2 avril 2020.
Côté, Line, et Sylvianne Pilon. 2016. « Diagnostic des besoins de main-d’œuvre et d’adéquation formation-emploi : Secteur des effets visuels et animation ». Rapport Technique. Conseil emploi métropole, BCTQ.
Côté, Line, Maryse Tremblay, et Sylvie Lasser. 2017. « Étude triennale des besoins en formation continue dans le secteur de l’audiovisuel 2017-2020 ». Rapport Technique. En ligne: L’inis, RH Conseil.
Cutean, Alexandra, Rosnia Hamoni, Ryan McLaughlin, et Zhenzhen Ye. 2019. « Tendance de croissance au Canada : Aperçu des talents numériques pour 2023 ». Rapport Technique. Ottawa, Canada: Le Conseil des technologies de l’information et des communications (CTIC).
Dagenais, Olivier, Jean-François Malouin, et Dominic Arsenault. 2017. « Le jeu vidéo comme vecteur de développement économique et de rayonnement culturel pour le Québec ». Mémoire. La Guilde des développeurs de jeux vidéo indépendants du Québec.
Emploi Québec. 2021. « Explorer des métiers et des professions ». Emploi Québec. 2021.
Farmer, Tyler, et Mairead Matthews. 2020. « Franchir la frontière virtuelle : L’écosystème des technologies immersives du Canada ». Rapport Technique. Ottawa, Canada : Conseil des technologies de l’information et des communications (CTIC).
Forum Numix. 2021. « ForumNumix - Synthèse générale des enjeux et recommandations ».
Foundry. 2020. « Machine Learning for Artists: The Latest Trends ». Foundry (blogue). 5 août 2020.
Fragata, Yuani, Francis Gosselin, et Danielle Desjardins. 2018. « Premier profil de l’industrie de la créativité numérique au Québec ». Rapport Technique. Xn Québec.
GlobalData. 2021. « Mobile Gaming - Thematic Research ». GlobalData Report Store (blogue). Juin 2021.
Godin, Dany, Guillaume Roux-Girard, Jean-Pierre Flayeux, Jean-Philippe Boisvert, et Sébastien Savard. 2020. « Game Development Praxiography: A Methodological Approach to Setup a Knowledge Brokering Pipeline Between Higher Education Institutions and the Game Development Industry ». The Computer Games Journal 9 (1): 15‑27.
Gwertzman, James. 2020. « The Future of Cloud in Gaming ». Webinaire présenté à MEGAMIGS PRO 2020, En ligne, 12 novembre 2020.
Gwertzman, James, et Crystin Cox. 2019. « The Art of LiveOps - Game Designer: Raph Koster ». Audio. The Art of LiveOps. Consulté le 1er juin 2021.
Jacquier, Yves, Jean-François Larouche, et Guillaume Chalifoux. 2021. « Culture d’innovation avec Moment Factory, Ubisoft, La Forge et GSoft ». Webinaire, En ligne.
Jobin, Gilles, Matthieu Larivée, Alexandre Simionescu, Alexandre Teodoresco, et Jenny Thibeault. 2021. « La scénographie augmentée: Comment maximiser les partenariats entre les artisans et les studios technologiques ? » Webinaire présenté à Forum Numix, En ligne, 6 avril 2021.
KPMG. 2017. « Mise en place d’une grappe du jeu vidéo pour créer encore plus de valeur au Québec ». Rapport Technique. KPMG, Comité consultatif sur le développement de l’industrie québécoise du jeu vidéo.
La Guilde du jeu vidéo du Québec. 2021. « L’industrie québécoise des jeux vidéo : Une force présente et montante ». Les affaires, 18 mai 2021.
Lockyer, Michael. 2021. « How Deep Learning Can Accelerate Video Game Art Content Creation ». Webinaire présenté à Semaine numériQC - SNQC21, En ligne, 13 avril 2021.
Marchand, Stéphanie, Benjamin Denis, Jimmy Gendron, Stéphane Rituit, Jean-Philippe Desjardins, et Jonathan Rouxel. 2021. « Jeux vidéo, expérientiel et 5G : menace ou opportunités ? » Webinaire, En ligne, 23 février 2021.
Mathys, Catherine, Pierre Tanguay, Sabrina Dubé-Morneau, et Laurianne Désormiers. 2019. « On se prend la main: Rapport annuel sur les tendances dans l’industrie audiovisuelle ». Rapport Technique. Fonds des médias du Canada.
McLaughlin, Ryan, et Trevor Quan. 2019. « L’ère de demain : La main-d’œuvre amplifiée par l’intelligence artificielle du Canada ». Rapport Technique. Ottawa, Canada: Conseil des technologies de l’information et des communications (CTIC).
Montréal International. 2021. « Effets visuels : une industrie en plein essor dans le Grand Montréal ».
Morriet, Oriane. 2019. « Exemples d’œuvres conciliant et réconciliant histoire et interactivité en réalité virtuelle ». Le Lien MULTIMÉDIA : le portail des professionnels du numérique au Québec, 5 septembre 2019.
Mouvement économique métropolitain Relançons MTL. 2020. « Plan d’action pour renforcer les industries culturelles et créatives ». Rapport Technique. Chambre de commerce du Montréal métropolitain, BCTQ, Culture Montréal, La Guilde du jeu vidéo du Québec, KPMG.
Naud, Patrick, Matthieu Dupont, et Alexandre Thabet. 2020. « Panel des chefs de studio: Montréal, ville mobile ». Webinaire présenté à MEGAMIGS - PRO 2020, En ligne, 12 novembre.
Office québécois de la langue française. 2020. « Vocabulaire des métiers du jeu vidéo ». Office québécois de la langue française. 21 décembre 2020.
Pennington, Adrian. 2019. « How AI Is Reinventing Visual Effects ». IBC (blogue). 4 juillet 2019.
Pixar. 2021. « Introduction to USD ». Manuel d’instruction. 16 avril 2021.
Poirier, Raymond. 2021. « Quand la réalité augmentée et virtuelle va à la rencontre de l’histoire et de la littérature : Retour d’expériences, entre Limoilou et Montcalm ». Webinaire présenté à Semaine numériQC - SNQC21, En ligne, 12 avril.
Prabu. 2020. « Will a Robot Take my Job? – The Age of Artificial Intelligence ». Vfxexpress (blogue). 13 décembre 2020.
Québecor. 2020. « MELS prend un virage technologique et lance son tout nouveau plateau de production virtuelle ». 14 octobre 2020.
Quintas, Eva. 2016. « Comprendre et valoriser l’écosystème montréalais de la créativité numérique : un levier pour le développement local et le rayonnement international de la métropole ». Printemps numérique.
Richard, Xavier K. 2019. « Tendances sur la XR au Québec ». Québec / Canada XR (blogue). 19 août 2019.
Roble, Doug, Sarah Watling, Paul Salvini, et Morgan McGuire. 2021. « Symposium VFX-IA 2021 : Panel d’ouverture ». Webinaire présenté à Symposium VFX-IA 2021, En ligne, 28 avril.
Syndicat national du jeu vidéo. 2020. « Référentiel des métiers du jeu vidéo, 3ème édition augmentée ». Syndicat national du jeu vidéo.
SYNTHÈSE – Pôle Image Québec. 2020. « Les métiers de la créativité numérique ». SYNTHÈSE – Pôle Image Québec. 2020.
SYNTHÈSE – Pôle Image Québec. 2021. « Stratégie québécoise de recherche et innovation 2022 ». Mémoire.
Ubisoft La Forge. 2020. « Introduction à la sélection apprise de mouvement ». Ubisoft Montréal (blogue). 31 juillet 2020.
Valente, Clément. 2018. « Capture 3D par photogrammétrie ». Méthodes BTP. 10 décembre 2018.
Wikipedia. 2020. « Affordance ». In Wikipédia.
Xn Québec et Habo. 2021. « Portrait de l’industrie et retombées économiques des secteurs ». Rapport Technique. Xn Québec.
Animateur / Animatrice (2D ou 3D)
L’animateur ou animatrice anime les objets, personnages et décors d’une image 2D ou 3D.
Il ou elle dote ces éléments de mouvements et les faitt agir selon les paramètres techniques, la scénarisation et la conception du jeu (gameplay).
Note : le travail des animateurs et animatrices s’effectue après celui des artistes qui créent les objets, personnages et décors, dont les modeleurs ou modeleuses, par exemple.
Artiste 2D
Expression générale qui désigne les professionnels et professionnelles œuvrant dans le domaine de l’animation 2D.
Le travail de l’artiste 2D est de créer et d'animer des images (environnements, objets et personnages) dans un espace bidimensionnel.
On retrouve ce type d’animation principalement dans les dessins animés et les jeux vidéo.
Artiste 3D
Expression générale qui désigne les professionnels et professionnelles œuvrant dans le domaine de l’animation 3D.
Le travail de l’artiste 3D est de créer et d'animer des images (environnements, objets et personnages) dans un espace tridimensionnel.
Les images 3D se retrouvent dans les animations, les jeux vidéo et les effets spéciaux, mais elles sont aussi présentes dans les expériences numériques immersives.
L’artiste 3D peut aussi désigner un ou une « généraliste » maîtrisant plus d'une facette du travail d'animation et apte à travailler dans plus d’un secteur (modélisation, texturisation, composition, etc.).
Artiste 3D chevelure-pelage / Modeleur / Modeleuse chevelure-pelage (Grooming)
Cet artiste a la charge spécifique de créer la chevelure, le pelage ou les poils virtuels qui se trouvent sur un modèle 3D.
Note : L’emprunt à l’anglais « grooming » est courant pour désigner cette partie de l’animation.
Artiste en éclairage et composition d’image (Lighting and Compositing ou Lookdev Artist)
L’artiste en éclairage et composition d’image est responsable à la fois de la création d’images, mais aussi de l’éclairage et de l’ombrage des éléments visuels d’un projet d’animation 3D.
Il ou elle s’assure que chaque plan est éclairé correctement afin que l’ensemble des images soit visuellement cohérent.
Artiste CFX (Creature or Character FX)
L’artiste CFX crée des effets de simulations de textures, comme des tissus, des fluides ou d’autres textures organiques (bave, poils, chevelure, pelage, etc.) afin de reproduire des effets spéciaux propres à certaines créatures comme des monstres ou des animaux.
Note : CFX peut vouloir dire Creature FX ou Character FX.
Artiste concepteur / conceptrice (Concept Artist)
L’artiste concepteur ou artiste conceptrice est chargé de la conceptualisation des éléments visuels qui composent un film à l’aide d’illustrations détaillées.
Il ou elle conçoit et dessine des personnages, des environnements et des objets 2D et 3D.
Note : les choix esthétiques issus de la conceptualisation déterminent notamment les références données aux artistes responsables des décors, des costumes, des accessoires, du maquillage et de l’éclairage.
Dans le secteur du jeu :
Artiste d’environnement 3D (Digital Matte Painter)
L’artiste d’environnement 3D (ou digital matte painter) est responsable de la création des environnements 2D et 3D qui finalisent la composition d’un plan.
Il ou elle crée les paysages numériques destinés à servir de décors et d’arrière-plans en construisant des environnements 3D hautement artistiques qui sont visuellement très réalistes.
Dans le secteur des effets visuels :
Artiste de textures / Textureur / Textureuse
L’artiste de textures, parfois désigné en tant qu’artiste de textures et surfaces, est responsable de la conception de textures et surfaces des modèles de personnages, de décors, de véhicules et d’accessoires en 3D.
Il ou elle utilise des techniques d’habillage, de géométrie et de modélisation pour appliquer des textures sur les objets dont la surface est particulière (brillance, transparence, relief, etc.).
Pour ce faire, il ou elle utilise les moteurs de rendu d’images utilisés dans des logiciels tels que Photoshop, 3ds Max, Maya, Mari, Substance Painter et autres outils de rendu en temps réel.
Artiste FX
Le terme artiste FX désigne de manière générale les professions liées à la création des effets spéciaux des films et jeux vidéo.
L’artiste FX est généralement responsable des effets de simulation d’éléments tels que le feu, les liquides, la fumée et autres.
Les techniques de simulation utilisées par les artistes FX permettent d’animer de manière naturelle un grand nombre de petits éléments qu’il serait autrement impossible d’animer individuellement.
Artiste en composition d'images (Compositing)
L’artiste en composition d’images (ou compositing artist) assemble plusieurs couches d’images (éléments 2D, 3D, particules, couches de lumières, personnages animés) afin de composer un plan complet qui sera intégré dans le montage final.
De plus, puisqu’un plan est constitué de plusieurs couches, l’artiste en composition doit aussi valider les espaces de couleurs pour chacun des plans afin d’assurer une cohérence visuelle.
Note : L’étape de composition est cruciale en effets visuels car elle permet de visualiser le résultat final d’un plan ou d'une scène.
Artiste en rotoscopie (Roto-Paint)
L’artiste en rotoscopie isole et découpe les éléments dans une image filmée pour les intégrer dans les logiciels de traitement de l’image numérique.
La rotoscopie consiste à découper un objet, image par image, d’un plan.
Il s’agit d'une technique qui permet d’intervenir sur les éléments graphiques filmés sans affecter le reste de l’image ou du plan.
Note : cette technique est également utilisée en animation traditionnelle 2D pour animer des illustrations.
Artiste en modélisation / Modeleur / Modeleuse
Travaillant de concert avec un directeur ou une directrice artistique, l’artiste en modélisation crée les modèles tridimensionnels de différents objets architecturaux, d’environnements, de topologies géographiques, d’animaux et d’humains.
Souvent appelé modeleur, ou modeleuse, l’artiste en modélisation est également responsable de la préparation des meshes nécessaires à la création de squelettes et des blend shapes qui servent à l’animation faciale. Ainsi, il ou elle participe à la conception et la production d’images de synthèse grâce à la maîtrise d’outils de création et de conception 3D, réalise l’ossature des objets pour la mise en volume et met en forme et en volume les différents éléments.
Artiste numérique
Terme générique pour désigner les artistes qui produisent des images numériques.
Artiste en prévisualisation
L’artiste en prévisualisation crée une image sommaire d’un plan à filmer de manière à en donner une image avant de la tourner. Cette image intègre les angles et mouvements de caméra, les cadrages ainsi que les objets 2D ou 3D qui y seront présents. Il ou elle travaille de très près avec l’artiste de scénarimage (scénarimagiste) et le réalisateur ou la réalisatrice.
Note : la prévisualisation sert surtout à illustrer comment les objets 3D seront intégrés dans le résultat final.
Artiste de scénarimage / Scénarimagiste (Storyboard Artist)
L’artiste de scénarimage, aussi appelé scénarimagiste, storyboardeur ou storyboardeuse, met les plans du film en image afin de représenter le scénario d’une œuvre cinématographique.
En collaboration avec le réalisateur ou la réalisatrice, il ou elle met en scène les détails esthétiques qui constituent un plan dans un document appelé le scénarimage (storyboard).
Ainsi, il ou elle illustre les éléments de chaque plan (cadrages, mouvements de caméra, décors (construits ou virtuels), personnages, actions des personnages) à l'aide de dessins (nommés planches).
Note : cette pratique est commune (et essentielle) à tous les domaines qui se rapportent à la création d'images en mouvements (cinéma, jeu, animation, etc.).
Artiste technique
L’artiste technique travaille en collaboration avec l’équipe de production artistique et les programmeuses et programmeurs afin de concevoir des méthodes de travail et des outils qui répondent aux besoins de qualité artistique et technique.
Il ou elle conçoit les outils logiciels permettant de structurer une chaîne de production efficace, qui prend en compte toutes les disciplines artistiques et techniques impliquées dans le processus créatif.
Dans le secteur du jeu :
Artiste en suivi de mouvement (Tracking & Matchmove)
L’artiste en suivi de mouvement, ou artiste tracking/matchmove, recrée le mouvement de la caméra filmé sur un plateau dans un environnement logiciel afin d’intégrer des objets 3D aux images filmées.
Il ou elle fait l’extraction de données relatives aux mouvements des objets par rapport à la caméra dans une prise de vue. (Les données de suivi de mouvement permettent de déterminer avec précision la position des éléments virtuels par rapport aux éléments réels).
Note : les techniques de suivi de mouvements ne doivent pas être confondues avec les techniques de capture de mouvement (motion capture ou mocap), permettant d’enregistrer les positions et les mouvements d’objets ou d’êtres vivants, pour ensuite reproduire ceux-ci dans un environnement virtuel.
Artiste visualisation / suivi (Layout / Tracking)
L’artiste visualisation/suivi (layout/tracking) recrée les lieux, les objets et les mouvements de caméra d’un plan à l’intérieur d’un logiciel d’environnement 3D afin de reproduire l’environnement réel d'une prise de vue réelle. Selon la position de la caméra virtuelle, il ou elle détermine l’endroit où les personnages sont et où ils seront à la fin de leur mouvement, selon la chorégraphie de la séquence.
Comme le rappelle le mot « layout » : il s'agit moins de recréer des mouvements que d'installer les objets (et personnages) dans l’environnement et de s’assurer du respect des proportions physiques de ceux-ci lorsqu’un mouvement est effectué.
Artiste VFX
Spécialiste de la réalisation des effets spéciaux, l’artiste VFX intègre les effets spéciaux aux prises de vue traditionnelles.
Chef / Cheffe d'équipe d'animation (Lead animateur / Lead animatrice)
La ou le chef d’équipe d'animation (ou Lead animateur / animatrice) est responsable de tous les animateurs et toutes les animatrices. Il ou elle est mis en charge du roulement de l’ensemble du travail d’animation, tant au niveau technique qu’esthétique.
Chef / Cheffe d'équipe 3D (Asset Lead)
Le chef ou la cheffe d'équipe 3D supervise le travail de toutes les équipes, internes et externes, qui travaillent à la production d’assets. Il ou elle prépare la chaîne de production, s’assure de son suivi et vérifie le flux de production.
Chef / Cheffe de studio (Head of Studio)
La cheffe ou le chef de studio est chargé du bon fonctionnement général du studio.
Ses principales tâches sont de :
Compositeur / Compositrice VFX / (VFX Compositing Artist)
Responsable de l’intégration des scènes 3D, le compositeur ou la compositrice VFX (artiste en compositing) a la charge d'assembler les éléments visuels qui forment un plan (les décors numériques, les effets ajoutés, les avant-plans et arrière-plans, etc.).
Sous la direction du superviseur du département d'intégration, il ou elle est également garante de la qualité visuelle des plans d’effets visuels.
Dans le secteur des effets visuels :
Coordonnateur / Coordonnatrice VFX
Le coordonnateur ou la coordonnatrice VFX coordonne les étapes de travail des différents départements et effectue les suivis de livraisons.
Designer graphique / Designer d'animation / Animateur graphique / Animatrice graphique (Motion Designer)
Le ou la designer graphique conçoit et anime des éléments graphiques statiques en 2D (incluant du texte). Ces animations prennent la forme de clips animés sur des pages web, par exemple, ou encore de courtes animations dans des logiciels interactifs.
Dans le secteur du cinéma :
Collaborer sur la création de génériques artistiques et de titres animés.
Dans le secteur du jeu :
Animer des tableaux de bord de jeu et des interfaces.
Designer de jeu (Game Designer)
Les designers de jeu imaginent et conçoivent un jeu dans son ensemble (progression du joueur, rétroactions, éléments de jeu, etc.).
En ce sens, ils et elles conçoivent le principe même du jeu ainsi que ses règles et mécaniques afin d'offrir aux joueurs et joueuses la meilleure expérience possible tout en assurant que ce jeu soit stimulant, mais aussi jouable et cohérent.
Designer de niveau (Level Designer)
Les designers de niveau (level designer) appliquent les règles de jeu dictées par les designers du jeu sur le segment (niveau de jeu) dont ils ou elles sont responsables afin d’établir la jouabilité de ce niveau tout en tenant compte de l’expérience du joueur ou de la joueuse.
Designer UI-UX / Artiste UI-UX
Les designers (artiste) UI-UX conceptualisent et améliorent les interfaces utilisateurs.
Ce sont de véritables ingénieurs et ingénieures d'interface. Ils ou elles travaillent, par exemple, sur la fabrication et l’amélioration des menus du jeu ou encore sur des expériences immersives.
Le but de leur travail est de créer l’expérience utilisateur (UX) la plus fluide possible, retirant du jeu (ou d’une expérience immersive, par exemple) toute frustration sans récompense et tout défi non utile.
Note : UX veut dire User eXperience et UI User Interface. Ainsi, l'artiste UI se préoccupe plus de l'interface comme telle et l'artiste UX sur l'effet de l'expérience sur une personne.
Développeur / Développeuse de chaînes opérationnelles (pipeline)
Le développeur ou la développeuse de chaînes opérationnelles est responsable de la conception et du développement des chaînes de travail et des outils destinés à faciliter le processus de production des projets. Il ou elle doit avoir de solides compétences techniques, connaître le développement de logiciels et communiquer clairement et efficacement avec les développeurs et les artistes.
Développeur interactif / Développeuse interactive
Le développeur interactif ou la développeuse interactive est chargé de la production d’idéations et de concepts dans la création de médias interactifs. Il ou elle crée du matériel visuel et sonore à travers un travail de programmation informatique. Ce rôle combine obligatoirement des compétences à la fois créatives et techniques.
Directeur / Directrice de création
Le directeur ou la directrice de création supervise les équipes créatives. Il ou elle garantit aussi l’orientation créative du projet (aspect graphique et esthétique, mécaniques de jeu, design) tout en faisant respecter les contraintes imposées.
Note : La différence entre ce métier et celui de directeur ou directrice artistique, principalement en charge de l'esthétique de l'œuvre (costumes, décors, etc.), est que le directeur créatif ou la directrice créative est responsable de tous les aspects créatifs d'une œuvre et de toutes les étapes de la création.
Directeur / Directrice de studio
Le directeur ou la directrice de studio dirige tous les aspects (créatifs ou non) d’un studio. Il ou elle veille à la gestion des opérations de production du studio, des échéanciers de production, de la mise en équipe des différents départements et de toutes autres ressources.
Directeur / Directrice de la chaîne de production (TD pipeline)
Le directeur ou la directrice de la chaîne de production dirige l’ensemble des choix techniques qui seront utilisés pour assembler toutes les parties d’un projet 2D ou 3D afin de répondre aux impératifs de la chaîne de production.
Parfois appelée TD (technical director) pipeline, cette personne dirige la création d’outils et de logiciels afin de s’assurer que les différentes composantes entre les disciplines soient cohérentes entre elles et intégrées les unes aux autres.
Directeur / Directrice de l'éclairage
Le directeur ou la directrice de l'éclairage dirige les méthodes de travail et assure les choix techniques d’éclairage qui seront utilisés pour produire les environnements en 2D ou 3D. Il ou elle dirige les artistes 2D et 3D vers les bonnes pratiques et s’assure qu’ils répondent aux impératifs de la chaîne de production.
Directeur / Directrice technique des effets de simulation (FX)
Le directeur ou la directrice technique des effets de simulation supervise les méthodes de travail et assure les choix techniques qui seront utilisés pour produire les diverses simulations créées par les effets spéciaux.
Note : Les simulations peuvent être des particules (eau, feu, etc.), des objets ou encore des effets de multiplication, comme les foules.
Directeur / Directrice technique des environnements numériques (Matte Painting)
Le directeur ou la directrice technique des environnements numériques dirige les méthodes de travail et assure les choix techniques qui seront utilisés pour produire les environnements en 2D ou 3D. Il ou elle dirige les artistes 2D et 3D vers les bonnes pratiques et s’assure qu’ils répondent aux impératifs de la chaîne de production.
Directeur / Directrice technique graphique
Le directeur ou la directrice technique graphique est responsable de la qualité du contenu technique de son corps de métier. Il ou elle collabore avec les membres de l’équipe de direction pour développer la vision globale du projet et déterminer sa faisabilité technique. Pour ce faire, il ou elle rencontre les artistes techniques et les assistants directeurs techniques graphiques dans le but de faire appliquer les normes, établir des références, offrir de la rétroaction, etc.
Dans le secteur du jeu :
Directeur / Directrice technique des personnages
Le directeur technique des personnages dirige les méthodes de travail et assure les choix techniques qui seront utilisés pour animer les personnages en 3D. Il ou elle dirige les artistes 3D vers les bonnes pratiques artistiques et s’assure qu’ils répondent aux impératifs de la chaîne de production.
Dans le secteur du jeu :
Directeur créatif / Directrice créative
Le directeur créatif ou la directrice créative définit la vision conceptuelle et dirige le travail de l’ensemble des designers qui travaillent sur un projet.
Dans le secteur du jeu :
Dans le secteur des expériences numériques immersives :
Directeur exécutif / Directrice exécutive de la production
Le directeur exécutif ou la directrice exécutive est responsable de garantir l’exécution de la stratégie de vente et le bon déroulement des projets. Il ou elle gère les ressources humaines, l'infrastructure et la méthode du projet, l’horaire et le budget en plus d’être garant de la livraison du produit, de sa qualité et de sa mise en marché.
Directeur / Directrice du département d'animation (Head of Animation)
Responsable en chef de tous les sous-départements d’animation.
Formateur / Formatrice en FX (FX Learning Lead)
Le formateur ou la formatrice FX est un ou une artiste qui a également un rôle pédagogique. Sa double fonction, en plus d'être artiste, est de créer du matériel pédagogique, de donner des formations et de recruter des étudiants et étudiantes et de participer aux entrevues et à la sélection des candidats et candidates. Il ou elle assure également la communication entre l’équipe de coordination, la direction et les studios qui embauchent les étudiants et étudiantes.
Infographiste
L’infographiste crée des supports de communication visuelle à l’aide d'outils numériques uniquement. Il ou elle n'utilise pas d'autres outils ou supports physiques, des dessins ou graphiques sur papier, par exemple.
Note : L'infographiste a un rôle plus technique que le ou la graphiste en ce sens où son travail de création dépend de connaissances techniques et informatiques.
IO (Input-Output) pipeline
L’IO pipeline est responsable des transferts de données entre les différents départements et avec les sous-traitants.
Intégrateur / Intégratrice en engin de jeu
L’intégrateur ou l’intégratrice en engin de jeu est responsable d’intégrer les éléments 2D ou 3D dans l’engin de jeu selon les paramètres définis par le directeur technique.
Chef ou cheffe d’équipe (suivi) (Lead matchmove et tracking)
Le chef d'équipe ou la cheffe d'équipe dirige l'équipe de suivi de mouvement (matchmove et tracking).
Lead animateur / Lead animatrice
Le Lead animateur ou la Lead animatrice dirige l’aspect technique de l’animation ainsi que les méthodes de travail. Il ou elle approuve les choix techniques et créatifs, dirige les artistes vers les bonnes pratiques et s’assure qu'ils et elles répondent aux impératifs de la chaîne de production.
Dans le secteur du jeu :
Lead technologie
En collaboration avec la direction et la R&D, le ou la Lead technologie définit la vision technologique de l’entreprise et prend les décisions relatives aux intérêts technologiques en mettant en œuvre certaines stratégies et en veillant aux tactiques de déploiement des ressources. Il ou elle est également responsable de la définition des paramètres d’un projet en trouvant des solutions optimales pour assurer la faisabilité, la fiabilité et la rentabilité des solutions et des projets.
Les Leads technologie travaillent en étroite collaboration avec divers intervenants et intervenantes (internes et externes) ainsi qu'avec les clients et clientes. Ils assument parfois un rôle de gestion et de coach auprès de l’équipe « technologie ». Il ou elle assume les tâches suivantes :
Administration / production des projets :
Gestion d’équipe et collaboration :
Direction stratégique :
Monteur spécialisé / Monteuse spécialisée en environnement 3D (Visualisation 360)
Le monteur ou la monteuse 360 se spécialise dans le montage de vidéos filmés en environnements 3D, souvent en lien avec des expériences en immersion 360.
Gestionnaire, sous-traitance (Outsourcing manager)
Gestionnaire responsable de la sous-traitance. Il ou elle gère la sous-traitance d’une partie de la production du jeu ou des effets spéciaux.
Producteur / Productrice
Le producteur ou la productrice gère les activités de toutes les équipes de production et s’assure de la livraison du produit dans les délais impartis et selon le budget disponible. Il ou elle est également responsable de la qualité du produit.
Producteur associé / Productrice associée
Le Producteur associé ou la productrice associée est en charge de l'équipe de création. Il ou elle veille sur les échéanciers, le déploiement technique et les communications avec l’équipe et le client.
Dans le secteur du jeu :
Producteur créatif / Productrice créative
Le producteur créatif ou la productrice créative est en charge du développement des affaires, de la production exécutive de projet VFX, de la direction artistique, de la direction de création. Il ou elle veille au développement des affaires, au développement créatif, à la rédaction créative et aux analyses budgétaires.
Producteur délégué / Productrice déléguée
Le producteur délégué ou la productrice déléguée est responsable de l’ensemble d'un projet en particulier.
De concert avec les superviseurs et superviseures des effets visuels et les chefs et cheffes d’équipes, il ou elle a pour tâche de :
Producteur exécutif / Productrice exécutive (Line Producer)
Le producteur exécutif ou productrice exécutive occupe la fonction de principal gestionnaire à la tête de l’ensemble du projet. De façon générale, il ou elle garantit l’exécution du projet. Tout comme le producteur délégué ou la productrice déléguée, il ou elle s’assure que la production s’effectue selon les délais et le budget déterminés sur l’ensemble du projet.
Réalisateur / Réalisatrice
Les réalisateurs et réalisatrices sont responsables de la vision artistique des projets créatifs. Ils ou elles conçoivent et supervisent toutes les étapes créatives allant de la préproduction (scénarimage, distribution, direction artistique, etc.), à la postproduction (montage, mixage, musique, etc.), en passant par la production (tournage). De concert avec les superviseurs et les producteurs, le réalisateur ou la réalisatrice s'assure du respect de la vision d’ensemble du projet.
Dans le secteur du jeu :
Un réalisateur ou une réalisatrice en jeu vidéo sera davantage sous la direction du directeur créatif et sera responsable notamment des cinématiques de jeu en temps réel ou en prérendu.
Réalisateur / Réalisatrice de cinématiques
Le réalisateur ou réalisatrice de cinématiques est en charge de créer les scènes cinématiques du jeu (qu’elles soient interactives ou non). Il ou elle collabore étroitement avec le studio de capture de mouvement (motion capture) afin d’organiser les multiples aspects du tournage. Ce poste inclut la création des éléments suivants :
Responsable des opérations (Head of Creative Operation)
Il ou elle est responsable de toutes les opérations créatives au sein de l’entreprise. Il ou elle est en charge du flux de travail, des outils, des formations, de la gestion et du soutien des départements.
Responsable du rendu (Render Wrangler)
Le ou la responsable de rendu est responsable de soutenir la production des rendus d’images pour des projets d’effets visuels. Relevant de l’équipe technologie informatique (TI), il ou elle travaille à la fois avec les artistes et les directeurs et directrices techniques en effets visuels.
Note : Il s’agit d’un poste d’entrée qui touche à tous les aspects de la chaîne de production.
Rigger / Riggeuse / Squeletteur / Squeletteuse / Créateur / Créatrice d'armature / (Skinner)
Le rigger ou la riggeuse est la personne qui est responsable du paramétrage de l’armature d’un modèle 3D pour permettre l’articulation de ses pièces ou de ses organes en vue de son animation. (L’emprunt à l’anglais rigging est courant pour désigner ce concept.) Portant parfois le nom de squeletteur ou squeletteuse, skinner ou encore créateur ou créatrice d'armatures, cet artiste intervient après la modélisation d’un personnage (character) afin de créer un squelette 3D et de développer un système de contrôle (rig) pour l’animer.
Note : En plus de devoir maîtriser certains outils propres à l'animation, la personne en charge de l'armature doit aussi connaître les outils de programmation (Python, C++, etc.).
Superviseur / Superviseuse CG (Superviseur / Superviseuse effets visuels ou VFX)
Le superviseur ou la superviseure CG a la charge de produire tous les éléments 3D. Il ou elle fait fonction de pont entre la vision et la réalisation d’un objet, travaillant à la fois avec l'équipe qui conceptualise et celle qui exécute. De concert avec le superviseur d’effets spéciaux, il ou elle est responsable de l’ensemble de l’équipe de création des éléments numériques d'une œuvre, orientant les artistes 3D tant au niveau technique qu’esthétique.
Superviseur / Superviseuse de capture de mouvements
Le superviseur ou la superviseure de la capture de mouvement est responsable de l'équipe qui applique cette technique. La capture de mouvement, appelée aussi motion capture, est utilisée en jeu, en cinéma et en animation. Il ou elle supervise le bon déroulement des tournages et assure le suivi de toute la chaîne de postproduction (ex. tracking, labelling, re-targeting, motion editing) jusqu’à l’intégration des animations au projet final (ex. moteur de jeu ou scène de rendu final 3D).
Note : À ne pas confondre avec le matchmove, la capture de mouvement (mocap) est l'enregistrement de données à l’aide de capteurs de mouvements, fixés le plus souvent sur un acteur humain. Cette pratique permet ensuite d'animer les modèles 3D qui découlent de cette capture.
Superviseur / Superviseuse en composition (compositing)
Le superviseur ou la superviseure en composition dirige et valide le travail des artistes en composition (compositing). C'est à lui ou elle qu’incombe la tâche de valider les espaces de colorisation dans chaque plan.
N.B. : Les descriptions de postes sont inspirées de multiples sites web spécialisés tels que Les métiers de la créativité numérique (SYNTHÈSE – Pôle Image Québec 2020), le Référentiel des métiers du jeu vidéo (Syndicat national du jeu vidéo 2020), le Lexique 3D (Bureau du cinéma et de la télévision du Québec s. d.) et le Vocabulaire des métiers du jeu vidéo (Office québécois de la langue française 2020).
Pour des définitions et des exemples d’appellations d’emploi associés à ces CNP, voir le site web d’Emploi Québec : IMT en ligne (Emploi Québec 2021).
Les secteurs du jeu vidéo, des effets spéciaux, de l’animation 3D et des nouvelles technologies numériques (réalité virtuelle et augmentée, par exemple) sont en expansion rapide depuis maintes années. Cette évolution accélère la spécialisation des métiers liés à l’image numérique. Il en découle une complexification du travail. Naturellement, les secteurs touchés par l’enquête ont subi des changements importants qui ont mené à l’éclatement de certains métiers et à la multiplication de nouveaux postes d’artistes 3D.
Artiste 3D est une appellation généraliste qui fait référence à ceux et celles qui créent l’image ou la déforment. Il s’agit de travail de composition, de modélisation et d’ombrage, pour n’en nommer que quelques-uns. Le terme artiste 3D est aujourd’hui préféré à celui d’animateur qui est maintenant réservé pour ceux et celles qui animent — littéralement — les images. Il s’agit des artistes qui s’occupent de suivi (tracking) ou de capture de mouvement (mocap), par exemple. Ainsi, le métier d’artiste 3D se subdivise en plusieurs catégories, par exemple : artiste à l’éclairage, artiste spécialisé en conception de créatures, artiste en composition (compositing), artiste spécialiste de suivi (tracking et matchmove), artiste en création de textures et surfaces, artiste en rotoscopie, artiste à la modélisation, artiste à la prévisualisation, artiste spécialiste en scénarimage (storyboard) et autres.
Ci-dessous, une liste d’intitulés de postes en lien avec l’art 3D, recensés lors de l’enquête :
Les répondantes et répondants de l'enquête sont issus des entreprises suivantes:
*Note : La liste contient l’ensemble des entreprises consultées dans le processus général de l’enquête. Le présent rapport n’aborde pas toutes les données recueillies, ni toutes les entreprises susmentionnées. Ces dernières seront intégrées dans le processus de vigie en continu mené par SYNTHÈSE dans les mois à venir.